Parfaitement produit par Jeff Tweedy de Wilco, Low révèle des atours inédits, même après vingt ans de délices tristes. Critique et écoute.
Vingt ans de carrière, dix albums studio. De l’eau a coulé sous les ponts, un peu. Du sang et des larmes, beaucoup plus : Low, depuis I Could Live in Hope (1994), a beaucoup servi de refuge, les nuits blanches et sans lune ou les jours interminables et sans soleil, à ceux qui cherchaient un compagnon à leur spleen, à ceux qui ont trouvé dans leur slowcore, cette musique aussi formellement lente que moralement violente, la meilleure bande-son de leurs malheurs.
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Longtemps, la musique de Low a été rachitique, famélique, éparse ; quelques racines, amères, âpres, suffisaient à nourrir ce folk des abymes, quelques notes suffisaient à soutenir les sublimes entrelacs vocaux d’Alan Sparhawk et Mimi Parker, la rage admirable de force rentrée que développaient les mormons de Duluth.
Avec le sommet Trust (2002), les choses ont pourtant commencé à changer. Le slowcore de Low mutait quelque peu : toujours violent mais moins lent, toujours gracile mais un peu plus musclé. Sur The Great Destroyer (2005) ou C’Mon (2011), et en mettant de côté l’étrange mais fascinant Drums and Guns (2007), les Américains mettaient encore un peu de reliefs dans leurs grandes plaines, leurs hauts et leurs bas découvrant des contrastes qu’on ne leur espérait plus.
The Invisible Way, nouvel album du groupe, n’ira sans doute pas tailler des croupières à Justin Timberlake en haut des charts mondiaux. Mais il bénéficie de deux sésames qui pourraient lui ouvrir de larges portes : la production de Jeff Tweedy, patron de Wilco, groupe révéré aux Etats-Unis, et un single, Just Make It Stop, assez beau, fort et collant pour mettre l’univers à genoux, béat d’admiration.
Pour le reste, Tweedy ou pas, peu de changement sinon sa mise en son accueillante, en équilibre entre économie de moyens et rondeurs, synthèse parfaite des méandres empruntés par Low dans leur histoire : de l’ouverture Plastic Cup à la clôture To Our Knees, avec les magnifiques Amethyst, Clarence White, Mother ou So Blue, en hauts et en bas, le groupe, ses voix, son écriture n’ont rien perdu de leur magie. Noire, évidemment.
concert le 7 mai à Paris (Maroquinerie)
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