François Houle et Benoît Delbecq appartiennent à cette nouvelle génération de musiciens qui n’ont que faire des catégories où l’on aime habituellement enfermer la musique. Leur art est vivant, mutant, transgressif par nature et nécessité. C’est dans l’entre-deux et la métamorphose que se situe leur domaine, hanté par l’éphémère de l’apparition. Delbecq, on l’a déjà […]
François Houle et Benoît Delbecq appartiennent à cette nouvelle génération de musiciens qui n’ont que faire des catégories où l’on aime habituellement enfermer la musique. Leur art est vivant, mutant, transgressif par nature et nécessité. C’est dans l’entre-deux et la métamorphose que se situe leur domaine, hanté par l’éphémère de l’apparition. Delbecq, on l’a déjà présenté dans cette rubrique : membre fondateur des Recyclers avec Noël Akchoté et Steve Argüelles, il est également l’âme autant que le cerveau des groupes Kartet et Paintings, parmi les plus créatifs de la jeune scène française. Pianiste de la fluidité nocturne, il aime piéger son instrument de diverses préparations rendant ainsi hommage dans le même mouvement à l’univers de John Cage et aux polyphonies percussives des pygmées Aka d’Afrique centrale. Sa musique navigue ainsi naturellement entre l’improvisation la plus radicale et l’écriture polyrythmique ultra-sophistiquée de compositeurs contemporains comme György Ligeti et Colon Nancarrow… Sa composition, Nancali, qui donne son titre à l’album, est un hommage conjugué à ces deux musiciens, parmi les plus créatifs de la seconde moitié du xxème siècle. François Houle, lui, est canadien, célèbre dans son pays pour ses nombreuses incursions dans le domaine contemporain (Scelsi, Xenakis) et dans la sphère des musiques actuelles (Marilyn Crispell, Joëlle Léandre ou George Lewis). Clarinettiste virtuose, utilisant une très grande palette d’effets, il met en oeuvre une poétique du timbre et de la matière, jouant sur une maîtrise exceptionnelle de sa sonorité, tour à tour pleine, étranglée, tordue, projetée en phrases torsadées ou modulée en notes tenues, glissées, tremblées… Ensemble, ils inventent une musique de sensations fugaces qui joue sur l’éprouvé le tactile, l’épaisseur du souffle, les effets de texture : on trouve dans le jeu de Houle des réminiscences des recherches d’Evan Parker sur la respiration circulaire et le multiphonisme, créant ces sensations inquiétantes de mélodies fantômes, en trompe-l’oeil, à l’intérieur du souffle. Une musique à la fois forte et fragile, jamais austère, aventureuse, animée d’une pulsation, d’une allégresse rythmique de tous les instants, basée sur l’écoute, toujours à alimenter, l’entente, toujours à (ré)inventer.
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