Avant un album dansant, excentrique et joyeux et une tournée française, Metronomy nous a longuement reçus. L’occasion de percer le mystère de ce groupe à la fois populaire et expérimental. Une utopie.
On retrouve Metronomy exactement où on l’avait découvert il y a plus de sept ans : à Brighton. On ne parle pas seulement de géographie : après une quête infinie de sons et de sensations, qui culminait en 2011 avec le luxuriant et tubesque The English Riviera, Metronomy est, musicalement, également revenu à son point de départ.
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Soit, sur l’euphorisant nouvel album Love Letters (sortie le 10 mars), une pop à la fois expérimentale et dansante, ancrée dans son millénaire et pourtant informée par les années 60, de la pop à la soul. Voire les années 70 ici, quand le groupe ose quelques références aux comédies musicales à cheveux longs, Hair en tête.
Un album en forme de bilan
Certes, les musiques de Metronomy ont sacrément évolué depuis Pip Paine (Pay the £5000 You Owe) en 2006. Mais pas l’esprit : elles conservent ce mélange de joie et de spleen, d’excentricité, de liberté qui en font une utopie rare en Angleterre. Love Letters semble ainsi un album bilan pour Joseph Mount, jeune papa et cerveau agité du groupe. A Brighton, on retrouve Metronomy dans un lieu fondateur, cher à Joseph. Alors étudiant en arts, c’est dans cet ancien dépôt d’autobus reconverti en studios qu’il venait répéter, avec une version primitive de Metronomy. Il y rêvait d’une gloire qu’il ne pouvait pas encore, même dans ses rêves les plus dingues, quantifier en une tournée passant par trois Zénith (en avril), ou en quelques disques d’or aux murs.
Dans ce studio sans luxe, Metronomy en est aux ébauches de ses concerts. Loin de la sophistication et de la plénitude de l’album, le groupe tâtonne, s’échange les instruments comme les conseils. Ils sortent d’hibernation et ça se sent : le magnifique The Upsetter est ainsi joué comme on se réveille un dimanche matin, certain qu’on ne marchera plus jamais, que le vocabulaire et les manières se sont dissous dans la nuit. Mais, très vite, les élégances, les automatismes – backing vocaux radieux, mélodies entortillées autour de la voix hébétée de Joseph – reprennent le dessus.
Une capacité de renouvellement intacte
Les instruments tournent, de la basse aux claviers, obéissant aux ordres des chansons, mais un esprit perdure : celui d’une pop moderne, rénovée. Seul Joseph, immuable, ne partage pas son petit clavier, son micro, sa baguette de chef d’orchestre. Plié en deux sur un synthé tellement bas qu’on le jurerait monté sur moignons, il chante en tout inconfort Reservoir, et c’est aussi beau et doux à entendre que douloureux à observer. Sur Love Letters, il s’offre un tambourin, qui rajoute une touche encore plus hippie à cette chanson en toge, comme échappée de Hair, avec ses chorales exaltées et sa basse à faire dégringoler le soleil de Californie.
Même en version primitive, elle n’échappe pas à son énormité, à sa force d’attraction : on va danser cet été en criant “Love letterrrrrrs” et en portant de longues bouclettes de footballeur argentin, en rêvant d’Haight-Ashbury et de free sex. Ces nouvelles chansons révèlent ce qu’est devenu Metronomy : un groupe populaire expérimental qui fait tellement de bien à la pop, qu’il modernise sans efforts apparents, sans frime, sans théorie, qu’il devrait être conseillé à tous ceux qui peinent à se renouveler, de Morrissey à Liam Gallagher.
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