Echaudé par les piètres pitreries de Dinosaur Jr ou par les pitoyables pantalonnades de Elmer Food Beat, on a appris à se méfier du mélange rock et humour. Pas de Ray Davies au pays de la fusion, Randy Newman, interdit de séjour au royaume du grunge. Pourtant, après quelques saisons de plomb, la drôlerie fait […]
Echaudé par les piètres pitreries de Dinosaur Jr ou par les pitoyables pantalonnades de Elmer Food Beat, on a appris à se méfier du mélange rock et humour. Pas de Ray Davies au pays de la fusion, Randy Newman, interdit de séjour au royaume du grunge. Pourtant, après quelques saisons de plomb, la drôlerie fait mine de reverdir aux Etats-Unis. A New York, Drink Me, duo farceur, chine dans nos arrière-boutiques préférées. Loufdinguerie millésimée Syd Barrett (Little green men), mirobolante version poids plume du I got you (I feel good) de James Brown, échos d’un orphéon lointain: bien heureusement dépourvu de centre de gravité, Sleep monte illico à la tête. Les deux compères de Drink Me abusent parfois de simagrées adolescentes, jouent du tube métallique, du sac de chips froissé, par crainte de mettre à nu leurs chansons. Coquetterie bien superflue: depuis les Lovin’Spoonful, personne n’avait aussi plaisamment évoqué la cossardise poisseuse et sensuelle des étés de Manhattan.
A l’autre bout de l’Amérique, Cake, de Sacramento, n’a que faire du sourire inquiet des timides. Motorcade of generosity joue aussi au petit jeu des citations, mais c’est pour rire, à gorge dévoyée. Satire virulente (Rock’n’roll lifestyle), détour chez Lou Reed (Ain’t no good , entre Cycle Annie, pour les trépidations ravageuses, et Femme fatale, pour la misogynie émerveillée), pastiche pétaradant de Jonathan Richman (Mr Mastodonarm), Cake sait se grimer, impose néanmoins l’évidence d’une identité parfaitement singulière. Une trompette de mariachis canaille, égarée en Californie du Nord, donne le tournis à une guitare merveilleusement granuleuse, Nino Rota parasite la bande-son d’American graffiti, la production, riquiqui, démode trois décennies de maousse technologie, et l’incroyable voix d’acrobate facétieux de John McCrea réconcilie numéro de clown et haute voltige. Du coup, on rigole à nouveau sous le chapiteau du grand cirque rock. Les marchands d’euphorisants chimiques ne disent pas merci à Cake.
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