Avec un nouvel album (Dear John, sortie le 9 mars) qui vient conclure une série de cinq, le Suédois Loney, Dear nous installe confortablement chez lui, tout en préparant ses valises pour de nouvelles aventures.
Avoir en face de soi la bonne bouille suédoise d’Emil Svanängen – l’homme qui se cache derrière Loney, Dear – c’est presque la certitude de gagner quelques foutus mois d’espérance de vie. La dernière fois on s’en souvient bien, c’était en 2007 : une année dure, épuisante, durant laquelle le jeune gars Emil nous avait tenu à bout de bras, avec deux albums d’une beauté indiscutable : Loney, Noir et Sologne.
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Deux disques d’où la lumière surgissait avec une élégance rare ; deux chef d’œuvres de poche que l’on ne savait pas forcément issus d’une œuvre construite en plusieurs volets, entamée en 2003 par The Year of River Fontanta et Citadel Band (qu’on s’échange sous le manteau de pluie sur l’internet, rejoignez vite le club). Et c’est avec le cinquième et dernier essai de ce continuum pop que le gars Emil nous revient en 2009.
Rendez-vous nous a été donné au Centre Culturel Suédois. « Il est tout en haut », nous dit-on en nous montrant un escalier, qu’on grimpe alors quatre à quatre. On ouvre l’unique porte, et l’enérgumène est là, souriant et en chaussettes sur le canapé, une guitare à la main. Il n’a pas compris que cette pièce cossue n’est pas un genre de « truc témoin » réservée aux interviews d’artistes suédois en goguette ; mais bel et bien le salon/salle-à-manger du conseiller culturel suédois himself.
« De toute façon je ne comprends pas très bien ce qui m’arrive depuis deux ans », explique-t-il en ouvrant une porte et en explorant en silence l’appartement habité, un doigt devant la bouche. Puis il revient vers son canapé, se rassoit et prend la parole. « Ce disque a été enregistré dans la foulée de la dernière tournée, après seulement quelques mois de repos. Je savais que l’album allait conclure une saga de cinq tomes. J’avais envie d’en finir mais je n’avais, pas envie en même temps, tellement ces disques ont été un refuge pour moi. L’écriture et l’enregistrement du disque ont été des moments assez compliqués et doux à la fois », explique lentement Emil, avec son sourire d’ange.
Et c’est ce que l’on ressent en écoutant Dear John, parfait disque d’entre deux, à l’ambiance à la foie enjoué et cotonneuse, posée d’emblée par Airport Surroundings, fantastique morceau d’ouverture comme le gars Emil sait lui seul en écrire (réécoutez pour en être convaincus les titres frontispice des deux albums précédents, I Fought the Battle of Trinidad & Tobago et surtout le bouleversant Sinister in a State of Hope). Après pas de révolution sur ce cinquième essai de Loney, Dear, et on ne s’en plaindra pas : les mélodies sont toujours d’une limpidité déconcertants, les textes à la fois naïfs et d’une force diabolique, et le tout d’une luminosité complètement inouïe.
L’écoute d’I Was Only Going Out ou de Summers, probablement les deux meilleurs morceau du disque, vous laissera totalement hagard, les yeux et tout le reste du corps un peu dans le vide, défaisant à mesure des écoutes cette petite boule qui sert parfois au creux du ventre.
Sans emmener Emil Svanängen beaucoup plus loin qu’il n’était auparavant – c’est-à-dire déjà assez haut -, Dear John place pourtant à sa façon notre homme de Suède sur de nouveaux rails : en offrant la plus belle des conclusions à son échappée en cinq volumes, tout en faisant place nette pour ses aventures à venir.
Le morceau éponyme Dear John, sorte de valse d’adieu offerte au héros discret que fût Svanängen tout au long de ces cinq volumes, en est d’ailleurs en le plus beau témoignage : pour Loney, Dear, le meilleur est encore à venir.
Dear John (Delabel/EMI)
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