Les Innocents JP Nataf et Jean-Christophe Urbain allongent leur destin commun. Un nouvel album électrique porté par l’éclectisme de leurs mélodies.
“Il faut se rendre à l’évidence, notre image publique est très floue. Nos chansons sont bien plus connues et sexy que nous. D’ailleurs, on nous appelle encore les garçons”, reconnaissent sans ambages JP Nataf et Jean-Christophe Urbain, attablés dans leur QG du XXe arrondissement parisien. Fidèles à leur modestie, ils pourraient pourtant se targuer de trophées empochés depuis trente ans : une collection de tubes populaires (L’Autre Finistère, Un homme extraordinaire, Colore, Un monde parfait), un deuxième album écoulé à 600 000 copies (Fous à lier, 1992), une avalanche de perles mélodiques (Lune de lait, Une vie moins ordinaire, Danny Wilde, Harry Nilsson) et même quatre Victoires de la musique.
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Bref, une discographie remarquable et une carrière exemplaire pour ces vétérans de la pop française, qui partagèrent autrefois le même label qu’Etienne Daho. Après une longue césure discographique et deux disques solos pour JP Nataf, Les Innocents ont renoué en 2012, et retracé le fil de leurs Philharmonies martiennes sur un disque des retrouvailles, aussi inspiré qu’inespéré après tant d’années de bouderie.
Pour un peu mieux vivre ensemble
Plus électrique et multicolore que Mandarine (2015), toujours enregistré et mixé par l’incontournable Dominique Ledudal (déjà aux manettes à l’époque de l’indémodable Jodie de 1987), leur sixième album et demi débute par l’ouverture magnifique de Quand la nuit tombe, single potentiellement imparable. A la manière de Lennon/McCartney, JP Nataf et Jean-Christophe Urbain ne sont jamais meilleurs réunis que séparés. “A deux, nous formons un artiste, plaisantent-ils. Sur Mandarine, nous étions encore dans la séduction réciproque liée à notre reformation. On a fait ce disque dans la même dynamique que notre premier album, en mettant dans notre musique celle que l’on a envie d’entendre.”
Classique et lumineux
Mélodistes hors pair, ils régalent l’auditeur sur ces dix pop songs, tantôt entêtantes (Apache) ou légères (Les Îles d’amnésie), solaires (Opale) ou rythmées (Les Cascades), bouleversantes (De quoi suis-je mort ?) ou contemplatives (Slow#1). Pas étonnant que l’on songe souvent à Teenage Fanclub, cousins écossais à la longévité éprouvée, pour leur goût commun d’un songwriting à la fois classique et lumineux. Musiciens raffolant d’harmonies vocales et mélomanes obsédés par les tubes radiophoniques, Les Innocents opposent à l’air du temps leur constance admirable, et n’hésitent pas à user de références démodées dans une même chanson – une réplique du film Casablanca, la ville de Saint-Pierre-des-Corps et les cigarettes Pall Mall citées successivement dans Les Îles d’amnésie.
Amis de trente ans nés l’été 1962 (l’année de Love Me Do des Beatles, comme par hasard vocal), JP Nataf et Jean-Christophe Urbain ont leurs destins artistiques entrecroisés pour la vie. Clin d’œil du calendrier : 6 ½ paraît le 15 mars 2019, trente-sept ans jour pour jour après le premier concert donné par Les Innocents dans le squat parisien des Cascades. La boucle est bouclée.
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