Couche-tôt, traîne-la-mort et porte-œillères n’auront rien à faire aux Transmusicales 2000, dont la riche affiche impose un authentique parcours du combattant.
Inutile d’aller aux Transmusicales cette année si vous êtes un couche-tôt : la majorité des concerts excitants du festival se passe entre minuit et 8 h du matin. Cambriolage de pharmacies en Guronsan et import en masse de Red Bull, indispensables pour ceux qui ne voudront pas rater la crème de l’édition 2000. Ça commence pourtant doucement le mercredi 29 novembre, mise en jambes bon enfant, avec Général Alcazar et sa fiesta douce-amère, Dupain et ses chansons occitanes qui réussissent un pari impossible : concilier revendications et euphorie ou Mickey 3D et sa pop détraquée. Première également d’une série de quatre soirées tranquilles avec Françoiz Breut, qui livrera en douceur ses chansons intimistes et exposera pendant toute la durée du festival ses illustrations et livres-objets. En première partie de Françoiz, Tom McRae présentera ses mélodies tristes les deux premiers soirs, tandis que les Franco-Suédois d’Herman Düne nouvelle coqueluche anglaise prendront le relais les 1er et 2 décembre. Le lendemain commence vraiment le marathon, la course d’une salle à l’autre, attention à ne pas déraper sous la pluie. Château Flight ou l’union de Gilb’R et I:Cube réconfortera par son electro atmosphérique vacillant entre ambiant et groove, Avril ne découvrira rien en live de son album à venir mais s’en tiendra au mix, relayé par Olaf Hund qui, privé de platines au Festival des Inrocks, devrait là prendre sa revanche. A l’heure des crêpes, Avenue A jouera aussi au DJ vu l’album, autant s’attendre à du groove grave et du psychédélisme sombre. Et là les choses se compliquent. Tous ces concerts qui s’étaient succédé sagement vont maintenant, sauvagement, se chevaucher. Les Nubians ou Le Peuple De L’Herbe ? Leila ou Groove Terminator ? La petite Anglo-Iranienne et ses folies électroniques ou des Australiens aux breakbeats bagarreurs ? Le choix est vite vu. On enchaînera sur Guru et son Jazzmatazz, qui a convié, à Rennes, Angie Stone, Herbie Hancock, Bilal et on ne serait pas étonné que Les Nubians viennent y rôder. Pour ceux qui tiennent bien le chouchen, Photek finira la nuit avec un mix, jusqu’à 6 h du matin. Ça repart sec le lendemain 1er décembre avec les deux copains de Nigel Godrich (producteur, entre autres, de Radiohead), les remixeurs de Radiohead et Terry Callier, Zero 7. Plus calme, Cousteau enchaînera avec sa pop luxuriante, travaillée à l’ancienne à l’école Scott Walker et sera suivi de près par Goldfrapp, dont on attend énormément du live, qui devrait faire basculer la sophistication morriconienne de l’album dans une noirceur salace. Pour ceux qui ont besoin de bouger pour se tenir éveillés, Tonino Carotone et son brouet festif hispano-italien devraient faire l’affaire. Peu après, Benjamin Diamond et sa house foraine seront en compète avec les rejetons musicaux et physiques du MC5, At The Drive-In. On ira voir ceux qui font le plus de bruit et ça risque bien de friser c’est le mot l’événement. A enchaîner sur l’autre événement de la soirée, un concert de De La Soul, exclusivité absolue européenne, où les Américains présenteront leur cinquième album, toujours aussi frais, toujours aussi malins. Moins exclusif, mais attendu avec grosse kuriosität, l’Allemand frappadingue Señor Coconut et son Kraftwerk revu cha-cha-cha. Parallèlement à ce déchaînement créatif multidirectionnel, les trafiquants de soul Mike Ladd, LSK ou l’extraordinaire Saul Williams rappelleront à quel point Gil Scott-Heron ne s’est pas battu pour des clopinettes et à quel point le hip-hop, ici à poil, n’a pas besoin de déguisements. Pour ceux que le dub envapé de Thievery Corporation fait somnoler, les Mancuniens de Simian proposeront leur pop expérimentale et mélodieuse, suivis par Morgan, sa smala et son orgue Hammond. Puis on finira la nuit dans les bras de DJ Morpheus, logique. On profitera que les concerts finissent tôt ce soir-là (6 h) pour rappeler aux increvables la programmation sympa et parallèle des Bars en Transes, avec, en vrac, Mary Lake, Burgess, Sven Löve, Uncommonmenfrommars, The Servant, Pascal Parisot… Le 2 décembre, un requinquage à base d’huîtres et ça repart. Débutée sous le signe de l’étrange et de la finesse, avec Richard Pinhas et son minimalisme electro, puis l’intrigant Khan escorté de Julee Cruise , la soirée va vite se dynamiser, d’abord avec les bruitistes explosifs de …And You Will Know Us By The Trail Of The Dead, puis avec la pop electro lo-fi toujours impeccable de Burgalat, le rock déglingué et maléfique de Menlo Park et le garage crade et psyché des Suédois de The (International) Noise Conspiracy. Loin de tout ce bruit et de cette fureur, on ira ensuite groover chez Amon Tobin, recroiser notre Señor Coconut sous un autre nom, AtomTM puis s’amuser à reconnaître les disques préférés de David Holmes sur le dance-floor. A moins qu’à l’electro on ne préfère le hip-hop, auquel cas, on n’est pas couché : on commencera par le rap intello et futuriste d’Anti Pop Consortium, suivi des suaves Californiens de People Under The Stairs. Petit break plus jazzy et furieux avec Live Human, et c’est reparti avec les couillonnades de l’excellent MC Paul Barman, qui laissera la place au grand maître d’ uvre Dan The Automator, ici sous sa casquette Deltron 3030. On espère beaucoup de la transposition sur scène de ce disque intelligent et magnifique. Difficile de prendre la relève, surtout à 5 h 40 du matin et pourtant, The Nextmen devraient finir la soirée (la matinée ?) en douceur avec un hip-hop cool, petit frère européen de De La Soul. A 8 h du matin, si on n’est pas mort d’épuisement ou de perforation de l’estomac par abus divers, il sera temps de se savonner derrière les oreilles et d’aller faire absoudre sexe, drogues et rock’n’roll à la cathédrale Saint-Pierre. Vivement dimanche.
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