L’erreur serait peut-être de deviner dans le titre du troisième album de Julien Baer, Notre dame des limites, une forme d’aveu (pieux) de défaite, hérité comme ça d’une sorte de mini-épiphanie à la Claudel. Non, oh non, Julien Baer, ce frère d’Edouard ? le dire vite pour ceux qui ne savent pas ?, parti sans […]
L’erreur serait peut-être de deviner dans le titre du troisième album de Julien Baer, Notre dame des limites, une forme d’aveu (pieux) de défaite, hérité comme ça d’une sorte de mini-épiphanie à la Claudel. Non, oh non, Julien Baer, ce frère d’Edouard ? le dire vite pour ceux qui ne savent pas ?, parti sans laisser d’adresse depuis cinq ans et Cherchell, son précédent album, ne s’est pas, dans l’intervalle, agenouillé devant un quelconque autel en se jurant de ne plus faire son malin – comme il le faisait pourtant avec tant d’élégance et de distance, sur son premier disque éponyme sorti en 1997. On avait alors découvert ces singles brillants (Juillet 66 ; Le monde s’écroule) qui nous avaient alors convaincus de porter la chemise en ouvrant négligemment les trois boutons du haut.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Notre dame des limites, ce titre « cathédral » et si humble au final, indique plutôt, et simplement, que le Baer sait ce qu’il veut et sait faire : une pop française racée, soignée et un rien variéteuse, bavarde sans être vantarde, qui serait aux années 90 et 2000 ce que la musique d’Alain Chamfort fut aux années 80 ? et c’est un compliment, nom d’une pipe. Chez Baer aujourd’hui, comme chez Chamfort jadis, et encore, il y a cette belle envie de trouver les mots justes pour raconter cette vie qui ne l’est pas forcément. Il y a aussi cet amour de la mélodie rare et discrète, élevée au grand air, voire au grand écart.
Notre Baer, voyageur et dandy là où d’autres auraient l’air salement bobos, sait emprunter, pour sa chanson dite « française », à la soul comme au gnawa. Culotté, il conserve ses babouches pour déambuler lentement à l’extrémité des pistes de danse, l’air toujours un peu ailleurs et même un peu en dedans, parfois. En boucle, Roi de l’underground, Au Cœur du système ou Drôle de situation, qui sont parmi les plus belles chansons que Baer ait écrites à ce jour, et qu’on écoute plutôt de nuit, deviendront de jolis hits d’intérieur pour ceux qui voudront bien leur accorder une petite chance. Pour ces gens-là, des gens bien assurément, Julien Baer deviendra un ami : fidèle et précieux ? et pas uniquement de saison.
{"type":"Banniere-Basse"}