La nostalgie n’attend pas le nombre des années : à 24 ans, la rappeuse anglaise Little Simz se lance dans une introspection mélancolique mais optimiste.
Beaucoup de choses se sont passées depuis Stillness in Wonderland, le second album de Little Simz, paru fin 2016. Il y a d’abord eu les critiques, positives et unanimes ; les nominations, dont deux aux AIM Awards et deux autres aux fameux MOBO Awards ; il y a eu les festivals aussi, de l’Afropunk à Londres au festival de Dour en passant par le Roundhouse Rising ; sans oublier une apparition sur l’album Humanz de Gorillaz, dont elle a par la suite assuré la première partie lors de leur tournée européenne. “L’année qui a suivi Stillness in Wonderland a été très intense, et m’a plongée dans des pensées assez obscures, dit-elle en repensant à 2017. J’ai beau être une artiste, voyager et faire des tournées, cela n’exclut pas que je traverse moi aussi des moments difficiles – comme tout le monde.”
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Un projet thérapeutique
Ce sont ces “moments difficiles”, ces instants de doute et de fragilité que la Londonienne de 24 ans extériorise aujourd’hui à travers son troisième album Grey Area, disponible le 1er mars sur son label Age 101 Music. Décrit par la rappeuse comme “thérapeutique”, ce projet de dix titres nous plonge au cœur de son journal intime, et relate tour à tour ses réflexions les plus dépressives (Pressure), ses failles et ses blessures (Therapy, Wounds), sa nostalgie d’un temps plus insouciant (101 FM).
Sur Flowers, qui expose les points de vue des iconiques Amy Winehouse et Jimi Hendrix, elle évoque aussi sa peur de perdre pied au sein d’une industrie musicale “sauvage”, se demandant si son ambition doit nécessairement être teintée de tragédie. “Ce sont deux artistes partis trop tôt, à 27 ans ; je fais moi aussi de la musique, j’ai eu 24 ans… ça fait cogiter”, explique-t-elle. Et d’ajouter : “’Grey Area’ parle d’une période sombre de ma vie, au cours de laquelle je pensais que rien n’était simple, que tout était confus… Faire cet album, ça m’a permis d’y voir plus clair, et de guérir.”
Un éventail d’atmosphères
Cathartique et introspectif, le disque est cependant loin d’être morose. Produit entièrement par Inflo, un ami d’enfance que la jeune femme considère comme son grand frère, Grey Area se veut percutant et optimiste, marqué par une instrumentalisation faite de flûtes, de guitares, de lignes de basse et de cordes à la fois grondantes et envoûtantes. Avec lui, Little Simz nous entraîne dans des atmosphères tantôt grime, tantôt funk, tantôt soul, lui permettant de s’inscrire dans de nouveaux registres, de dévoiler de nouvelles facettes de son univers. “Inflo a clairement repoussé les limites de mon art, explique-t-elle. Il m’a fait sortir de ma zone de confort comme personne n’y était parvenu jusqu’ici.”
Combatif et conquérant
Le résultat est un disque combatif et conquérant, grâce auquel Little Simz renoue avec elle-même, nous invite à faire de même et, surtout, prouve à nouveau qu’elle est l’une des artistes les plus douées de la scène rap anglaise. “J’ai de la chance d’avoir la musique comme exutoire dans ma vie, je me sens beaucoup mieux maintenant que j’ai fait cet album, conclut-elle. Ceci dit, je ne sais pas combien de temps cet état va durer. Mais c’est aussi ça, la vie : tu ne peux pas toujours tout contrôler.”
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