La prestation londonienne du groupe mythique de Kevin Shields, le 22 juin, rassure ou confirme : My Bloody Valentine reste un cyclone incroyable. Récit d’une soirée sonique et d’un concert époustouflant.
[attachment id=298]Les six amplis empilés sur scène – rien que pour le seul Kevin Shields – et la distribution d’earplugs à l’entrée de la Roundhouse ont d’emblée donné le ton : la reformation de My Bloody Valentine ne serait pas une conversion publique du groupe aux douceurs de la folk. L’ovation mesurée qui les accueille dans une lumière bleu océan dit bien l’excitation retenue et l’incertitude d’un public pourtant acquis d’avance.
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Qu’allions-nous donc entendre ? Plus de 15 ans de silence et de rumeurs, un projet de reformation devenu l’arlésienne du rock indé, et puis tant de groupes perdus dans des comebacks décevants, pathétiques, inutiles (sinon pour les ronds) et, les concernant, pas même un nouveau morceau à se mettre dans le casque… Mais l’attaque d’Only Shallow met tout de suite fin au débat et annonce le cyclone. Le son est énorme, tous les quatre sont en place, physiquement inchangés. Bilinda et Kevin sont penchés sur leur Fender Jaguar quand Debbie et Colm, experts es tribalisme, testent la résistance de leur matériel.
Sinon une batterie trop présente au début – mais le son deviendra parfait après quatre ou cinq titres – et des voix malheureusement en retrait, le set est un concert époustouflant avec une montée en intensité sonique sans équivalent, dans un chevauchement de titres d’Isn’t anything et Loveless.
Au point même que la magnifique, mélodique et douce Lose My Breath a presque paru incongrue au milieu du torrent de lave : You Never Should, Thorn, Nothing Much to Lose, Soon, Feed Me with Your Kiss, Sueisfine… emportent tout sur leur passage.
Sur fond de vidéos bucoliques aux atours psychédéliques ou d’images répétitives de films sixties improbables, les guitares tressent leurs boucles sérielles et hypnotiques et dessinent une architecture totale où le moindre espace de silence est occupé. You Made Me Realise, en expérience sonore ultime (plus de vingt minutes d’un wall of sound tout en guitares saturées et infrabasses), fait vibrer – au sens propre – les corps et achève le public par une performance fascinante, extrême et intransigeante : la démarche intègre et sans concession d’un groupe essentiel qui, à l’heure de son retour, n’a sacrifié ni au désir de plaire ni à la crainte de décevoir.
Laurent Berges
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