Plus souvent rincé que princier : le vingt-cinquième album d’un artiste en chute libre.
A l’origine, ce vingt-cinquième album officiel de l’Artiste Précédemment Connu Comme Talentueux n’était distribué, au printemps dernier, que sur le net et dans une chaîne de grandes surfaces à prix cassés des Etats- Unis. Du disco hard au hard discount, de leader d’opinion à Leader Price, la dégringolade de Prince ne rend pas heureux : on ne se réjouit pas de l’hébétude, de l’impotence d’un type capable d’avoir troussé, fripon, quelques-unes des meilleures raisons de danser dans les années 80.
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Aujourd’hui récupéré par un label français, Prince en appelle sur cet album à la nostalgie, en alignant une série d’electro-funks rutilants, qui feraient presque illusion si seulement il y avait une âme et un sexe derrière ces exercices de style. Sa pochette digne de ces peintures aérographes infectes que des gros barbus mystiques imposent au capot de leur Citroën GS (généralement, des loups ou des Indiens aux yeux mi-clos), est à la hauteur de la plupart des chansons : ringardes, navrantes. Ainsi, le vraiment risible et insipide Chocolate Box, autotuné jusqu’à l’absence, dont le rap mou et frigide, aux métaphores burlesques malgré elles, est à peu près aussi sexy qu’un striptease M6 – tout en refourguant, à usage unique des souvenirs émus, le beat exact de When Doves Cry. Ainsi U’Re Gonna C Me, ballade poissarde et poisseuse qu’on ne souhaiterait même pas à Fleetwood Mac. Ce qui rend encore plus tristes les petits sommets agités de cet album, comme le léger et charnel Valentina, un tube énorme dans un monde juste (80’s), ou le tropical Ol’ Skool Company, merveille qui aurait fait fureur sur la BO de Flashdance.
Pour le reste, pour cette impression dérangeante de contrefaçon, de comédie, interrogeons- nous sur la conversion de Prince, à l’aube du siècle, aux dogmes fondamentalistes : a-t-on jamais vu un témoin de Jéhovah sexy, sensuel, lubrique ? Car aujourd’hui, tout ce qu’il incarnait à ses grandes heures, Prince le mime, le surjoue, pour les besoins de son film : une panoplie de pervers et de paillard comme d’autres enfilent un bleu de chauffe pour aller au turbin. Les témoins de Jéhovah considèrent les autres religions comme l’oeuvre de Satan, “principal promoteur du faux culte”. En mille gémissements, feulements, râles et laborieuses allégories sexuelles, tous simulés avec la grâce d’une actrice porno de série Z, Prince, lui, assure la promotion du faux cul.
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