Rameau florissant. William Christie et Rameau fêtent l’arrivée du printemps en organisant une grande fête dansante dans les champs. Dès les premières mesures de l’ouverture, William Christie fait preuve d’une précision, d’une vivacité qui ne vont pas lui faire défaut durant deux heures et demie. Cinq demi-heures qui défilent sans le moindre ennui. En chevauchant […]
Rameau florissant. William Christie et Rameau fêtent l’arrivée du printemps en organisant une grande fête dansante dans les champs.
Dès les premières mesures de l’ouverture, William Christie fait preuve d’une précision, d’une vivacité qui ne vont pas lui faire défaut durant deux heures et demie. Cinq demi-heures qui défilent sans le moindre ennui. En chevauchant la plus légère de ses montures, il fouette avec discernement ce fatras mythologique étonnant qui fournit la toile de fond de l’opéra-ballet pour nous convaincre de l’imagination musicale de son auteur et se jucher au plus haut niveau de l’interprétation. On le sait, Christie a un faible pour Rameau, le plus grand compositeur français du baroque. Ses amours ont été depuis longtemps couronnées de succès. Il s’attaque ici à une partition qui semble au premier abord plus limpide à approcher mais où l’on doit réussir dans les contrastes instrumentaux et dans la succession de morceaux décoratifs. Car autant la tragédie lyrique a un propos dramatique (Rameau s’y est essayé avec génie dans Hippolyte et Aricie), autant l’opéra-ballet, qui comporte autant d’actes (ça s’appelle des entrées) que d’actions différentes dans un cadre thématique commun, se veut divertissant. Ces Fêtes d’Hébé ont un précédent fameux : rappelez-vous ces Indes galantes plus que colorées qu’un certain Alfredo Arias et un William Christie au look d’enfer avaient sérieusement décoiffées il y a dix ans. Un prologue et trois entrées qui célèbrent la poésie, la musique et la danse alimentent ici airs, ensembles et choeurs dans lesquels on oubliera volontiers le contenu littéraire pour se concentrer sur le traitement musical du texte : une véritable leçon de maintien, aussi parfaite que l’alexandrin de Racine ou Corneille. Ecoutez déclamer Sophie Daneman ou Jean-Paul Fouchécourt et vous resterez tétanisés, envoûtés. Mais l’opéra-ballet, c’est d’abord la danse. On trouvera parsemées les plus belles formes baroques : gavotte, rigaudon, lourée, passepied et surtout, musette et tambourin que Rameau reprend de son propre catalogue pour clavecin. Ceux qui ont pianoté assez longtemps retrouveront là un air connu. Dire que William Christie est possédé par l’inspiration pour restituer les contrastes de la danse, de l’énergie éclatante à la rêverie, est une chose. S’incliner devant la beauté et l’efficacité de la restitution instrumentale est une autre nécessité. Il y a de quoi jubiler en entendant les galipettes du galoubet provençal et les longues tenues expressives des musettes. Transporté de bocage en jardin, l’auditeur jouit de la plus rafraîchissante des aventures champêtres. « Régnez, voltigez » : cette invitation qui nous est faite peut être relevée sans problème. Rameau et Christie sont les plus compétents des maîtres de ballet.
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Jean-Philippe Rameau Les Fêtes d’Hébé Les Arts Florissants, dir. William Christie (Erato)
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