Son décès à peine annoncé, les réseaux sociaux s’emballaient, comblant à leur façon le vide créé par son absence.
Lundi, 7 h 55. On attrape d’une main notre smartphone posé sur la table de chevet, la tête encore collée sur l’oreiller. Direction Facebook. La nouvelle est là, entre un article listant les “10 façons d’accéder au bonheur”, et une vidéo de chaton : David Bowie est décédé à l’âge de 69 ans. Stupeur.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On ouvre notre deuxième œil, et on cherche l’erreur. Le message provient bien du compte officiel du chanteur : “David Bowie est mort aujourd’hui paisiblement, entouré de sa famille, après s’être courageusement battu contre un cancer durant dix-huit mois. (…) nous vous demandons de respecter la vie privée de ses proches durant leur deuil.”
January 10 2016 – David Bowie died peacefully today surrounded by his family after a courageous 18 month battle… https://t.co/ENRSiT43Zy
— David Bowie Official (@DavidBowieReal) January 11, 2016
Son fils, Duncan Jones, confirme sur Facebook et Twitter en postant une photo de son père le portant sur ses épaules, bébé, la tête légèrement inclinée, souriant vers l’objectif : “Désolé et très triste de vous dire que c’est vrai. Je ne serai pas en ligne pendant un moment. Je vous aime tous”.
Very sorry and sad to say it's true. I'll be offline for a while. Love to all. pic.twitter.com/Kh2fq3tf9m
— Duncan Jones (@ManMadeMoon) January 11, 2016
A 8 heures et 46 secondes, alors que, sur France Inter, Patrick Cohen glisse l’info dans le journal de Marc Fauvelle, Facebook et Twitter débordent déjà d’hommages – 1,6 million de tweets avec la mention “David Bowie” auront été postés en quatre heures.
David Cameron, Kanye West, Pharrell Williams…
En 2016, la mort d’une idole se vit et se partage sur les réseaux sociaux. Il faut réagir, et vite. A 8 h 17, le Premier ministre britannique David Cameron tweete : “J’ai grandi en écoutant et en regardant le génie de la pop David Bowie. C’était un maître de la réinvention, qui ne cessait de viser juste. Une grande perte.”
Dix minutes plus tard, c’est Kanye West qui salue la mort de l’“une de (ses) plus importantes sources d’inspiration”, “si intrépide, si créatif, il nous a donné de la magie pour toute une vie”.
https://twitter.com/kanyewest/status/686449257767776256
A 9 h 10, Pharrell Williams lui emboîte le pas : “David Bowie était un véritable innovateur, un vrai créatif. Qu’il repose en paix. #RIPDavidBowie.” A 9 h 59, Madonna poste la photo utilisée pour la pochette d’Aladdin Sane : “Je suis dévastée ! Ce grand artiste a changé ma vie ! Premier concert que j’ai vu, à Detroit ! R.I.P. <3 #rebelheart.” Avant d’enchaîner avec deux autres images, dont une la montrant tout sourire aux côtés du chanteur, et citant des paroles de Rebel Rebel : “Si chanceuse de t’avoir rencontré ! Hot tramp I love you so!”
So lucky to have met you!!!! Hot Tramp I love you So! ❤️ #rebelheart pic.twitter.com/INKPRCeofK
— Madonna (@Madonna) January 11, 2016
Sur Facebook, les anciens de Sonic Youth relaient une vidéo de leur duo avec le chanteur, I’m Afraid of Americans, au Madison Square Garden en 2010, accompagnée d’un sobre “R.I.P. Bowie”, puis enchaînent avec le clip de Sorrow, qui se passe de commentaires.
Quel Bowie a marqué ma vie ?
Sur les réseaux sociaux, les messages sont personnalisés à l’aide de photos et/ou de vidéos, comme si chacun cherchait à fixer et à se réapproprier l’image de l’artiste, paradoxalement insaisissable. Parmi les vidéos les plus relayées : le live donné le 6 juillet 1972 dans l’émission Top of the Pops, au cours duquel un Bowie moulé dans une combinaison matelassé bleue, rouge et or collait des frissons à une jeunesse en mal de soufre en chantant en duo avec le guitariste à la tignasse peroxydée Mick Ronson. C’est ce Bowie version Ziggy Stardust que les internautes semblent le plus retenir : 32200 tweets comportant sa mention ont été postés le 11 janvier avant midi.
Chacun cherche à trouver le clip, le live, l’image qui cristallisera sa relation à l’artiste. Sur les réseaux sociaux, l’important n’est plus tant le partage d’informations le concernant que l’expression de son individualité au travers de la mort de l’icône : quel Bowie suis-je ? quel Bowie a marqué ma vie ?
Tout le monde s’y met. Jusqu’au ministère allemand des Affaires étrangères qui s’est fendu d’un tweet à 7 h 41 pour remercier l’interprète de Rebel Rebel d’avoir “aidé à faire tomber le Mur” avec Heroes. Dans un couplet du morceau, Bowie décrit un couple d’amoureux s’embrassant au pied du Mur en pleine guerre froide, une scène à laquelle il aurait assisté au cours de sa période berlinoise, à la fin des années 1970.
Good-bye, David Bowie. You are now among #Heroes. Thank you for helping to bring down the #wall. https://t.co/soaOUWiyVl #RIPDavidBowie
— GermanForeignOffice (@GermanyDiplo) January 11, 2016
Mais c’est un gif qui devrait remporter la palme de la viralité. Créé en janvier 2015, à l’occasion des 68 ans du chanteur, par Helen Green, une jeune artiste anglaise, il compile divers portraits dessinés, et cherche ainsi à résumer en quatre secondes top chrono la complexité de sa carrière artistique.
Thank you and RIP David Bowie. pic.twitter.com/bJOeyVTZmF
— tumblr dot com the website and app (@tumblr) January 11, 2016
Le voici donc partout, sur le compte Twitter de la ministre de la Culture Fleur Pellerin, comme sur le mur Facebook de votre tante Jacqueline. L’heure n’est plus aux grandes déclarations, mais aux émoticônes : un smiley triste vaut désormais cent phrases de deuil. Trois jours plus tôt, un cœur rouge accompagnait déjà une image : celle d’une étoile noire sur fond blanc, pochette de Blackstar, le vingt-cinquième album de David Bowie, sorti le jour de son anniversaire.
A 14 h 10, alors que le tabloïd britannique en ligne The Mirror annonce qu’Angie, l’ancienne compagne de Bowie, a décidé de continuer l’émission de téléréalité Celebrity Big Brother à laquelle elle participe actuellement (chacun ses préoccupations), les paroles de Lazarus, le dernier single du chanteur, tournent en boucle sur internet et dans nos têtes : “Look up here, I’m in heaven/I’ve got scars that can’t be seen/I’ve got drama, can’t be stolen/Everybody knows me now” (“Regarde là-haut, je suis au paradis/J’ai des cicatrices qui ne peuvent être vues/J’ai mon lot de tragédies qui ne peut être volé/ Tout le monde me connaît désormais”). A 14 h 14, on se décide enfin à retweeter l’un des messages les plus partagés : “Alors, c’est comment la vie sur Mars ?”
{"type":"Banniere-Basse"}