“Trésor humain vivant” pour l’Unesco, héros national au Sénégal, le maître tambour, célèbre pour diriger avec virtuosité d’imposants orchestres de percussions, vient de disparaître à l’âge de 85 ans.
Malgré les années, ceux qui ont pu y assister ou simplement en voir la retransmission télévisée – c’était bien avant internet – n’ont pas oublié le délirant défilé sorti de l’imagination de Jean-Paul Goude pour le bicentenaire de la Révolution en 1989. Et un des clous de ce spectacle était sans aucun doute la prestation magistrale du maître tambour Doudou N’Diaye Rose dirigeant du haut de son char son grand orchestre de de dizaines de percussionnistes frappant leur tambour avec une précision effarante, entourés de virevoltantes danseuses en boubou.
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Cet événement historico-musical marquait les débuts d’un engouement du public européen pour la musique africaine, en particulier pour celle du Sénégal, anticipant ce qui allait devenir, pour le meilleur et pour le pire, la “world music”, avec des stars internationales comme Youssou Ndour.
https://www.youtube.com/watch?v=4KUFwmWU0cY
Collaborations multiples
Doudou N’diaye Rose, né le 28 juillet 1930 à Dakar, était issu d’une famille de griots, cette caste de musiciens chargés de chanter les louanges des héros et de célébrer les événements familiaux. Il avait passé sa jeunesse à recueillir les traditions rythmiques de son pays et à devenir un virtuose du “sabar”, un tambour typique de cette région de l’Afrique de l’Ouest dont on joue en frappant la peau avec une main et une unique baguette. Le sabar occupe une place de choix dans les musiques traditionnelles comme dans les styles modernes qui font fureur à Dakar, tel le mbalax.
La notoriété du musicien avait peu à peu dépassé les limites de son pays, au point que l’Unesco l’avait intégré à sa liste des « trésors humains vivants ». Il avait joué avec des stars mondiales, comme Peter Gabriel, avec qui il avait travaillé à la BO de La Dernière Tentation du Christ de Martin Scorsese en 1988. Il avait rencontré aussi des musiciens de jazz comme Dizzy Gillespie, Miles Davis et s’était rendu de nombreuses fois au Japon, autre pays de riche tradition de tambour.
En 1996, à la Fête de l’Huma il avait participé au projet Fodeuk qui réunissait le saxophoniste de free jazz David Murray et les jeunes rappeurs sénégalais de Positive Black Soul.
Actif jusque dans ses derniers jours, Doudou N’diaye Rose avait sans cesse œuvré à préserver et enseigner la richesse musicale de son pays. Il nourrissait le projet de fonder une école entièrement consacrée aux percussions.
Sénégal-Presse-Revue Les quotidiens titrent sur les +dernières notes+ de Doudou Ndiaye Rose http://t.co/uAk5Jkwyh6 pic.twitter.com/kspK5eBOUV
— ligne directe (@ligne_directe) 20 Août 2015
Aujourd’hui, tout le Sénégal pleure la disparition à 85 ans du musicien qui était depuis longtemps un personnage vénéré, un véritable symbole de la nation depuis qu’il avait composé en 1960 à la demande de Léopold Sédar Senghor, premier président du pays, une musique pour célébrer l’indépendance du Sénégal. Et comme le révèle la revue de presse de son pays, sa mort est ressentie comme un deuil national.
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