Passe-temps de luxe, Liquorice déserte ses brouillons bruyants pour un faux calme inquiètant mais passionnant. «Dans le Michigan, notre batteur habite une petite ville où s’est installée une gigantesque usine de réglisse (liquorice)… La réglisse est partout, omniprésente. Chaque année, la boîte organise un concours du plus gros mangeur de réglisse pour les classes de […]
Passe-temps de luxe, Liquorice déserte ses brouillons bruyants pour un faux calme inquiètant mais passionnant.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
«Dans le Michigan, notre batteur habite une petite ville où s’est installée une gigantesque usine de réglisse (liquorice)… La réglisse est partout, omniprésente. Chaque année, la boîte organise un concours du plus gros mangeur de réglisse pour les classes de sixième. Notre batteur a gagné ce concours à l’époque. Maintenant, il ne faut plus lui en parler. Il a été tellement malade qu’il ne peut plus en avaler. Chaque fois qu’on le voit, on lui en apporte et ça lui mine le moraL.. D’où notre nom, Liquorice. » Loin, très loin de son huileux homonyme français Regglyss, l’américain Liquorice, rejeton de Jenny Toomey (ancienne Tsunami et Grenadine) et de Daniel Littleton (vétéran de l’activisme obscur, de Hated à Ida), porte bien mieux son nom, à la fois suave et amer, corrosif et bienfaisant. Ces amis de douze ans avouent aujourd’hui tromper depuis toujours leurs bruyants groupes respectifs pour jouer en duo quelques chansons fétiches, guitare débranchée et intimisme dans le rouge. Et c’est au grand jour qu’ils viennent enfin de prendre une semaine de congés afin d’enregistrer en douce les chansons moelleuses et troublantes qu’ils pratiquent chaque fois qu’ils ont cinq minutes pour se retrouver à Arlington ? repaire adultère où vit Jenny. Ce qui, au départ, n etait qu’un amusement innocent et apaisant dans un emploi du temps accaparé par Tsunami, Grenadine ou le (très bon) label Simple Machines pour Jenny et par les subpopisants Hated et Ida pour Daniel, trouve donc son happy ending chez 4AD ? «un grand honneur» pour eux. Listening cap confirme les espoirs entraperçus derrière les guitares désordonnées et brouillonnes de Tsunami: un album posé et tranquille, préférant aux épuisantes distorsions des mélodies folk jamais fadasses, jamais radasses. Lymphatiques, épuisées, ces chansons se laissent parfois doubler par les relents d’une époque proche où ces guitares savaient jurer et castagner. On repère ainsi quelques riffs hystériques (No excuses, You blew it), vite maîtrisés par une voix berçante et monocorde qui anéantit toute velléité de révolte. Les influences avouées ? Nick Drake, Richard et Linda Thompson ? sont assimilées avec une précision clinique et donnent naissance à deux reprises candides et onctueuses, Jill of all trades des Roches Sisters et Keep the weekend open de Nothing Painted Blue. La lumière entre alors dans le clair-obscur un rien étouffant de Listening cap, révélant les contours d’un groupe beaucoup moins flasque qu’il n’y paraît. Et quand ils referment les fenêtres pour se replonger dans leurs chansons verdelettes, on les regarde alors d’un autre oeil: on sait désormais que ces agneaux peuvent mordre.
{"type":"Banniere-Basse"}