Un titre d’album rebutant renferme de belles et riches chansons accueillantes, désormais en français.
À distance et sans se concerter, deux chanteuses aux ombres paternelles encombrantes ont choisi de faire fi de leurs complexes et d’embrasser enfin le français première langue. Comme Charlotte Gainsbourg, Marie Modiano lacère ainsi le paravent de l’anglais, derrière lequel elle s’était réfugiée jusqu’ici, quitte à souffrir des comparaisons “modianesques” dont il serait hors sujet d’établir l’inventaire.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Marie ayant déjà franchi un gouffre en devenant poétesse et écrivaine (son second roman, Lointain, est sorti il y a un an), on imagine donc que la conversion ici fut autrement moins acrobatique, la chanson était déjà pour elle une vieille histoire remontant à 2006 et au joli I’m Not a Rose qui la vit éclore derrière un micro.
Un album accueillant et multiple
Depuis, elle a déployé avec son compagnon Peter von Poehl nombre de filets qui relient songwriting, poésie et musiques de films ou de spectacles vivants. Malgré son titre peu amène, ce cinquième album est un accueillant résumé de leur volubilité artistique et géographique, enregistré entre la France et la Suède, avec des musiciens voltigeant entre jazz et rock avec une souplesse qui sied merveilleusement à la voix ondulée de Marie. Aussi à l’aise dans le grave (Guérir ma colère) qu’en équilibre sur les fils légers qu’elle aborde en funambule, celle qui s’est aventurée en 2015, le temps d’un spectacle, Sur les chemins de Patti Smith, évite soigneusement toute “attitude rock” pour se laisser bercer par une collection d’instruments acoustiques et flottants.
Comme une jungle de bois et de cuivres qu’elle traverse et qui la traverse, dans de beaux mouvements de transparence, c’est dans cet univers à tâtons entre exotica, rumba en roulis de velours et jazz-folk made in Sweden que Marie Modiano s’épanouit vraiment en chanteuse. Et comme pour mieux affirmer cette place glorieusement occupée, elle invite même son prix Nobel de père à reprendre la plume d’auteur de chanson, le temps d’un dernier titre intitulé Le Chien noir du chagrin. Beau à pleurer, forcément.
Concerts : Le 15 février (Maison de la Poésie) et le 16 mai (Café de la Danse) à Paris
{"type":"Banniere-Basse"}