Avec sa voix et ses orchestrations de satin, ce Napolitain façonne un véritable baume pour l’âme.
Voilà un album qui pourrait illustrer un cours d’esthétique sur la différence entre beauté et joliesse. En musique, la beauté est d’abord une force perturbatrice. Elle redéfinit l’ordre sensible de celui qui la reçoit, bouscule ses repères, lui ouvre de nouveaux horizons émotionnels – exemple : l’oeuvre protéiforme de Caetano Veloso. La joliesse, elle, a de plus modestes ambitions. Elle se contente de réconforter l’auditeur et de le caresser dans le sens du tympan – exemple : les albums tardifs d’Henri Salvador.
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Parce qu’il reprend l’une des chansons du Guyanais (La Muraille de Chine), Joe Barbieri se range a priori parmi les partisans de la jolie musique. La voix de satin de ce protégé de Pino Daniele, cousue sur des orchestrations ellesmêmes taillées dans le feutre, est l’un de ces baumes apaisants dont on aime à enduire nos oreilles meurtries par le vacarme universel. Dans la tradition de la meilleure chanson italienne, son inspiration nomade dresse des ponts aériens entre jazz, bossa et sonorités méditerranéennes, sur lesquels glissent des mélodies au calme olympien.
Tant de douceur pourrait accoucher d’une musique au pH neutre, totalement inoffensive. Il n’en est rien, notamment parce que Barbieri sait instiller dans son chant cette infime dose de fêlure qui distingue les crooners des simples pousseurs de ritournelles – voir son duo avec Omara Portuondo, filé sur un magnifique air de fado (Malegría), ou le déchirant Tacere/Parlare. Maison Maravilha est la preuve même qu’un joli disque peut être un disque d’une grande noblesse.
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