D’Afrique du Sud, Nibs Van der Spuy vient réveiller le fantôme de Nick Drake avec son folk ouvert aux vents du bout du monde. A découvrir en session acoustique et vidéo cette semaine.
C’est une de ces vilaines pochettes qui, trop souvent, condamnent les pépites à l’ombre et envoient les chefs-d’œuvre aux oubliettes. Aussi, on a mis un certain temps avant de jeter une oreille à Beautiful Feet, le pourtant bouleversant album de Nibs Van der Spuy, songwriter folk d’Afrique du Sud. Méconnu sur nos terres mais jouissant dans son pays d’une honorable notoriété, il a été élevé dans une famille de musiciens. “Ma mère était pianiste et me jouait la musique de Bach et Chopin. Mon père était pilote de ligne mais passait beaucoup de temps à me chanter des morceaux à la guitare, des vieilles chansons de guerre des années 40. Surtout, j’ai grandi dans la chambre de mon grand frère : il avait sept ans de plus que moi et écoutait les Rolling Stones, les Beatles. Je devais avoir trois ans lorsque j’ai découvert l’album Beatles for Sale. Il ne m’a plus quitté depuis.”
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Près de quarante ans ont passé, le temps pour Van der Spuy de développer, par tous les moyens possibles, son amour juvénile pour la musique. Après un diplôme de lutherie obtenu à l’université de Phoenix aux Etats-Unis (“un talent que je garde bien au chaud pour mes vieux jours”), le jeune homme revient rapidement en Afrique du Sud, s’installe près de Durban et, après avoir brièvement officié dans un trio folk inspiré par Crosby, Stills & Nash, forme Landscape Prayers. Un second groupe qui lui fera publier pas moins de quatre albums et lui permettra, pendant dix ans, de faire convoler ses amours authentiques pour le folk ou la pop et son béguin pour les musiques du monde – de jolies noces qu’il continuera ensuite d’honorer dans une carrière solo dont Beautiful Feet constitue aujourd’hui le troisième volet. “Je crois qu’un vrai musicien ne doit pas se limiter à un style particulier. En Afrique du Sud, nous avons toujours baigné dans un univers musicalement éclectique. J’ai grandi en entendant un alliage de sons africains, de guitares zouloues et de chansons pop européennes. Puis la fin de l’apartheid a permis la naissance d’une nouvelle nation, d’un pays où les libertés étaient enfin possibles. Elle nous a par ailleurs donné la possibilité de découvrir un grand nombre d’artistes noirs que nous ignorions jusque-là.”
Proche de Piers Faccini, songwriter avec lequel il partage le goût du voyage, l’humilité et la discrétion, Van der Spuy puise comme son ami dans ce folk apatride qui emprunte tous azimuts, aux guitares du Mali comme aux sonorités endémiques du mbaqanga chéries un temps par Paul Simon, laissant par ailleurs planer sur tout l’album l’ombre du fantôme de Nick Drake – la ressemblance dans le jeu de guitare, les mélodies et, surtout, le timbre de voix doux comme une étreinte, est troublante (Anna Rosa). “Je l’ai découvert en France en 1997. Je suis très fan de Tim Buckley, et on m’avait dit que je devais absolument écouter ce chanteur folk anglais de la fin des années 60. Je suis allé à la Fnac acheter le coffret Fruit Tree. Puis je suis tombé naturellement amoureux de tous ses disques. C’est très flatteur, on m’a souvent dit que nos voix étaient similaires. Surtout en Europe. Il faut dire qu’en Afrique du Sud, Nick Drake est assez méconnu.”
De passage à Paris début décembre, Nibs Van der Spuy est venu nous jouer quelques unes de ses comptines dans notre désormais célèbre salle verte, pour une nouvelle Inrocks Session. Cerise sur le gâteau, le sud africain a repris pour nous le Roads de Nick Drake, que l’on peut également entendre sur son album.
http://www.nibs.co.za/
http://www.myspace.com/nibs
Réalisation de l’Inrocks Session : Alexandre Buisson
Caméras : Magali Bargain & Martin Cazenave
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