Les Doves ont investi la salle classieuse du Manchester Apollo pour deux soirées, les 7 et 8 décembre. L’occasion de vérifier si les Doves confirment en live dans leur villes les louanges qui leur ont été adressées pour leur dernier album, The Last Broadcast.
« Il y a des matchs qui sont gagnés d’avance ». Cette pensée nous traverse l’esprit en observant l’attitude d’un public tout acquis à la cause des Doves, ce trio qui perpétue la légende des groupes mancuniens. Conformément à une tradition bien établie outre-Manche, le groupe a terminé leur tournée anglaise par un ‘homecoming’ dans leur bonne vieille ville.
Avant le concert, l’impatience du public est palpable, et nombreux sont ceux qui expriment leur désintérêt pendant la première partie, pourtant remarquable, assurée par les Ecossais de Delgados. Seul l’intervention impromptue d’un comique de télévision, Peter Kay, va captiver l’intention de la totalité du public. Après dix minutes de bons mots dans un accent du Nord redoutable, le bon Pete s’efface, le rideau se lève.
Dès les premières notes du morceau d’ouverture, Pounding, le ton est donné : les Doves jouent forts, les Doves jouent vite. Ils se révèlent être en live un vrai groupe de rock et la production sage des albums laissent ici place à un déluge de décibels. Si le rythme de la plupart des morceaux se trouve donc singulièrement accéléré par rapport aux versions sur disques, la beauté des titres n’en est pas pour autant remise en cause.
En ce sens la prestation du batteur, Andy Williams, impressionne par sa dextérité. Des chansons délicates issues du premier album comme Sea Song, The Cedar Room ou The Man Who Told Everything se trouvent ainsi transformées et acquièrent une nouvelle dimension en live. Parfois les performances vocales de Jimi Godwin ne parviennent pas suivre cet emballement, sur le titre Caught by the River par exemple, mais dans ce cas le public le seconde sans problème. Un public complètement déchaîné lorsque les Doves interprètent, à la perfection, leurs morceaux phare : Catch the Sun, Words et There Goes the Fear. Le groupe ne va s’autoriser qu’un seul titre calme, acoustique, le poignant A House, dédié au père des frères Williams, soit les deux tiers des Doves.
La prestation du groupe se voit accompagnée d’éclairages sobres et d’animations visuelles de qualité, qui illustrent parfaitement des chansons évoquant généralement l’absence, la mort, la folie. Rien de spécialement original, mais les Doves abordent ces sujets avec une telle maturité, une telle profondeur, que leur sincérité est au-dessus de tout soupçon.
La fin du concert nous surprend dans notre bonheur. Le rappel sera savouré sans modération : trois morceaux, dont les deux titres d’ouverture du premier album (Firesuite, Here it Comes) avant le déluge final intitulé Space Face. Ce titre puissant, qui ne figure sur aucun album, est une relique du passé techno de Doves (lorsque le groupe répondait au doux nom de Sub Sub), un instrumental psychédélique, parfaitement illustré par des extraits somptueux de 2001, l’Odyssée de l’Espace. Kubrick doit modérément apprécier depuis sa tombe
Le concert est définitivement terminé et il laisse le spectateur la tête dans les étoiles, avec un sentiment d’euphorie. On se surprend alors à rabâcher haut et fort des inepties, à affirmer fièrement que le rock n’est pas mort et que Manchester continue de fournir les meilleurs groupes du monde.