Voix d’Everything But The Girl puis de Massive Attack,TRACEY THORN se lance en solo et dévoile ses doutes sur sa vie de femme.Troublant.
Quand elle chantait au sein d’Everything But The Girl, duo pop formé en Angleterre dans les années 1980 avec Ben Watt, Tracey Thorn était encore une gamine au menton large, à la coiffure biseautée au taille-haie, à la voix de cupidonne mélancolique qui transperçait le coeur des amoureux avec des flèches imparables comme Missing ou The Heart Remains a Child. Aujourd’hui, si l’activité d’EBTG est en retrait, Tracey n’en poursuit pas moins une carrière solo parallèlement à une vie domestique bien remplie.
En 2008, elle a fini par épouser Ben Watt, avec qui elle vit depuis presque trente ans. Cette longue période de réflexion, pour un couple ayant eu trois enfants, ne l’a pas empêchée de nourrir encore des doutes sur les liens du mariage à la veille de ses noces. Sur Long White Dress, l’un des titres de ce troisième album produit par Strange Feeling (le label de son mari), elle s’en confesse avec ce mélange de fragilité et de franchise qui fait tout son charme. C’est que nombre de couples se sont séparés autour d’elle, bérézina sentimentale qui a inspiré Oh ! The Divorces, magnifique ballade d’ouverture habillée par les cordes d’un orchestre de chambre. A l’approche du cap délicat de la cinquantaine, Tracey doit en outre vivre avec un corps en plein remueménage, évoqué avec sincérité dans Hormones.
De cette trame terriblement banale d’une femme surprise à l’heure où les choix du passé se révèlent irréversibles, et que la ménopause frappe à la porte, Tracey a constitué un répertoire de chansons attachantes aux multiples nuances. Entre pop feutrée, soul pastel et folk de salon, cet environnement intimiste se met entièrement au service d’une des voix les plus inoubliables de la pop anglaise, mélange de douleur contenue, de douceur compatissante et d’émoi sensuel, qui se promène sur chacune des chansons avec la grâce d’un cygne sur un lac à la tombée du jour. Preuve que si ses vues sur l’amour ont évolué avec le temps, que son coeur est moins enfant, sa manière de les exprimer n’a pas pris une ride.