Sur son nouvel album, M Bemba, le premier enregistré au Mali, dans son propre studio à Bamako, Salif revient partiellement au répertoire classique mandingue. Il y est accompagné par des griots authentiques, tous des as : Toumani Diabaté à la kora, Mama Sissoko au n’goni, et Lanssana Diabaté au balafon. Sur Moriba résonnent les cordes […]
Sur son nouvel album, M Bemba, le premier enregistré au Mali, dans son propre studio à Bamako, Salif revient partiellement au répertoire classique mandingue. Il y est accompagné par des griots authentiques, tous des as : Toumani Diabaté à la kora, Mama Sissoko au n’goni, et Lanssana Diabaté au balafon. Sur Moriba résonnent les cordes métalliques du simbi, le luth des chasseurs. La vibration surnaturelle tourne sur elle-même, hypnotise une proie imaginaire, tandis que s’évade en mélismes flamenco cette voix dont le souffle vient du buffle, de la majesté de l’aigle. L’hommage va à Moriba Sangaré, psychanalyste traditionnel’ qui soigne ses patients avec des plantes et que Salif consulte depuis deux ans. Plus troublant, sur M Bemba, qui frôle les neuf minutes, il invoque Soundjata, son ancêtre, comme un fils renégat qui chercherait à trancher le n’ud de la discorde avec le couteau du crime. Je lui demande pardon pour ce que j’ai fait, pour avoir enfreint la loi. Je réclame aussi sa protection pour moi et les griots qui m accompagnent ? Car au Mali, rien ne se fait sans protection.
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Sur M Bemba, on entend un chœur constitué de ses trois sœurs de lait. On retrouve aussi son directeur musical du temps des Ambassadeurs, le guitariste Kanté Manfila. Depuis 2002, Manfila accompagne ce net retour aux sonorités acoustiques déjà perçu sur le très beau Moffou, avec ces tissages sonores amples et chatoyants, conçus en collaboration avec le réalisateur Jean Lamoot, et comme sublimés sur M Bemba. Et personne ne connaît Salif mieux que Manfila : Il est violent, verbalement violent, et très impulsif. Mais il a bon cœur.?
Ce cœur, il l’ouvre comme une fenêtre sur Bobo, la première chanson où il clame cette chose à l’évidence nouvelle pour lui, et peut-être impensable hier, le bonheur. Dans quelques semaines, Mafi, sa nouvelle compagne, va donner naissance à une petite fille. En bon Africain, lui aurait préféré un garçon. Difficile pourtant de trouver meilleur symbole que la naissance d’un enfant au moment où paraît M Bemba, l’ancêtre. Sur ce disque, ce fils prodigue et maudit, ce prince des paradoxes, ce gueux aimé des rois, cherche à se réconcilier avec le monde traditionnel et à inventer l’Afrique du futur. Comment s’étonner qu’il puisse se dire fatigué, alors qu’on l’attend déjà au Nigeria
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