Mercredi 9 mars, quatorze jours après l’offensive militaire russe. Tandis que la ville de Kiev est en quasi-état de siège et que l’armée de Vladimir Poutine gagne chaque jour du terrain, une poignée de musiciens de la Philharmonie nationale d’Ukraine se sont retrouvés sur la place Maïdan pour jouer.
Sous la direction du chef d’orchestre Herman Makarenko – nommé artiste de l’UNESCO pour la paix en 2016 –, ils ont notamment fait entendre L’Hymne à la joie de Beethoven (qui est aussi l’hymne officiel de l’Union européenne) et l’hymne national ukrainien. Devant les caméras, Makrenko a déclaré : “Ce concert est une action pour la paix, la chose la plus importante de l’humanité moderne.” Action, paix, humanité, modernité.
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La place Maïdan est hautement symbolique. C’est un point de ralliement, un forum, le lieu de toutes les insurrections. La révolution ukrainienne de 2014, celle qui a vu le peuple chasser le président pro-russe Viktor Ianoukovytch du pouvoir, est aussi appelée révolution de Maïdan. Dans un court métrage intitulé Maidan Is Everywhere (2015), la jeune réalisatrice Kateryna Gornostai suit une bande d’étudiant·es au cœur des mobilisations, caméra à l’épaule, filmant les flammes embrasant la place aussi bien que l’intimité de ces jeunes gens modernes comme dans un Rohmer. Ici, le fond de l’air n’est pas rouge. Il est jaune comme les blés et bleu comme un ciel de Californie.
La génération post-Maïdan est celle qui résiste encore aujourd’hui à l’obscurantisme totalitaire de Poutine, un président guerrier qui exècre les valeurs de liberté et d’égalité prônées par les mobilisations de 2014. Un club de Kiev, le ∄ – symbole mathématique signifiant “n’existe pas” – a bel et bien existé ces dernières années, comme un lieu de danse mais aussi comme un refuge. Aujourd’hui, alors que l’on ne danse plus à Kiev, les membres de l’équipe s’activent encore, dans un esprit de communauté. Preuve que la fête n’est jamais vaine et encore moins anodine : “Certains d’entre nous ont rejoint les forces de défense territoriales, certains font du bénévolat dans différentes villes d’Ukraine, d’autres aident de loin”, nous écrivent-ils. Réseau d’entraide souterrain quasi clandestin, collecte de fonds : la jeunesse ukrainienne, contre tous les périls, est entrée en résistance.
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