L’orfèvre expérimentateur allemand livre un cinquième album chatoyant dont la rigueur minutieuse n’a d’égale que l’ardeur folâtre.
Entré en jeu au début des années 1990, Detlef Weinrich apparaît comme un électron éminent de la galaxie musicale allemande contemporaine, dans ses sphères les plus singulières. Membre fondateur de Kreidler, groupe phare – bientôt trentenaire – de la mouvance post-Krautrock (dont le dernier album, Spells and Daubs, est sorti en janvier 2022), il s’est aussi acoquiné avec Le Salon des amateurs, club/collectif avant-gardiste opérant au sein de la Kunsthalle de Düsseldorf. Très créatif, il façonne par ailleurs en solo depuis 2006 une palpitante electro à bas tempo, ludique et oblique, sous l’alias Tolouse Low Trax.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Récemment, ce Parisien d’adoption a également fait équipe (sous son propre nom) avec Emmanuelle Parrenin, grande dame de la scène folk alternative hexagonale, pour propulser un superbe OVNI musical, Jours de grève (2020). Enregistré en décembre 2019 à Paris, l’album – dont le titre fait référence au grand mouvement de protestation contre la réforme des retraites de 2019 – exhale un enivrant parfum de sédition poétique et semble retrouver une pleine résonance actuellement, au moment où une nouvelle fronde sociale se lève en France contre un autre projet gouvernemental de réforme des retraites…
Vaste collage de sons et de rythmes
Devenu entre-temps Parisien d’adoption, Detlef Weinrich revient sous les feux de l’actualité en cet hiver 2023 avec Leave Me Alone, cinquième LP signé Tolouse Low Trax, qui succède à Jumping Dead Leafs? (2020). Vaste collage de sons et de rythmes, agencé avec autant de dextérité que de sensibilité, l’album explore un espace musical inclassable en mutation constante. S’y entrechoquent notamment electronica, dub, Krautrock, musique concrète, techno minimaliste et (par discrètes volutes éparses) spiritual jazz.
Quelques parties vocales enrichissent un ensemble majoritairement instrumental. L’Italienne Andrea Noce, alias Eva Geist, traverse ainsi en beauté l’ondulant Non Giudicare et le puissant Ossia, dans lequel elle profère un texte politique de Pier Paolo Pasolini. Ajoutant ici un nouvel élément impeccable à sa discographie, Tolouse Low Trax – proche d’autres précieux intrépides laborantins teutons tels que Mouse on Mars, Guido Möbius ou Burnt Friedman – démontre une fois encore avec éclat l’originalité foisonnante de son univers sonore.
Leave Me Alone (Bureau B/Bigwax). Sortie le 27 janvier.
{"type":"Banniere-Basse"}