En 2003, le mythique Arthur Lee nous revient toujours sous le nom de Love, accompagné d’une section de cuivres et de cordes, pour une tournée anglaise qui faisait escale à la Manchester Academy le 25 janvier. Récit.
L’année 2002 avait été marquée par le retour au sommet, grâce à des concerts de qualité, de deux génies que l’on croyait perdus, l’un par la folie pure (Brian Wilson), l’autre par la prison (Arthur Lee). Si l’ex-leader des Beach Boys avait impressionné par sa restitution parfaite de Pet Sounds, celui de Love avait surpris en proposant des sets directs et efficaces autour d’un combo restreint. Cette année, Arthur Lee nous revient accompagné d’une section de cuivres et de cordes, pour une tournée anglaise.
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Après une première partie sans grand intérêt et de longues minutes d’attente, Arthur Lee entre sur la scène de la Manchester Academy, une minute après le reste du groupe, fier comme un Gallagher (tambourin et lunettes noires comprises), auquel on aurait ajouté une chemise à franges et un chapeau baba. Il reçoit une ovation. Le public mancunien s’affirme connaisseur, il salue l’artiste, dont on prétend, excusez du peu, qu’il a révélé Jim Morrison et influencé Jimi Hendrix, le précurseur du rock multiracial, le leader du groupe Love, dont le chef d’ uvre, Forever Changes, est un des joyaux de la glorieuse année 1967 et de l’histoire de la pop en général.
Mais on parle ici de temps anciens et on se demande bien quel peut être le rapport entre le groupe mythique des sixties psychédéliques et les jeunes musiciens entourant Arthur Lee, qui continue pourtant de tourner sous le nom de Love. Les deux premiers morceaux du concert, rapidement exécutés confirment cette impression de doute. Puis la section de cuivres et cordes que l’on nous avait promise entre en scène, les choses sérieuses peuvent commencer.
Pendant une petite heure, le groupe va interpréter, dans le désordre, la quasi totalité des titres de Forever Changes, en débutant étrangement par un single postérieur à cet album, Your Mind And We Belong Together. La guitare martelée et la construction complexe du morceau sont parfaitement rendues, les musiciens démontrant qu’ils méritent pleinement de jouer dans un groupe qui porte l’étiquette sacrée de Love.
Ensuite, pour la première fois du concert, Arthur Lee empoigne une guitare et joue l’introduction d’un morceau d’exception : Alone Again Or, un de ses morceaux dont on pensait qu’on n’aurait jamais le bonheur de l’entendre en live. « I could be in love with almost everyone »? La voix du leader de Love révèle toute sa splendeur intacte et l’assistance, fascinée, tombe sous le charme. Le groupe réussit le tour de force de rendre en live l’atmosphère lumineuse de Forever Changes, un album pourtant composé de morceaux d’une rare exigence, qui vont permettre de mettre en avant les performances vocales de Lee (Andmoregain, The Red Telephone), des solos de guitares diaboliques (A House Is Not A Motel, Live and Let Live) et les arrangements délicats permis par le mini-orchestre (Maybe The People Will Be The Tmes Or Between Clark And Hilldale). Love va terminer la première partie du concert avec l’excellent morceau qui clôture cet album : You Set The Scene.
La suite, une petite dizaine de morceaux, joués de manière plus brutale, sera (forcément) moins intéressante. Mais cette seconde partie permettra au moins de se pencher sur la discographie complexe de Love et de son leader. On va en effet croiser un des premiers 45 tours du groupe (Seven and Seven Is), servi sauce rock garage, des titres comme Singing Cowboy ou Always Your Face issus de l’album de 1969, Four Sail, récemment réédité.
Lee se permet aussi un titre issu de son répertoire solo, l’euphorisant Everybody s Gotta Live, dans lequel il inclut judicieusement le refrain d’Instant Karma. Avant de nous quitter, le leader de Love offre une nouvelle composition, intitulé My Anthem, hymne braillard et décalé, plutôt efficace. Il en profite pour vanter les mérites du nouvel album de Love, qu’il annonce imminent, en ajoutant qu’on n’a pas fini d’entendre parler de lui. Après un tel concert, on veut bien le croire.
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