Dans les cinémas à 360° des fêtes foraines, on peut faire un Paris-Londres en Eurostar en quelques minutes à peine, les images accélérées jusqu’à dégobiller ses gaufres fraise/chantilly. C’est un peu le parcours suivi par la compilation Modulations Cinema for the ear, bande-son douloureusement sélective du génial documentaire du même nom, retraçant l’histoire de […]
Dans les cinémas à 360° des fêtes foraines, on peut faire un Paris-Londres en Eurostar en quelques minutes à peine, les images accélérées jusqu’à dégobiller ses gaufres fraise/chantilly. C’est un peu le parcours suivi par la compilation Modulations Cinema for the ear, bande-son douloureusement sélective du génial documentaire du même nom, retraçant l’histoire de la dance-music, depuis l’invention des cylindres par Thomas Edison jusqu’aux derniers beats de Squarepusher, aux derniers scratches des X-Ecutioners. Un travail colossal, tissé à partir de centaines d’interviews, dont cette bande-son offre un assez brillant raccourci, démarrant avec l’increvable I feel love de Donna Summer (un maxi-45t, comme on disait alors, que j’embrasse encore régulièrement) pour s’achever dans les beats effondrés de To Rococo Rot. Entre-temps, on aura visité en Concorde New York (Bambaataa), Detroit (Juan Atkins), Chicago (Jesse Saunders), la jungle londonienne (Goldie) ou une forêt de bonsaïs japonais (Ryoji Ikeda). Un voyage express d’où sont envoyées ces cartes postales, là où le documentaire se donne le temps de s’installer dans l’intimité d’une impressionnante brochette de témoins et de remonter les méandres du fleuve jusqu’à Kraftwerk, Eno, Moroder ou Throbbing Gristle, bien entendu, mais aussi John Cage, Miles Davis ou Luigi Russolo.
Nettement plus limité dans le temps et le savoir, le mix réalisé par les Lo-Fidelity Allstars sur les platines acquises d’avance de la Boutique de Brighton n’en demeure pas moins un impressionnant et torride hommage au beat tordu, au groove débauché. On pourrait d’ailleurs s’amuser à laisser cette chronique aux bons soins de quelques titres généreusement invités à cette débauche : aux questions affolées des Rythmes Digitales ou de Wild Style Bon Nimble What is it et Hey, you, what’s that sound’ , on laissera la réponse aux Space Raiders (« C’est le Disko Doktor ») ou, surtout, à Armand Van Helden : « C’est un phénomène funk. » Ce qui permettrait aisément d’expliquer comment, en quelques minutes, on peut passer en nage de l’euphorie de Trouble Funk au funk trouble de Super_Collider, du hip-hop affolé de Silver Bullet à la house contorsionniste du Français Jackson. On laisserait alors le mot de la fin aux Tams : « Be young, be foolish, be happy. »