Les enchantements d’Here We Go Magic

Apparu l’an dernier comme un sideproject du songwriter folk de Brooklyn Luke Temple, Here We Go Magic est visiblement devenu un groupe à part entière. Temple a été rejoint dans l’intervalle par un double mixte de musiciens capables de tenir les promesses magiques de son nom. Car si un simple 4-pistes et quelques synthés hors d’âge avaient suffi à la fabrication du premier album, ici ce sont quatre mois d’une intense surchauffe collective qui ont présidé à l’envol de Pigeons, bien plus sérieuse affaire que le précédent.

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Hibernation, d’entrée, donne le ton d’un disque patiemment ouvragé en laboratoire, qui expose une espèce d’electro-funk sous pression comme on le pratiquait il y a trentecinq ans chez Material ou Arthur Russell. La voix aérienne de Temple, libérée des tablatures folk, apparaît comme grisée de se laisser ainsi bousculer par des rythmiques qui ne lui font aucun cadeau.

C’est encore plus flagrant sur Collector, qui opte pour un tempo fou à la Feelies l’obligeant à courir comme un dératé sur une mélodie dopée par un crescendo de synthés vintage. Les débats se calment un peu par la suite et, une fois reposée, la musique de Here We Go Magic se déploie plus harmonieusement autour de son leader, qui s’abandonne à un chant libre parfois proche des vocalises pigeonnantes d’un Robert Wyatt (F.F.A.P., Vegetable or Native) et livre certaines des chansons parmi les plus orgueilleusement belles de son jeune répertoire (Land of Feeling, Casual).

Pas insensible non plus aux échos brooklyniens des voisins Vampire Weekend, Temple profite de l’élasticité de son groupe pour s’aventurer hors des balises occidentales, même si sa vision de la word semble plus volontiers filtrée à travers les musiques de Popol Vuh pour les films de Werner Herzog (Herbie I Love You, Now I Know en instru final) que par une intense pratique des voyages en terre inconnue.