Deux mois après la sortie de son passionnant album « The Mysterious Production of Eggs », l’Américain a conquis la salle parisienne samedi 30 avril, avec un concert céleste et inventif.
On savait la musique d’Andrew Bird aérienne. On sait désormais que ses concerts ressemblent à des exercices de haute voltige. Andrew Bird a en effet démontré samedi à La Cigale sa dextérité et sa capacité à éblouir le public avec des acrobaties musicales. Après une première partie intimiste assurée par Great Lake Swimmers, le bon Andrew apparaît, sans chaussures, mais avec un costume élégamment débraillé. Il est seul sur scène, si l’on excepte Kevin O Donnell, son fidèle batteur, et un imposant bouquet de fleurs dont la couleur varie au gré des éclairages.
Un étonnant rituel précède chacun des morceaux : Andrew Bird sample en live des parties de violon ou de guitare qui vont ensuite constituer l’ossature des titres. Ce bricolage minutieux, qui pourrait apparaître fastidieux à la longue, se révèle en fait fascinant. Car on a l’impression d’assister en direct au processus de création d’une uvre, avec ses moments de grâce et ses hésitations. Comme si, entre chaque chanson, Andrew Bird retapait en vol son vieux coucou avant de faire voltiger sa musique, faite de boucles, de vrilles et de tentatives périlleuses.
Il réinvente ainsi les morceaux de son dernier album, offrant une version envoûtante de « Sovay » et une interprétation débridée de « A Nervous Tic Motion of the Head to the Left ». Le chanteur de l’Illinois réussit ensuite à reconstituer les envolées furieuses de « Fake Palindromes » et le rase-motte tortueux de « Skin is, my ».
Il est alors difficile de ne pas céder au charme d’un artiste qui chante en même temps qu’il joue du violon, qui chante divinement bien et qui siffle aussi bien qu’il chante. Le sommet du concert est atteint avec « I », titre planant issu de l’album « Weather Systems ». Andrew Bird conserve l’entêtante mélodie de ce morceau mais chamboule complètement les paroles, au point qu’il semble parfois les improviser, puis il conclut dans un souffle : « We are basically alone. »
Ce propos désabusé révèle une autre facette d’Andrew Bird, fragile et mélancolique. Au milieu de nuages devenus menaçants, il termine le concert avec des chansons un brin pessimistes comme « Action/Adventure ou Exit, une belle reprise de Dominique A, magnifiée par l’accent approximatif de l’Américain. L’atterrissage se fait donc en douceur, après seulement une heure et demie de concert. Le public applaudit à tout rompre, réclame en vain un nouveau rappel. Mais Andrew est sans doute déjà loin, survolant le sourire aux lèvres les contrées qui lui restent à conquérir.