Le 2 février 1999, TLC inscrivait définitivement son nom dans la riche histoire du R&B avec « No Scrubs », single emblématique et toujours influent.
Le 9 septembre 1999, Prince se présente sur la scène des MTV Video Music Awards. La foule est en délire, mais le Kid de Minneapolis n’est pas là pour interpréter une de ses chansons (au hasard, 1999). S’il a répondu à l’invitation de Chris Rock, hôte de l’événement ce soir-là, c’est pour annoncer la présence de son « groupe préféré », TLC, venu interpréter No Scrubs : son méga-hit, publié quelques mois plus tôt (le 2 février, plus précisément) sur un troisième album couronné de succès (Fanmail) et porté par un clip d’Hype Williams, pensé en forme d’hommage au fameux Scream de Michael et Janet Jackson.
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Au cours de la soirée, No Scrubs sera consacrée « Meilleure vidéo de l’année » par les pontes de la chaîne américaine. Mais là n’est pas l’essentiel. Ce que l’on retient de la cérémonie, c’est cette performance du trio américain, les cris d’une foule visiblement ravie ou encore la puissance fédératrice d’un single. Il faut dire que TLC tient là l’un des tubes les plus emblématiques de la fin des années 1990.
So, no I don’t want your number, no
Les chiffres ne mentent pas : avec ses 677 000 exemplaires écoulés rien qu’au Royaume-Uni, No Scrubs est le deuxième single le mieux vendu en 1999, juste derrière Believe de Cher. Côté production, c’est tout aussi fou : Tionne » T-Boz » Watkins , Lisa « Left Eye » Lopes et Rozonda » Chili » Thomas se réapproprient alors ce que développe au même moment Timbaland (un beat synthétique, un rythme saccadé et un sens de l’instrumentation qui finit par exploser à l’entame du refrain), témoignent d’un savoir-faire mélodique indéniable et ouvrent une brèche pour les années à venir.
« Les filles TLC ont influencé à peu près tous les groupes de filles qui existent actuellement, et elles ont certainement influencé les Destiny’s Child ». Dans une interview au Philippine Daily Inquirer en 2004, Beyoncé ne faisait pas dans la demi-mesure pour évoquer l’impact de TLC au sein de la pop music. Et cela n’a rien d’un hasard quand on sait que Kevin « Ske’kspere » Briggs et Kandi Burruss, aux manettes de No Scrubs, ont écrit à peu près au même moment Bills Bills Bills des Destiny’s Child.
En clair, les deux comparses savent faire des tubes. Des vrais, simples et efficaces, immédiats et finement pensés, du genre à rester en tête qu’on le veuille ou non. « Je crois que la chanson est sortie avant le clip, et je me rappelle que la radio la diffusait sans arrêt, rembobinait Rozonda Thomas à Esquire. On l’entendait constamment. C’était l’une de ces chansons tellement accrocheuses que vous pouviez vous retrouver à la chanter quand la radio n’était même plus allumée. »
À l’origine, la chanson écrite par Kevin « She’kspere » Briggs, un des producteurs officiels du label LaFace, n’a pourtant pas grand-chose à voir avec la version connue du grand public. Les guitares hispaniques ne jouent pas un rôle central et les paroles ne mentionnent à aucun moment ces mecs (les « scrubs » en question), « machos », « égoïstes », « toujours en train de parler de ce qu’ils désirent et ne se soucient pas des autres », comme elles le chantent en introduction.
C’est Kandi Burruss, ex-chanteuse de Xscape, qui intervient alors, s’inspire d’expériences vécues et offre à ce morceau une dimension féminine. Presque féministe même : « Beaucoup de garçons auraient dû détester No Scrubs par rapport à ce qu’on y disait, poursuit Rozonda Thomas, toujours à Esquire. Je pouvais marcher dans un centre commercial et entendre : « Chilli, je ne suis pas un scrub. Sérieux, je ne suis pas un scrub ». Tandis que les filles me disaient : « Je ne veux pas d’un scrub également ». C’était un peu comme si on tenait là la girlfriend song idéale. »
Symbole d’une époque
À une période, la fin des années 1990, où le rock domine encore les débats et agite les foyers du monde entier, le succès de No Scrubs pourrait surprendre. Il incarne pourtant magnifiquement son époque, celle qui a accueilli en à peine quelques mois The Boy Is Mine de Brandy & Monica, Are You That Somebody ? d’Aaliyah ou Caught Out There de Kelis, celle qui célèbre les innovations stylistiques de quelques producteurs avant-coureurs (Timbaland, donc, mais aussi The Neptunes ou Brian McKnight), celle qui commence à consacrer le R&B et à le prendre pour ce qu’il est : un genre musical novateur, influent, qui n’en était alors qu’aux prémices de quelque chose de plus grand encore.
Depuis, l’histoire n’a fait que le confirmer : malgré la disparition de Lisa Lopes en 2002, un large public a acclamé l’arrivée d’un cinquième album de TLC en 2017, tandis qu’Ed Sheeran a avoué s’être inspiré de No Scrubs pour Shape Of You et que des artistes aussi différents que Jorja Smith et Weezer ont repris cet hymne. Toujours aussi imparable vingt ans après.
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