Figure emblématique du jazz académique de ces vingt dernières années, le trompettiste Wynton Marsalis retrouve fraicheur et inspiration. Jazz Qu’on le veuille ou non, pour le meilleur et le pire, le trompettiste Wynton Marsalis, à pas même 40 ans, s’impose d’ores et déjà comme une figure historique du jazz de ces vingt dernières années. Apparu, […]
Figure emblématique du jazz académique de ces vingt dernières années, le trompettiste Wynton Marsalis retrouve fraicheur et inspiration.
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Jazz Qu’on le veuille ou non, pour le meilleur et le pire, le trompettiste Wynton Marsalis, à pas même 40 ans, s’impose d’ores et déjà comme une figure historique du jazz de ces vingt dernières années. Apparu, jeune homme strict et virtuose glacé, au tournant des années 80 au sein des Jazz Messengers d’Art Blakey, Marsalis affirma d’emblée sa différence en reprenant le jazz là où Miles l’avait laissé au milieu des années 60, faisant l’impasse à la fois sur le free-jazz et ses dérivés et l’influence polymorphe de la pop. Sa musique « de synthèse », high tech et sophistiquée, à la modernité savamment tempérée, imposa insensiblement au jazz un recentrage tant esthétique qu’idéologique et posa les bases théoriques du néo-hard-bop yuppie, réac et mercantile des années 80.
Curieusement, alors même qu’elle en était l’initiatrice, la musique de Marsalis échappa en partie à cette dérive, engagée très vite dans une vaste quête des origines en un drôle de processus musicologique, encyclopédique et pédagogique. Le trompettiste, sur tous les fronts, réunifiait ces territoires et recomposait une image cohérente et orientée de l’histoire du jazz, se présentant en fin de course comme le dernier avatar d’une lignée qui irait de Jelly Roll Morton à Mingus en passant par Ellington et Monk. Trompettiste brillantissime, compositeur fécond, leader charismatique, directeur artistique du département jazz du prestigieux Lincoln Center, Wynton Marsalis occupe aujourd’hui une place ambiguë dans le paysage jazzistique contemporain. Place fondamentale, dans la réalité américaine et d’un point de vue institutionnel, puisqu’elle légitime à elle seule le jazz en tant qu’expression de la culture afro-américaine comme forme majeure de l’art US du xxe siècle ; étonnamment contre-productive d’un strict point de vue artistique, puisque, en enfermant le jazz, sous prétexte de reconnaissance, dans des formes figées et historiquement marquées, Marsalis transforme cet art même du « devenir » en une musique de répertoire.
Reste que de loin en loin Marsalis se souvient quel magnifique musicien il peut être. Et ces sept soirées imaginaires, composées et mises en scène à partir d’une série de concerts donnés au Village Vanguard par diverses formules de son septette entre mars 90 et décembre 94, s’avèrent peut-être à ce jour son œuvre la plus spontanément séduisante. Une musique brillante et puissante, aux arrangements somptueux, animée de solistes inspirés, traversant comme à l’accoutumée toute l’histoire du jazz en quête d’archétypes sur quoi fonder sa pérennité stylistique. Si les problèmes théoriques et esthétiques restent entiers (dans quel hors-temps factice cette musique nous projette-t-elle ?), le résultat, pourquoi le nier, est parfaitement réjouissant.
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