Avec un univers complexe et tourmenté, LudÉal fait une entrée fracassante dans la chanson française.
Il y a un an, Ludéal est apparu Sous la lune, titre de sa chanson figurant dans l’édition 2007 du concours CQFD. Si le morceau n’avait pas encore l’ampleur véritablement astrale qui est la sienne aujourd’hui – après son passage entre les mains expertes de Jean-Louis Piérot et Frédéric Lo (à la réalisation) et Renaud Létang (au mixage) –, on pouvait deviner malgré le taux élevé de son emprunt à Bashung combien ce garçon pouvait peser à l’avenir. On ne s’attendait pas en revanche à le voir si vite se hisser, sans aucune forme de complexe, à la hauteur de son modèle, côté Vertige de l’amour espiègle et absurde (Costume de nonne) ou versant La nuit je mens épique et dramaturge (Foule frénétique).
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Il y a longtemps, entre un boulot de peintre en bâtiment et quelques voyages initiatiques aux Etats-Unis, Ludéal avait acquis une guitare et s’était dégourdi la main et l’esprit en s’attaquant au songbook d’Elvis Costello. Il en a retenu un goût pour les compositions en mille-feuilles et les textes qui planent assez haut tout en conservant une forme d’humanité et d’ironie fine. De fait, on imagine beaucoup de scènes hilarantes et vaguement déroutantes lorsque défilent Roméo pour Juliette, Les Lycéennes ou Mars, qu’en crooner ténébreux (avec des accents à la Joe Dassin, parfois à la Bryan Ferry) il manipule de sa voix ourlée comme un marionnettiste du chant, avec une précision incroyable qu’il parvient à fondre dans l’ondoiement naturel du geste. Ludéal s’impose d’emblée comme l’un des plus sûrs virtuoses français du songwriting actuel, sans réel équivalent, même si son album apparaît par moments comme une version masculine de celui de Daphné paru un peu plus tôt cette année. Tube annoncé, La Fin du pétrole est encore l’une de ces chansons en français qui lorgnent avec jalousie sur les grands espaces, convoquent les teintes rougies et les larges focales du western, alors que Si t’es pin-up en fait autant avec l’asphalte fifties et ses chromes narcissiques. Sur Tout rustiné ou Ovaire, c’est à la langue libre et au chant équilibriste d’un Dick Annegarn que Ludéal fait involontairement songer, faisant tomber le masque du matamore des Lycéennes pour une espèce d’entrée en lévitation langoureuse et irréelle, qui clôture le disque sur une note fantomatique assez sidérante.
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