Retour sur trois folles nuits de concerts dans les bars de la capitale bretonne. Coups de coeur pour Chaton, Lonepsi et Julien Granel.
Pour inaugurer en fanfare les Bars en Trans, jeudi 7 décembre, on court retrouver Maestro, signé chez Tigersushi Records et habitué du festival, au 1988 Club. Hautement addictif, le trio propose un ballet rythmique electro-zinzin, qui déchaîne les premiers rangs avec ses entêtantes et répétitives punchlines à base de Méchant et I love you. Il est à peine 21 heures : la sueur est déjà sur tous les fronts des festivaliers venus en nombre pour se défouler, et les t-shirts sont trempés. Une belle entrée en matière.
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C’est l’angevin VedeTT, soutenu par la salle locale du Chabada, qui reprend ensuite le flambeau dans le même club. On passe du format dancefloor à une odyssée indie-rock plus dérangée, mais tout aussi captivante. Fidèle à son humour cynique, son leader Nerlov est plutôt du genre à se déprécier pour mieux séduire : “On va jouer Get Off The Road, dont je viens de sortir un clip assez simple et basique, on y voit ma gueule, y’a pas de paysage comme d’autres, on a pas le budget et de toute façon tout le monde le fait”. Et si son humour peut surprendre, sa voix profonde et son humeur noire, font elles l’unanimité. Les morceaux extraits de son tout dernier EP Losing All, se révéleront très largement au-dessus du reste du concert, à l’exception peut-être du seul titre chanté en français, Tuer les Gens, tiré de son précédent LP et dans la veine d’un Etienne Daho furax.
Calypso Valois et Pépite bien en place
Un peu plus tard dans la soirée de jeudi, une longue file de curieux, se fige devant La Place, l’un des spots du parcours Bars en Trans. Même si une affiche avec écrit “complet” trône sur la porte d’entrée, personne ne se décourage, tous veulent assister aux concerts prévus : Pépite et Calypso Valois. À l’intérieur, à l’étage, l’espace est rare et l’ambiance au beau fixe. La formation Pépite, protégée de la chouette maison Microqlima, est perchée sur la petite estrade qui fait office de scène. Les excentriques bonhommes bercent la foule avec leur son très frenchie, remarquablement efficace dans cette atmosphère intimiste. Les échanges avec le public sont chaleureux, au moins autant que leur groove fait monter la température de la pièce. Une sensation similaire à ce que l’on ressentait déjà, lors de leur passage à la Maroquinerie parisienne.
La suite appartient à l’une de nos favorites : Calypso Valois. Avec sa grâce habituelle et sa gestuelle spéciale, Calypso prend place sur cette scène improvisée. De sa voix douce, elle salue le public compact – déjà pendu à ses lèvres. Fidèles, ses deux guitaristes et son batteur l’accompagnent. Les titres de Cannibale se suivent avec harmonie – Le Jour, Cannibales, Méchante fille –, et tous font le même effet. Entre deux, par dessus des applaudissements soutenus, un petit groupe de blagueurs réclament une Idole fraîchement disparue : “ Johnny ! Johnny ! Johnny ! ”. Les rires se propagent, c’est réussi, mais pas suffisamment pour que Calypso se prête au jeu des reprises. La fin du show est tout aussi captivante que l’interprétation de la chanteuse, qui, dans son habit noir et brillant, aura illuminé de son passage, cette session des Bars en Trans.
Lonepsi, la révélation à la croisée entre piano, rap et chanson
Acte 2 : vendredi soir sous un crachin caractéristique de la capitale bretonne. Au même moment où les festivaliers s’agglutinent par centaines devant le bar de La Place pour tenter d’assister au showcase de la populaire bruxelloise Angèle, on file au club de La Notte. Pas de bol, là aussi c’est une cinquantaine de fans qui font le pied de grue devant la salle. On joue des coudes, tente d’amadouer le guichetier, avance de trois cases pour se glisser enfin devant la scène. Au programme, un grand timide à casquette et son clavier (amassant déjà plus de 13k de fans sur instagram) : Lonepsi. Rassemblant un public essentiellement féminin, et qui connait les paroles sur le bout des lèvres, on découvre un pianiste auteur compositeur, qui tient autant du chanteur que du MC. En guise d’introduction, il nous livre une étrange histoire : Le chien et le flacon, inspiré d’une oeuvre de Baudelaire, et reniflant tout le mal du siècle. En à peine 3 minutes, le jeune homme bouleverse et captive son audience, livrant un vocabulaire à la fois cru et poétique, moderne et lettré et dont l’indécente sincérité et la singulière façon de chanter, n’ont pas fini de faire couler de l’encre. Pour suivre la suite de ses balades désabusées, il faudra attendre la sortie de son premier album, Sans dire Adieu, le 19 janvier prochain.
https://www.youtube.com/watch?v=NSlWsajJykE
Dernier acte, samedi soir dans un vent humide à en décourager plus d’un festivalier. Le programme des Bars en Trans nous donne fort heureusement du baume au coeur et aussi pas mal de fil à retordre : les showcases s’enchaînant dans tous les rades de la ville à une vitesse impressionnante.
Chaton, la révélation
Aussi charmé qu’intrigué par son dernier clip, Poésie, on se précipite au concert de Chaton au Gatsby Club. Et on ne sera pas déçu par cette nouvelle signature du label Arista (Sony). Anciennement Siméo, ce multi-instrumentiste qui a écrit et produit de nombreux artistes variété, revient sur le devant de la scène avec un tout nouveau projet solo, à la croisée entre l’urbain, la chanson et sa pierre philosophale : le reggae. Seul avec son sound system, il n’hésite pas à balancer entre chaque chanson des détails de son parcours tourmenté, de ses déconvenues professionnelles mais aussi de ses récentes rencontres, se façonnant un personnage hyper attachant. Hyperactive, sa silhouette noire facilement reconnaissable à sa longue tignasse frisée proche d’un Tahiti Boy, va et vient d’un côté de la scène. Les lumières étant astucieusement dirigées dans l’oeil du public, il est bien difficile de percevoir son visage, rajoutant un peu de mystère au personnage. Futuriste, un brin cynique et revancharde, la chanson de Chaton claque la porte aux aprioris et aux déjà vu. Une des grandes promesses francophones de 2018.
Julien Granel met le feu à la Chapelle du Conservatoire
Nouvelle recrue des Bars en Trans, la Chapelle (salle de spectacle du Conservatoire de Rennes) a accueilli samedi soir deux jeunes pousses prometteuses : Silly Boy Blue (remarquée récemment au festival inRocKs) mais hélas loupée de peu ce soir-là, et Julien Granel. Tout de blanc vêtu, comme un guru de la pop, le jeune multi-instrumentiste bordelais a électrisé la salle. Seul derrière son bardas de synthés, de pads, de drums électroniques, le jeune virtuose déclenche ses séquences entre deux danses endiablés. Tel un homme orchestre 2.0, monté sur ressorts, il nous offre un set enthousiasmant de 30 minutes, et nous dévoile du même coup des titres de son prochain ep, dont le fameux Tant que le soleil brille. Entre pop futuriste et electro synthétique, ses mélodies immédiates sont taillées pour le dancefloor, dans la veine d’un jeune Yuksek ou de Paradis. Pas étonnant qu’il accompagne en ce moment le fameux belge Loïc Nottet sur sa tournée !
Soirée rap agitée au club 1988 : entre Montréal et Paris
Changement d’endroit et d’ambiance, direction le 1988 Live Club (lui aussi affiche complet) pour deux showcases hip-hop, animés par le MC Sopico et le collectif québécois, Alaclaire Ensemble. Dans la souterraine et sombre salle, remplie, le rappeur de la 75e session fait une entrée fracassante en envoyant ses bangers. La foule est turbulente, et alterne entre pogo et back de l’artiste. L’ambiance s’embrase lorsque son compère –membre du même collectif – Hash 24, vient l’épauler pour un bout. Puis, de nouveau seul, Sopico attrape sa guitare pour une fin de show acoustique ; un univers qu’il explore dans sa série acoustique Sopico Unplugged.
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