L’Islandais cocufie son laptop et revient avec un vrai groupe de blues.
Comment peut-on faire de la musique “ironique”. Comment réduire une chose aussi vitale à un sarcasme – baise-t-on, boit-on, mange-t-on au deuxième degré ? Matthew Herbert, Ween, Katerine, Gonzales ont tous flirté avec la dérision, mais leur rapport à la musique reste trop viscéral, trop cinglé pour virer à la farce. Venu d’Islande, pays où la culture rock est encore un peu jeune pour être un fardeau ou un carcan, le facétieux Mugison donne ainsi l’impression de se moquer de ses sujets – le wok’n’woll ou le blues, qu’il a longtemps visités en hobo co(s)mique, guitare et laptop en bandoulière.
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Mais pas du tout : il y a autant d’amour, de respect débridé et de joie palpable de participer à l’aventure fantasmée du rock dans ces exercices de style que chez, par exemple, Jack White, avec qui il partage à l’évidence une passion naïve et touchante pour une certaine forme de blues flamboyant, Led Zep en tête. Mais les logiciels, même les plus tordus et piratés, possèdent ce désavantage : ils restent logiques, ne transpirent pas et ne chopent jamais le blues.
Exit, donc, le laptop, garage-band remplacé dans un authentique garage islandais par un vrai groupe électrique et rugueux qui sait, à l’occasion (sur le psychiatrique I’m Alright), jouer à mi-distance du vaudeville et du vaudou. Mais ce groupe, possédé et pâle, sait aussi prendre des pauses et sortir fumer une clope par – 20°, laissant alors le seul Mugison à sa guitare et ses idées noires, comme sur le magnifique Deep Breathing, un trésor qu’on aurait pu retrouver intact dans le jardin de Nick Drake. Le soupçonner d’ironie dans ces moments de grâce (on inclut le primitif et tremblant My Love I Love) serait assez déplacé.
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