Un Morrissey chantant mieux que jamais.
Les derniers concerts de Morrissey, empreints de nostalgie, nous avaient laissés dubitatifs, malgré l’excitation de se trouver en sa rare compagnie. Chaque fois, ses musiciens avaient été trop présents, et lui pas assez, les guitares un peu lourdes, et lui aussi, physiquement. Dès l’entrée sur scène de l’ex-Smiths, en chemise de prêtre d’une sobriété détonante au milieu de l’accoutrement de son groupe (kilt et t-shirt Jobriath, star glam récemment exhumée par Morrissey), on sentait pourtant comme une vigueur nouvelle, l’envie d’en découdre, et surtout le plaisir immense d’être là. Morrissey n’est pas mort, Morrissey est de retour et Morrissey le dit, haut, fort et en couleurs (seul élément de scénographie, son nom en immenses lettres lumineuses, entre Las Vegas et fête foraine, en arrière-plan). Prenant de court tous ceux qui attendaient déjà une chanson des Smiths, Morrissey, chantant mieux que jamais, attaquait d’emblée avec « How soon in now « , puissant et noyé sous les stroboscopes. Le reste du concert se fera alors à cheval entre le passé (cinq morceaux des Smiths) et le présent (quasiment l’intégralité de You are the quarry). Avant de se lancer dans une version rageuse de Bigmouth strikes again ? le public entre hystérie et pâmoison ? Morrissey déclarait « qu’une force était toujours derrière nous qui s’appelait le passé ». Pour la première fois peut-être de sa carrière solo, Morrissey semble enfin avoir digéré ce passé, enfin être en paix avec lui-même, enfin avoir admis qu’il pouvait à la fois être et avoir été. C’est une bonne nouvelle pour lui, redevenu ce performer flamboyant et plein d’humour, mais pour les fans elle se mâtine d’une pointe de regret : il est désormais improbable de l’entendre chanter à nouveau les chansons poignantes de la période la plus douloureuse de sa vie (l’album « Vauxhall & I »). Détendu et surtout très ému par les témoignages d’une passion qui n’a pas faibli malgré son long silence, Morrissey ne reviendra que pour un seul rappel, un seul morceau, mais quel morceau : « There is a Light that Never Goes out ». Pensait-il en écrivant ce texte que c’est dans les yeux de ses fans qu’il le vérifierait bien des années plus tard ?
Jean-Baptiste Dupin
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