Vous avez loupé les morceaux, découvertes et tubes publiés quotidiennement par JD Beauvallet ? Hourra : ils tous ici.
LUNDI 10
Oceaán Turned Away
Les autres musiciens vont commencer à s’agacer, s’énerver, s’insurger, certains hurleront peut-être “mort aux privilèges” ou “fumiers de passe-droits”. On pensera peut-être à un lien familial, à des faveurs sexuelles, à une corruption éhontée pour expliquer la présence désormais assidue d’Oceaán dans cette rubrique. Eh bien zobi la mouche à ceux qui justement la prendraient, la mouche : c’est strictement sur la foi de ses titres ou remixes, postés avec une régularité affolante que le jeune Mancunien a reçu ici sa carte d’abonnement, de fidélité. Et ce n’est certainement pas avec ce Turned Away que l’on va justement changer de direction : entre suavité et désordre, la possibilité d’une soul personnalisée se dessine de plus en plus clairement dans cette obscurité complice, dans ce fouillis ardent qui simule le minimalisme et la glaciation. Attention : cette chanson peut provoquer des aurores boréales au-dessus du Sahara.
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MARDI 11
Hannah Peel Desolation Row
On avait connu Hannah Peel en beauté hantée des trop méconnus Magnetic North, ou reprenant la new-wave, de Soft Cell à New Order, derrière son mystérieux orgue de Barbarie. De barbarie, il n’est nullement question dans ses chansons solo : épaulée par Erlend de Magnetic North et du graphiste Jonathan Barnbrook, elle y fait valser les fantômes avec une pop chimérique, noctambule et riche comme Crésus. Une de ses chansons s’appelle Silk Road, La Route de la Soie : toutes ses chansons s’y habillent.
http://youtu.be/MA7G2Od6A4U
MERCREDI 12
Benjamin Booker RTS
Benjamin Booker partage au moins deux points communs avec Alabama Shakes : son management et son label, Rough Trade. Venu de La Nouvelle Orléans, il aime aussi visiblement cette électricité nonchalante, même si ses racines, nettement moins soul et plus rugueuse, remontent au Gun Club ou au blues de la préhistoire. Il le traite sans ménagement, à l’électricité excitée, sur une poignée de chansons exécutées (au sens militaire du terme) en duo parfait – façon Black Keys ou Royal Blood. Vivement la scène.
http://youtu.be/bzSsPdnuOdw
JEUDI 13
The Agency Midnight Garden
Sur Somnographe, les Français rappelaient que la pop-music pouvait être ici une première langue avec laquelle on pouvait se permettre les plus audacieuses prouesses grammaticales – au lieu de juste servir à réciter, sagement, de belles histoires étrangères. Emportés par le vent, ils laissaient flotter leurs chansons dans les remous psychédéliques, souvent uniquement rattachées à la réalité par un chant étonnamment clair et proche – alors que la musique semblait si lointaine, si floutée. C’est cette manière de faire de la pop à la fois méticuleuse, ordonnée d’apparence et mentalement dérangée, diffractée qui fait la force du clip de Midnight Garden, temps fort de Somnographe. Une chanson qui hantait déjà les jours radieux – et qui s’occupera désormais des nuits d’angoisse, merci les gars.
VENDREDI 14
Fiancé Era
Des Shins à Real Estate, c’est une façons très américaine de contempler la pop anglaise des années 80 (la ligne claire, des Smiths à Felt), avec chochotterie, raie de côté et petit cardigan tricoté par mémé. Ça peut même devenir un compliment quand, derrière toute cette vénération, ces ronds-de-jambes guindés et cette politesse surannée, le groupe en question tient une chanson aussi limpide qu’Era, qui brandit son romantisme comme un badge, sa mélancolie comme un vieux sac épuisé de vinyles. C’est commode, la nostalgie des années 80 quand on n’a pas dû subir les années 80.
SAMEDI 15
Atmosphere Bitter
Il faudra attendre le 6 ami pour se gaver une voix encore de son flow ténébreux et de ses beats obliques, mais le formidable duo Atmosphere offre déjà en avant-garde son Bitter. Ant et Slug, “Fourmi” et “Limace” y jouent une fois encore une drôle de fable de la Fontaine, polluée et toxique. Car le souvenir est ici un poison et un terreau dont on ne s’échappe pas, matière première d’une discographie parmi les plus personnelles, obsessionnelles même de l’histoire du hip-hop : un storytelling intime et nu plus fréquent dans le rock ou le folk que dans le hip-hop, peu friand de l’étalage de ses faiblesses et de ses impotences. Il y a dix ans, Slug nous avait d’ailleurs raconté d’où venait sa passion pour le rock : “Même si nous venons du hip-hop, j’aime les rockeuses. Tu sais, ces petites fans de rock indé, tatouées comme de vilains marins…” Ah ah ah.
DIMANCHE 16
Robert Hancock Hiking
La chanson de Robert Hancock n’est pas vraiment neuve : elle est venue à la nage de Nouvelle-Zélande. Mais comme son style – un folk exalté, détourné de son bucolique chemin par quelques cueillettes de champignons qui élargissent le cerveau – n’est pas exactement le son du jour, voire de l’heure, Hancock offre donc une pause respiratoire plus que bienvenue dans la frénésie, l’affolement. Il s’accapare cette pause d’une voix d’ogre, en lutte contre une électricité tordue, qui évoque autant les méandres de Jeff Buckley que la sérénité très ancienne d’Eyeless In Gaza. Et comme c’est dimanche et que vous vous occupez de vos enfants, juste un conseil : ne leur montrez pas ce clip, ou planquez les Barbie (turiques).
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