Ils débarquent. Avec des idées et des désirs. Tout l’été, le portrait des moins de 30 ans qui feront demain. Aujourd’hui : Maxime et son frère Clément ont commencé à créer des morceaux pour Sniper ou Sefyu. Repérés par Diplo, ils produisent désormais la fine fleur du r’n’b US.
“C’est vraiment pas sexy la façon dont on fait de la musique en 2014.” Maxime Picard s’excuserait presque. “Tout se fait par mail, tu ne rencontres jamais vraiment les artistes.” À 25 ans, ce Francilien s’apprête pourtant à rejoindre Diplo à Los Angeles avec son frère Clément.
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Deux ans déjà que les Picard Brothers écrivent et produisent des morceaux pour l’écurie Mad Decent, où se croisent Major Lazer, Rusko ou Lady Bee, claqueurs de beats émérites. Une success story à l’américaine qui commence par un tweet. “Diplo a twitté une adresse mail demandant aux DJ de lui envoyer des sons pour qu’il puisse les jouer en club, se souvient ce grand blond maigrichon. Je lui ai envoyé des instrus. Une heure plus tard, il m’a demandé de lui envoyer d’autres trucs.”
De Paris Nord à Los Angeles
S’ensuit un échange de mails intenses où les gars rivalisent de rythmes syncopés. Quand Diplo balance un beat cru, les frangins propose un r’n’b expérimental. À mi-chemin entre booty shake sauvage et chœurs sucrés. “On a eu de la chance parce qu’à cette période il travaillait avec Ludacris qu’il a fait poser sur un de nos morceaux. Le titre n’est jamais sorti, mais ça a accéléré notre rencontre. Un mois plus tard, Diplo débarque à Paris et emmène la fratrie au resto. “On est arrivés ultra stressés, habillés comme des clodos”, rigole encore Maxime.
Enthousiaste, le DJ leur propose de venir chez lui à L.A. Fin 2012, les Picard Brothers signent avec Diplo et s’envolent pour la première fois en Californie. Là, c’est une autre histoire. Natifs de Coulommiers en Seine-et-Marne, Maxime et Clément ont déjà travaillé pour des artistes français. “Mais c’est impossible de vivre de sa musique en France, tu touches rien du tout.”
Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Alors que Maxime prépare une fac d’ingé son, et que l’aîné, Clément, commence la kinésithérapie, tous deux rencontrent Gérard Baste, un tiers des Svinkels. Echange de mails, échange de sons. Baste leur présente les mecs d’HK Corp, ex-Enhancer, qui montent leur boîte de prod. Les Picard produisent des morceaux pour Sniper, Sefyu et même Luce, la gagnante de La Nouvelle Star. Mais les cachets bien maigres laissent la production au stade de hobby.
“Aux Etats-Unis, ça n’a rien à voir, continue Maxime. En un mois on a travaillé avec une soixantaine d’auteurs. Tu te lèves à midi, tu as deux ou trois sessions d’écritures par jour avec des auteurs qui parfois sont juste de passage à Los Angeles parce qu’ils ont loupé un avion et que tu ne peux pas refuser. Dans ces cas-là, avec Clément on se sépare. Certains jours on enchaîne chacun trois sessions où on écrit sept morceaux… T’es mort. C’est génial”, sourit le jeune producteur, les yeux qui brillent.
L’usine américaine
Bienvenue dans le poulailler du songwriting. “L’année dernière on a fait un morceau pour la chanteuse Sevyn Streeter, signée chez Atlantic records. Là c’est vraiment le côté obscur de Los Angeles. L’usine. Il faut écrire un hit par session, et sur les 1 000 morceaux que tu fais ils n’en gardent qu’un.” Heureusement pour eux, It Won’t Stop se fait une belle place dans les charts et devient disque d’or.
“À L.A. tout est concentré, on est 2 000 au même moment à faire la même chose pour essayer de placer des morceaux sur les six mêmes albums, explique Maxime. Beaucoup de songwriters viennent ici comme beaucoup d’acteurs vont à Hollywood en espérant percer. Nous on a de la chance, on est liés à Diplo.” Naissent alors les Picard Brothers. “Quand on a signé, on voulait s’appeler Zero Janvier parce qu’on est fans de Starmania. Mais les anglophones étaient incapables de le prononcer. On a signé sous nos vrais noms, et pour raccourcir ils nous ont appelé les Picard Brothers. On n’assume pas vraiment mais on finit par s’y faire”, se marre le producteur.
Michel Berger, le seul vrai producteur
Même s’il est fasciné par Pharell Williams, Kelis ou Timbaland, Maxime ne connaît qu’un producteur : Michel Berger. “On a un piano dans la maison familiale avec les partitions de Starmania qu’on joue tout le temps. C’est la force d’un mec comme Michel Berger. Diego par exemple, personne ne sait qui l’a chanté, mais tout le monde l’a fait. La chanson est devenue plus forte que l’interprète”.
Un objectif ? “Oui. Un modèle. Diplo voit la musique comme de la percussion. C’est un beat maker. Nous on travaille d’abord les accords. On vient de faire la chanson Powerful pour le prochain Major Lazer, avec Ellie Goulding. Diplo était sur l’ordinateur à mettre plein de beats, nous on réflechissait à la mélodie. C’est la configuration parfaite”.
À leur actif, le nouveau Jessie J, Sweet Talker, mais aussi des morceaux pour Robin Thicke, Usher, Liz… qui sortiront si les maisons de disque le veulent. En attendant, les garçons préparent leur départ prévu en août. “On est bien conscients que les producteurs ne restent qu’un cycle donc on n’a pas envie de louper notre chance. Si on doit y aller c’est maintenant.”
Bonne chance aux Picard Brothers.
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