Si le troisième album du Velvet donnait la fausse impression d’un groupe sorti indemne de son propre Vietnam, ce Loaded présente effectivement, pour la première fois, le Velvet en plein soleil, serein et en paix. Il faut dire qu’autour de lui, Lou Reed a fait un ménage stalinien : plus de temps à perdre en […]
Si le troisième album du Velvet donnait la fausse impression d’un groupe sorti indemne de son propre Vietnam, ce Loaded présente effectivement, pour la première fois, le Velvet en plein soleil, serein et en paix. Il faut dire qu’autour de lui, Lou Reed a fait un ménage stalinien : plus de temps à perdre en discussions et compromis. Parmi les membres originels, John Cale et Nico ont déjà fait leurs valises, Andy Warhol a été prié d’aller peindre ailleurs, Moe Tucker est écartée par une grossesse ; le rescapé Sterling Morrison est alors l’ultime souffre-douleur de Lou Reed. Ne pas se fier, donc, à l’ambiance bonhomme de Loaded : le Velvet demeure une poudrière d’où, sans doute, l’omniprésence des poudres de perlimpimpin sur ce disque. D’ailleurs, Lou Reed ne finira même pas l’enregistrement du disque, démissionnaire de cet ultime pied de nez aux routines du rock sans jamais avoir sorti le moindre album prévisible.
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Souvent considéré par les fans les plus durs comme un album social-traître, Loaded présente pourtant des charmes inédits : le Velvet en chemises à fleurs en lieu et place des cuirs noirs. Mais à ceux qui reprocheraient au groupe d’avoir cocufié les cloaques new-yorkais pour le soleil abêtissant de Californie, plus en vogue à cette époque hippie, Lou Reed répond par une de ses nombreuses chansons où excelle son ironie vacharde : « Qui aime le soleil ? Qui se fiche de savoir qu’il fait pousser les plantes » Aux interrogations et atermoiements métaphysiques du troisième album, succède une sagesse narquoise. Lou Reed avoue ainsi, goguenard, avoir trouvé une raison pour continuer à vivre (I Found a Reason) et envisage le début d’une nouvelle ère (New Age). Surtout, il martèle cet hymne définitif : « Sa vie a été sauvée par le rock’n’roll« ? Sur cette phrase seule de Rock’n’Roll, on pourrait écrire une thèse, trouver autant d’exemples que de contre-exemples ? souvent chez les mêmes personnes d’ailleurs, totalement asservies à la puissance maléfique de disques qu’on n’aurait jamais dû laisser en vente libre.
Réédité en février 1997 par le label Rhino en coffret luxe comprenant une généreuse vingtaine de versions inédites ou primitives de ces chansons, Loaded est tout sauf la fin contre un mur de briques du souterrain de velours : Lou Reed, drôle comme rarement depuis, y voit au contraire la lumière. Le Velvet sort de sa cave : le vilain canard noir se lance dans un chant du cygne d’un culot et d’une puissance inouis. « Depuis que j’ai sept ans, ma mère me dit de relever la tête« , ricane Head Held High. C’est la tête haute que Lou, en 1970, sort du Velvet par la grande porte, ou par la bouche de métro enfumée de la pochette.
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