Johnny Marr, guitariste d’Electronic
Y a-t-il une chanson qui a changé ta vie ?
Absolument, c’est Jeepster de T. Rex. J’avais à peine 10 ans, lorsque j’ai vu Marc Bolan chanter ce titre dans une émission télé et j’ai ressenti quelque chose de totalement inédit : ce groove, ce son, ces guitares et surtout ce personnage venu d’une autre planète me mettaient dans un état second. J’ai acheté le disque dès le lendemain et je mimais les riffs sur une guitare jouet chaque fois que je l’écoutais. La musique était très présente dans ma famille, la radio était toujours allumée et chaque semaine, ma mère s’amusait à faire des pronostics sur les classements des charts à la radio, elle aimait beaucoup les Everly Brothers. L’influence de T. Rex est très présente dans certaines chansons des Smiths, Panic ou Shoplifters of the world. Morrissey était lui aussi un inconditionnel de Bolan. Lorsque nous écrivions Panic, il était obsédé par Metal guru et voulait absolument chanter comme lui sur cette chanson. Il n’arrêtait pas de chanter sur ce disque, essayant de modifier les paroles de Panic pour qu’elles soient exactement dans le même rythme que le texte de Metal guru. Il tenait aussi absolument à ce que je retrouve le break de guitare, si bien que les deux chansons sont presque superposables. Quand j’ai eu 13 ans, mon rapport à la musique a changé, j’ai plus étudié mes disques que je ne les ai appréciés. Je les écoutais jusqu’à savoir exactement comment chaque chanson avait été structurée.
Quels sont les groupes récents qui ont le plus compté pour toi ?
Nirvana est un des groupes les plus importants de ces dernières années, l’écriture de Kurt Cobain deviendra sans doute une référence avec le temps. Sinon, j’ai beaucoup de respect pour Supergrass et The Beta Band : un groupe très représentatif de la musique actuelle, qui pousse très loin les limites du mélange des genres et sait parfaitement harmoniser différentes époques, des choses comme Can, le Velvet Underground, le rock psychédélique. En ce moment, je n’écoute pas beaucoup de nouveautés, ni de rock d’ailleurs. Je préfère me replonger dans les disques de Fela, réécouter le disque d’Ananda Shankar le fils de Ravi Shankar , un type totalement fou qui reprenait Jumping Jack flash au sitar dans les années 70. J’écoute aussi des enregistrements de jazz assez décalés.
Le cinéma occupe-t-il une place particulière dans ta vie ?
Non. Ma vie est totalement bouffée par la musique et je m’ennuie très vite au cinéma. La seule fois où j’ai vraiment tenu à voir un film, c’était pour sa musique, quand Ennio Morricone avait composé la bande originale de Mission de Roland Joffé. J’ai également aimé Southern comfort de Walter Hill, en grande partie pour la musique composée par Ry Cooder. Dans les deux cas, je me suis aperçu que seuls les bons films avaient de bonnes BO… J’ai des goûts très ordinaires, la plupart des films que j’apprécie sont américains : Altered states, un film de science-fiction où William Hurt tenait l’un de ses tout premiers rôles, Sunset boulevard de Billy Wilder, et surtout Il faut trouver le joint, un petit film désopilant de la fin des années 70, devenu culte, où deux types Cheeh et Chong joués par deux acteurs inconnus sillonnent les Etats-Unis à bord d’un camion qu’ils ont eux-mêmes construit en marijuana.
Quels sont les livres qui t’ont le plus touché ?
J’ai toujours aimé la littérature biographique, comme Les Chansons que m’apprenait ma mère de Marlon Brando ou Mes expériences de vérité par Gandhi. Je suis très friand de ce genre de bouquins et je ne m’interdis aucun auteur. En ce moment, je suis porté sur les livres de psychologie ou les essais sur la spiritualité, la religion. Non pas que je recherche mon chemin vers la foi, mais parce que les auteurs de cette littérature sont des types hors norme, qui observent le monde avec un autre regard. Je suis en train de finir Souvenirs, rêves et pensées de Jung, et je trouve ce type aussi passionnant que fascinant. Noam Chomsky m’intéresse énormément, Thomas Edison ou Gore Vidal également avec son regard à la fois plein d’amour et terriblement critique sur la société américaine. Je me suis plongé dans les livres sur la culture primitive indo-américaine, un univers extraordinairement riche. Ce genre de livre m’influence énormément, me transforme peu à peu, m’aide à sortir de ma bulle et à m’interroger sur moi-même. J’ai beaucoup appris en lisant Swami Ramdas par exemple, un contemporain de Timothy Leary qui, parallèlement à ses expériences sur les acides et les effets des psychotropes, menait des réflexions très sérieuses sur la méditation et l’hindouisme.
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