Portées par une voix scintillante et chaleureuse, ces chansons éclairent les images tapies dans l’âme.
“I was quelque part hiding in their stories”, chante Mina Tindle sur la première partie du Triptyque qui fait basculer son troisième lp dans des territoires mouvants. Réalisée avec son complice et époux Bryce Dessner, la pièce de dix minutes est un indice de la discrète mais profonde ambition de Mina Tindle. En mêlant sur cette phrase-clé les deux langues, elle y rassemble ses sources pour mieux creuser son sillon. Sister voit en effet se poser la pop papillonnante de cette artiste qu’on a d’abord connue folk (Taranta, 2012), puis indie rock (Parades, 2014).
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Elle se pose, oui, mais ne se repose pas : elle explore l’âme, surtout, sur un disque qui, justement, se nourrit de soul. Et se demande de quoi sont nourris la vie quotidienne, domestique, le sentiment des jours qui passent, ceux qui glisseraient sans bruit si on n’y prenait garde. Mina Tindle trouve une autre voie – elle les caresse et s’attarde, chanson après chanson, sur la moindre de leurs nuances. La peau, les muscles, le corps : Sister est un album dont la lumière révèle les teintes insoupçonnées de la palette de l’intime.
Un titre cosigné Sufjan Stevens
Conçu et enregistré devant des images de films en sourdine (Werner Herzog ou des documentaires animaliers), le disque est traversé de métaphores qui dévoilent l’épaisseur mythologique des sentiments ordinaires, puisant même chez Italo Calvino le thème de deux chansons, Louis et la romance cannibale Indian Summer. Celle qui est entrée en musique en se laissant éblouir par Cat Power a peut-être trouvé dans les fictions sophistiquées de l’écrivain italien l’équivalent littéraire du tropicalisme qu’elle affectionne.
En bout de piste, c’est à Lhasa qu’elle emprunte Is Anything Wrong, pour une reprise opalescente qui rappelle à quel point elle est une grande interprète. C’est d’ailleurs ce talent vocal qui emporte sur le sublime Give a Little Love, cosigné par Sufjan Stevens.
On se souviendra qu’on avait d’abord rencontré cette voix chez JP Nataf, à qui elle offrait un chœur en mille-feuilles sur Après toi (Clair, 2009), et à qui elle dérobe en retour son art des belles assonances sur Belle Pénitence. La production de Thomas “Doveman” Bartlett laisse se déployer toutes les dimensions de cette voix, qui se cache – mais plus tant que ça – somewhere parmi ses histoires.
Sister 37d03d/Modulor
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