Chorégraphe
On a du mal à se faire une idée sur tes passions hors de la danse. Es-tu un grand consommateur de cinéma ?
A vrai dire, ça fait six ans que je ne me suis pas arrêté de travailler et je n’ai pas le temps d’aller beaucoup au cinéma. En dehors de films pas très récents comme La Vie de Jésus et La Leçon de piano que j’ai trouvés tous les deux superbes , j’ai surtout été marqué par Les Idiots de Lars von Trier. Un film qui est sans doute le contraire exact de ce que je produis des images qui bougent, des éclairages pas travaillés, tout paraît moche , et pourtant, j’ai trouvé ça très marquant. Au départ, j’y allais surtout pour voir ce que l’on pouvait faire au cinéma en utilisant la vidéo digitale, et pour me faire une idée sur la souplesse que ça apporte. Mais à l’arrivée, j’ai trouvé ce film vraiment incroyable : il va tellement au fond des choses, touche le spectateur de manière si intime, si profonde… Sinon, au cinéma, mes souvenirs les plus marquants sont sans doute liés aux films Alexandre Nevski d’Eisenstein que je considére comme une vraie leçon de chorégraphie et
Les Enfants du Paradis de Marcel Carné, en particulier pour le personnage du mime de
Jean-Baptiste Debureau…. Le passage au long métrage, ça fait dix ans que j’y pense. Mais même si j’ai plein d’idées sur le mouvement, l’esthétique, la couleur, je n’arrive toujours pas à raconter une histoire. Pourtant, petit à petit, je sens que ça vient.
Vers qui vont tes préférences en musique ?
J’ai toujours aimé un peu de tout de la musique africaine autant que les disques de Devo , mes goûts sont très éclectiques. En ce moment, je suis surtout dans les musiques de Gitans, mais j’ai aussi beaucoup écouté le dernier Bashung, Fantaisie militaire. J’adore sa poésie à tiroirs, sa profondeur. La musique de mon spectacle Shazam a été faite par le groupe La Traban, des gens que je trouve vraiment fantastiques. C’est la première fois que j’ai un groupe en live avec moi pour un spectacle, et ça apporte une tout autre dimension. Depuis le début, ils travaillent tellement en symbiose avec les danseurs qu’on ne sent plus les transitions, c’est l’une des réussites de ce spectacle… J’aime bien ce genre d’expériences qui me sortent un peu de la danse. C’est comme la pub : j’aime en faire parce que c’est un exercice de style.
Tu parles rarement de tes lectures.
Moi, je suis un physique, j’ai besoin d’activités avec des corps. Alors les livres, j’ai toujours eu un peu de mal… Je lis le journal tous les jours, c’est déjà pas si mal. En ce moment, je lis un numéro de Pour la science consacré à la symétrie dans la nature. Je travaille de plus en plus avec des miroirs, avec pour devise : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? » En lecture, ce qui a vraiment marqué mon adolescence et mon enfance, c’est la BD. J’adorais Spirou, Little Nemo, un peu plus tard le journal Pilote. Et je suis toujours admiratif devant les dessins et l’humour de Franquin.
Hors du cadre culturel « classique », par quoi te dirais-tu influencé ?
Une des mes sources majeures, c’est les voyages. Là, je reviens de trois mois au Japon où j’étais pour produire un spectacle avec le Johnny Hallyday local et j’en ai ramené des tas de sensations marquantes. Ce qui m’a le plus frappé là-bas, c’est la simplicité des choses. Que tu cherches un resto ouvert à 3 h du matin ou un accessoire, tout paraît possible et facile, sans parler du fait que dans une ville aussi immense que Tokyo, tu te sens toujours en sécurité. Une expérience extrêmement riche pour moi : je me suis fait plein d’amis au Japon et Shazam y sera présenté au printemps.
Un disque et un nouveau spectacle tous deux intitulés Shazam , le film Abracadabra bientôt diffusé sur Arte. Faut-il désormais citer la magie parmi tes influences fondamentales ?
Sans doute. Shazam, c’est effectivement une formule de magicien. Tu fais disparaître quelque chose, « Shazam », et ça réapparaît. Ce spectacle est une fantasmagorie, un mélange de choses visuelles où il est difficile de trier le vrai du faux. La danse, c’est mouvant et les apparitions/disparitions, c’est notre quotidien. Avec mon autre spectacle en tournée, Triton et les petites tritures, je me suis attaqué à la fête foraine et c’est assurément une autre qualité d’événement. J’aime cet univers unique et ça contribue une fois encore à décloisonner les genres tout en rendant le spectateur curieux.
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