Pendant un mois, “Les Inrockuptibles” traversent, en 20 épisodes, six décennies de l’histoire du rock britannique. Episode 19 : quand des filles indomptables et insoumises pénètrent une scène mâle dominante.
Le punk a rendu réalisable ce qui ne l’était pas avant lui. Voilà une banalité toujours bonne à dire. Monter sur scène et chanter sans voix ou jouer d’un instrument appris la veille sont devenus possibles grâce au punk. Monter sur scène, s’ouvrir les veines et répandre son sang sur les premiers rangs le sont également devenus (voir Daniel Darc, époque Taxi Girl, même si c’est Iggy, période Stooges, qui versa le premier sang). Enfin, plus fort, monter sur scène, retrousser ses jupes, tirer la petite ficelle et extirper le tampon hygiénique de là où il trempait, puis s’en servir à la manière d’un encensoir pour bénir le public de sécrétions menstruelles (Catherine Ringer) est une autre avancée significative que l’on doit au punk.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Cet acte qui brille par son caractère isolé, et irrécupérable, est ce que l’on appellera du punk “de chez punk”. Sa liberté est hors norme. Sa symbolique absolue. Elle nous pousse aux extrêmes de ce courant qui niait farouchement être artistique tout en l’étant et récusait toute intention politique, mais le criait trop fort pour n’en avoir aucune. Il nous soumet de force à un rite de purification particulier puisque inversé. Car c’est bien, si l’on peut dire, le propre sinon l’essence même du punk que de renverser ainsi les signes. De changer le laid en beau, la haine en amour et le sale en immaculé.
>> Retrouvez X-Ray Spex sur le volume 1 de la compilation “Rock UK”, coédité par “Les Inrocks” et Wagram en CD ou en vinyle
En cela, le véritable enjeu du punk ne fut-il pas de permettre à toutes ces filles de surgir sur une scène rock entièrement accaparée par des musiciens mâles ? De les rendre intéressantes différemment, violemment, outrageusement ? De bouleverser un ordre établi, mais surtout d’y parvenir en rejetant tous les signes de reconnaissance qui définissaient jusque-là leur position dans ce monde-là, comme au sein de la norme sociale. Du vêtement sexy au langage décent, des bonnes manières aux bons sentiments, du charme à la douceur, les filles du punk ont tout expulsé, tout ébranlé.
Et sans vraiment le vouloir, sans faire usage de la moindre rhétorique féministe, elles ont ébauché une sorte de république des amazones, éphémère et poreuse dont il serait pertinent aujourd’hui de revisiter les grandes heures et de restaurer les principales figures.
De Moe Tucker à Patti Smith : le temps des pionnières
Au début, les rapports entre le rock et les filles s’établissaient selon un mode unique, dont l’essentiel transparaît dans le texte d’une chanson connue qui fait “poupée de cire, poupée de son” quand on la touche. Le phénomène des girls groups du début des années 1960 fut en cela exemplaire, car soumis à la personnalité et au bon vouloir de talentueux
Pygmalion qui, à l’instar des stylistes de la haute couture, “habillaient” les artistes féminines de chansons sur mesure. La pop-music des débuts n’aurait pu se constituer en un vaste empire économique et culturel sans le potentiel de séduction de ses interprètes féminines – Shangri-Las, Martha & the Vandellas, Supremes, Ronettes, Dionne Warwick… – ni la contribution d’auteurs-compositeurs de génie tels que Jerry Leiber et Mike Stoller, Burt Bacharach, Phil Spector ou Berry Gordy.
Longtemps le rôle des filles demeura confiné à cet espace où seules l’apparence et les prouesses vocales étaient prises en compte, du moment qu’elles répondaient aux critères esthétiques, fantasmatiques ou sociaux d’un monde engoncé dans son immuable rigidité patriarcale. Les choses ont commencé à bouger avec les chanteuses soul – Aretha Franklin notamment –, les folkeuses – Joan Baez, Joni Mitchell, Buffy Sainte-Marie –, puis la génération hippie qui vit des filles se saisir du micro d’une autre manière, plus militante (Grace Slick du Jefferson Airplane), plus animale (Janis Joplin).
https://www.youtube.com/watch?v=FFigaavJlA0
Mais c’est, comme souvent, à partir du Velvet Underground que la rupture avec la convention fut consommée. Bouche de métro mythique autant que prolifique, d’où émergea en réalité tout le rock moderne, le Velvet présentait dans sa première version une chanteuse, Nico, au territoire vocal échappant à toute topographie établie.
Les premières lettres de noblesse de l’amateurisme
Qu’elle fût originaire d’Allemagne, pays des Walkyries, ces divinités guerrières à l’indomptable tempérament, ne pouvait qu’étancher la soif de féerie des plus imaginatifs. Sans Nico, Siouxsie aurait-elle seulement songé à devenir cette apparition nocturne,aussi blafarde et stridente qu’une sorcière shakespearienne ? Pas sûr.
L’autre nouveauté du Velvet tenait la batterie : Moe Tucker. Une batteuse couplant une technique rudimentaire à la régularité inflexible d’une machine, voilà qui brouillait l’imagerie traditionnelle propre à cet instrument, envahissant et bavard, dans lequel se concentrait une partie du pouvoir masculin exercé sur la planète rock. C’est peu dire que le minimalisme de Moe Tucker a décomplexé toutes celles qui hériteraient un jour des baguettes pour imposer leur tempo.
Sans le vouloir, Moe Tucker a donné ses premières lettres de noblesse à l’amateurisme qui fut l’un des atouts du punk. Sauf qu’une bonne dizaine d’années furent nécessaires avant que cette révolution ne porte ses fruits. Qu’il fallut attendre qu’une première vague de groupes (Fanny, Birtha) ne vienne se casser les quenottes sur un rock trop dur et trop pro.
Attendre que les Runaways de Joan Jett et Cherie Currie n’épuisent les derniers fantasmes moites d’un producteur Pygmalion (Kim Fowley) tout en forçant le passage pour s’en affranchir, à coups de vilaines guitares et de hurlements de hyènes qui annonçaient l’assaut des harpies du punk. Attendre enfin qu’une marraine américaine, Patti Smith, daigne se pencher sur le berceau de ces petites soeurs violentes et délurées qui s’apprêtaient à mettre un bordel monstre avant de disparaître.
Sex, Siouxsie and Bromley Contingent
En 1976, “London was the place” nous dit l’histoire. Les lieux à fréquenter étaient toujours les mêmes : le Nashville, le 100 Club, le Roxy, le Vortex et une boutique sur Kings Road d’abord appelée Let It Rock, puis Too Fast to Live Too Young to Die, puis Sex et enfin Seditionaries. Elle appartenait à la styliste Vivienne Westwood et à son compagnon d’alors, Malcolm McLaren, futur manager des Sex Pistols. L’un des vendeurs en était Glen Matlock, leur premier bassiste. C’est ici que venait s’habiller leur futur guitariste, Steve Jones, et que germa l’idée du groupe. De sorte que Sex devint un laboratoire où se dessina le destin du punk mais aussi les fringues qui en définirent le look (pantalons multizip, tee-shirts destroy, accessoires bondage…).
Ce lieu s’imposa naturellement comme point de rendez-vous pour l’un des noyaux durs du mouvement : le Bromley Contingent. Ce fan-club d’un nouveau genre s’était constitué lors du premier concert des Pistols dans un collège des faubourgs de Londres, Bromley. On y vit les premières épingles à nourrice apparaître, les minijupes en cuir avec bas résilles et stilettos, les piercings et les colliers de chien cloutés.
Au centre de cet essaim d’admirateurs hardcore se trouvait une certaine Susan Dallion qui, à partir de septembre 1976, se fit appeler Siouxsie Sioux pour devenir la chanteuse des Banshees. La formation initiale du groupe comprenait le guitariste Marco Pirroni, le bassiste Steven Severin, et derrière la batterie un certain Simon Richie qui, plus tard, se rendra célèbre sous le nom de Sid Vicious.
Comme pour l’immense majorité des groupes punk, chaque concert consistait en une manière plus ou moins désespérée de faire oublier le précédent. La sono était en règle générale plutôt désastreuse – et c’était du reste une chance tant les talents musicaux des uns et des autres se révélaient affreusement limités. Mais comme chacun l’a compris, c’était bien là tout l’intérêt. La présence de Siouxsie Sioux sur une scène ne pouvait laisser personne indifférent.
Elle porta d’abord les cheveux coupés très court, d’un blond peroxydé, puis elle adopta une coiffure plus conforme à cette image prégothique imposée depuis. Ses mèches d’un noir corbeau et son maquillage en chauve-souris coïncidaient avec sa voix très blanche, ni grave ni perchée mais assez sonore pour qu’on puisse l’entendre malgré l’indigence acoustique des lieux dans lesquels elle se produisait.
Stinky Toys at Pamela Popo
Parmi les filles de sa génération qui osèrent monter sur scène, Siouxsie fut certainement la seule à ne jamais se faire cracher dessus. Avec le pogo, se cracher dessus était le comportement obligé dans un concert punk. Les anonymes du public sautaient à pieds joints et se crachaient dessus, ou crachaient sur les musiciens. Qui parfois crachaient sur le public en retour. Si bien qu’au sortir d’un concert certains pouvaient donner l’impression d’avoir gratuitement bénéficié d’un shampoing aux oeufs, mais s’étaient hélas vus lésés du rinçage.
Siouxsie en imposait déjà assez pour s’épargner ce traitement, sympa dans le contexte mais fort dégradant. Si elle fut une indiscutable pionnière sur la scène punk londonienne, elle fut aussi l’une des rares à s’en sortir par la musique. Le premier single des Banshees, l’excellent Hong Kong Garden, ne verra le jour qu’en 1978, soit deux ans après les débuts du groupe. Le temps pour Siouxsie de parfaire son image de prêtresse à chair de glace brûlante et d’affirmer ce style new-wave teinté de pop qui aboutira en 1980 à l’inégalé Kaleidoscope, meilleur album du groupe qu’ouvre le classique Happy House.
Etonnamment, Siouxsie allait percer la brèche dans laquelle s’engouffrèrent les “riot girls” de 1977, mais pour aussitôt déserter le chantier. A croire qu’en dépit de ses intentions anti-hiérarchiques et antisexistes, le punk ne pouvait longtemps faire abstraction d’une réalité intransigeante, et universelle, divisant le monde selon les origines sociales. Et tandis que les filles envahissaient la scène dans un joyeux et contagieux bordel, que Debbie Harry puis Chrissie Hynde y restauraient un semblant de classicisme, il devenait problématique de recourir à la même appellation pour des choses de moins en moins compatibles entre elles.
En France, il y avait les Stinky Toys et leur distinguée chanteuse Elli Medeiros. Mais également les Lou’s et leur suffragette en chef, authentique héritière de Moe Tucker, l’incroyable Pamela Popo. Autant les premiers fleuraient déjà le dandysme néogainsbourgien – dont Jacno, avec ou sans Elli, se fit ultérieurement une spécialité –, autant les secondes nous entraînaient sur les sentiers sans gloire, mais non sans orgueil, d’une autre réalité du rock français qui devaient aboutir, sept ans plus tard, au son des squats, au rock alternatif et aux Bérurier Noir.
Le spectre électrique X-Ray Spex
L’idylle entre le punk et les filles ne serait de toute manière jamais allée jusqu’au bout sans les Slits et X-Ray Spex. X-Ray Spex fut lancé par deux copines d’école, Marion Elliot, une Anglo-Antillaise, et Susan Whitby, qui se firent appeler respectivement Poly Styrene et Lora Logic quand sonna l’heure de la dernière récré. Dès 1976, le groupe s’imposa comme l’une des attractions les plus courues de la scène punk londonienne, et son guitariste, Jak Airport, comptait parmi les meilleurs, avec Bob Andrews de Generation X, Mick Jones des Clash et Steve Jones des Pistols.
Lora faisait vomir son saxophone de notes suraiguës, incontrôlables et souvent fausses. Mais dans le contexte, l’effet était saisissant. Surtout avec Poly qui récupérait toute cette folie à son profit. Poly était la vraie reine des punks. Petite, un peu boulotte, vêtue d’une minirobe en vinyle fluo et coiffée d’un casque de Tommy (soldat anglais), elle personnifia sur scène le vrai défi de cette musique, en décréta l’urgence, la drôlerie et l’autodérision.
On a une petite idée de ce que cette rigolote petite sorcière bruitiste avait dans le ventre sur l’album Live at the Roxy réédité en 1991. Poly y mène à son terme la vraie mission du punk : avoir l’audace et le courage d’être soi-même. Ses paroles étaient les moins embarrassées du lot. Les plus directes. Elle y dit l’essentiel sur elle-même et sa génération, des choses profondes mais sans prétention sur le sentiment d’inutilité (I Can’t Do Anything), sur le vide (Art-I-Ficial), le refus de la servitude (Oh Bondage, Up Yours!). Sa voix était celle d’une furie, petite soeur de Johnny Rotten, stridente et rageuse,comme celle d’une enfant coléreuse à qui l’on vient d’administrer une fessée sans raison.
Enregistré en 1978, Germ Free Adolescents (sans Lora Logic, partie fonder Essential Logic) reste un des rares albums issu de cette vague de groupes – dont la distance de prédilection restait le single – qui tienne encore la route. La pochette en résume tout l’esprit : cinq ados enfermés dans des tubes de laboratoire, comme autant de bactéries contagieuses dont il faut prévenir la dissémination.
Sur la réédition de 1993, on y trouve Oh Bondage, Up Yours!, écarté lors de sa sortie et qui, avec God Save the Queen, In the City et White Riot, reste un grand classique. Après un album solo, doux et serein (Translucence, en 1981), Poly quitte un temps la scène pour rejoindre une communauté Krishna de Londres. Reformé plusieurs années plus tard, X-Ray Spex sort un deuxième album, Conscious Consumer (1995) et reprend la scène pour un Live @ the Roundhouse London, en 2008.
Penetration ou l’art du rentre-dedans
C’est en 2003 que Pauline Murray, elle, entame une tournée au Royaume-Uni. Son groupe, Penetration, vient lui aussi de se reformer après des années d’absence. La chanteuse, qui eut son heure de gloire avec Don’t Dictate, un single beaucoup joué à l’époque, possèdait une voix étonnante, plus maîtrisée et mélodieuse que ses consoeurs, avec quand même assez de “guts” pour rendre crédibles des paroles rentre-dedans.
A sa sortie, ce “Ne me donne pas d’ordre !” était juste un slogan anti-autoritaire, un parmi d’autres que faisaient pleuvoir ces musiciens délinquants sans méthodes ni solfège, tous ces anges à figures sales et cheveux hirsutes qui tordaient le cou à leurs guitares plus qu’ils n’en jouaient. Mais quelle hargne ! Rien ne résistait à l’envie d’exister, d’être papillon de nuit pressé de se brûler les ailes à la première lumière.
Raison pour laquelle le punk tournait tout à son avantage. Il pouvait afficher ses sentiments antiracistes et antifascistes et dans le même temps provoquer l’ire des organisations bien-pensantes en arborant la croix nazie sur ses tee-shirts ; conjurant le poids de l’histoire par une obscène insouciance et une joie de provoquer farouchement enfantine.
Le punk ressemblait en cela à un sas de décontamination où rien de ce qui avait forgé jusqu’alors les opinions ou le goût n’était désormais valide. Rien n’était digne de respect : ni la religion, ni la monarchie, ni le sexe, ni même la musique. Surtout pas la musique. Et si l’on prend la peine de mettre toutes ces franchises bout à bout, on se retrouve forcément en compagnie des Slits.
The Slits fissurent les conventions et creusent un sillon libérateur
Avant de former le groupe phare du punk féminin, le seul de l’époque à l’être intégralement, Viv Albertine et Palmolive appartenaient à l’entourage des Sex Pistols, caressant brièvement l’idée de fonder The Flowers of Romance avec pour chanteur… Sid Vicious. Mais en raison du caractère, en l’occurrence peu caressant et pas romantique pour un sou, de ce dernier, le projet n’aboutit jamais.
Viv et Palmolive rencontrèrent alors Tessa et Ari Up qui, à 15 ans, devint la chanteuse de ce groupe dont le nom, avant toute audition, suscitait déjà le scandale : les Fentes. D’ailleurs, les Slits généraient du chaos avant même de l’ouvrir ou de brancher leurs guitares. Coiffées comme des méduses, outrageusement maquillées, habillées en petites soeurs des Stooges, elles ne passaient pas inaperçues ni ne laissaient indifférent.
Au printemps 1977, lors d’une mémorable tournée anglaise avec les Clash, les Buzzcocks et Subway Sect, c’est aux Slits que l’on refusait l’accès dans les hôtels. C’est elles qui indignaient les passants et inspiraient aux flics leurs plus méchants contrôles.
Les Slits généraient du chaos avant même de l’ouvrir ou de brancher leurs guitares.
A la bonace, elles préféraient la tempête. Elles auraient sapé les fondements de la société occidentale que ça n’aurait pas été pire. Au juste, ne sapaient-elles pas les fondements de la société occidentale ? Elles ébranlèrent en tout cas les certitudes du petit monde rock avec, en 1979, Cut, un album qui là encore retient l’essence du punk par son incroyable spontanéité.
La photo de pochette signée Pennie Smith mérite mention : trois filles (Palmolive venait de partir) hirsutes, seins nus, le corps enduit de boue, semblant vivre en harmonie avec la nature dans ce qui se devine déjà comme une république amazone. Produite par Dennis Bovell, le plus jamaïcain des producteurs anglais (Matumbi, Linton Kwesi Johnson…), la musique est l’extension sonore de cette image choc, l’équivalent reggae du Magic Band de Captain Beefheart à son sommet autodidacte (Clearspot).
Les filles n’auront plus à tout casser pour tout reconstruire
Une musique sans attaches mais non sans territoire ; libre, non virtuose mais néanmoins construite et affirmée ; tribale mais aussi chaleureuse et épargnée par l’agressivité forcée qu’imposaient beaucoup de disques de cette époque. Cet univers musical qui s’invente en dehors des zones répertoriées, et donc à l’écart d’un punk-rock prématurément vieilli, se prolongera avec Return of the Giant Slits, où les filles vont explorer avant l’heure les voies menant aux musiques du monde.
Ari fera ensuite une brève apparition avec les New Age Steppers du producteur de dub Adrian Sherwood et enregistrera un album solo, Dread More Dan Dead, en 2005. Reformées l’année suivante autour de Tessa et d’Ari, les Slits sortent en 2009 Trapped Animal, trente ans après leur premier album.
Grâce aux Slits, à Poly, à Siouxsie et aux autres, les filles n’auront plus à tout casser pour tout reconstruire. Et cette dette, de Rita Mitsouko à Madonna, de Björk à PJ Harvey, de Missy Elliott à Camille, de Gossip au Tigre, personne ne saurait manquer de s’en acquitter auprès des émeutières de Londres.
LE MORCEAU X-RAY SPEX “THE DAY THE WORLD TURNED DAY-GLO”
Poly Styrene et Lora Logic, copines d’école, forment X-Ray Spex en 1976 et ne signeront qu’un album d’époque, Germfree Adolescents, en 1978. Il faudra en effet attendre 1995 et une reformation éphémère pour que Conscious Consumer fasse suite à Germfree Adolescents sans bien entendu pouvoir égaler ce premier envoi qui contient en germe une rage et une jeunesse qui en font un classique du genre si tant est que le punk puisse avoir généré des classiques.
De cet album avait déjà jailli un single l’année précédente, Oh Bondage Up Yours!/I Am A Cliché, concentré en deux faces de sédition ouverte. En 1978, I Am a Poseur succède à I Am a Cliché en face B et en face A The Day The World Turned Day-Glo, titre quintescent et incandescent de ce qui fait l’identité du groupe avec son saxophone dissonant à la James Chance, la guitare tranchante Jak Airport, la simplicité alarmante de lyrics tailés au rayon laser “The X-rays were penetrating through the latex breeze synthetic fibre see-thru leaves fell from the rayon trees”.
Cette fraîcher et cette morgue révoltées n’eurent donc qu’un temps comme pour les pénétrantes Slits ou les séminales Penetration mais n’est-ce point là l’esssence même du punk No Future ? De ces pionnières fières et altières naîtront d’autres courants (on pense bien sûr aux riot grrrls nineties) et de nombreuses formations électriques et féministes, revendicatrices et profondément rock, qui à leur tour se mettront à hurler à leur manière Oh Bondage Up Yours!
The Day the World Turned Day-Glo est disponible sur le volume 1 de Rock UK, coédité par « Les Inrocks » et Wagram en CD ou en vinyle.
Retrouvez aussi Rock UK, volume 2 (en CD et en vinyle) et 3 (en CD et en vinyle).
{"type":"Banniere-Basse"}