Parée de ses meilleurs atours mélodiques et sonores, la pop resplendit une fois de plus entre les mains de Peter Von Poehl.
Dans la logique rationaliste des marchands de disques, la pop-music avait à l’origine une fonction toute tracée – être un produit de série jetable, déclinable à l’infini et consommable par le plus grand nombre. C’était sans compter sur tout un courant de créateurs sourds à ce genre de discours qui, de The Left Banke aux Zombies, de Harry Nilsson aux Nits, en firent une forme artisanale et non standardisée.
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Ce n’est pas rendre trop d’honneur à Peter von Poehl que de l’affilier à cette engeance de doux insoumis. Avec son premier album Going to Where the Tea Trees Are, le Suédois de Paris s’était rangé d’emblée parmi les meilleurs pinceaux d’une pop concise dans la forme et recherchée dans le fond, mêlant clarté des lignes mélodiques et foisonnement des matières sonores (guitares, claviers, cuivres, cordes, bois). Il récidive avec May Day, en élargissant la gamme chromatique d’un songwriting qui tire autant du côté de la composition fauve (Parliament, Moonshot Falls) que de l’esquisse tremblée (Dust of Heaven, Mexico) ou de la peinture au pastel (Wombara, Silent as Gold).
Le raffermissement de son chant, particulièrement notable sur les chansons les plus rythmées, désarçonnera peut-être ceux qui le voyaient comme un chantre de la mélancolie et des émotions intermédiaires. Sans renoncer à sa fibre impressionniste, Peter von Poehl montre en réalité qu’il a bien plus d’une nuance dans sa palette, notamment sur le plan poétique.
Epaulé par Marie Modiano, qui signe une petite moitié des textes, il se glisse dans un registre d’expression qui, le plus souvent, relie l’exploration de l’intime et l’observation du monde – comme dans la chanson May Day, renversante ballade où l’obsédant ressac des souvenirs se superpose à la rumeur troublée du temps présent. Capable d’éléver ainsi des vignettes de trois-quatre minutes au rang d’expériences sensibles marquantes, le Suédois donne à la pop sa meilleure définition : celle d’un art de l’éphémère fait pour durer.
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