L’Australian Pink Floyd Show a fait escale à la Manchester Academy le 24 novembre. L’occasion de s’intéresser à un groupe quasiment inconnu en France, qui fait partie de la légion des « tribute bands » qui parcourent toute l’année les routes du Royaume-Uni.
On connaissait les Bootleg Beatles, des Stairway to Zeppelin ou des Complete Stones Roses. A chaque fois la recette est la même : de bons musiciens pallient leur manque d’inspiration en se spécialisant dans les compositions d’un groupe qu’ils vénèrent. Le but avoué des tribute bands est de toucher la fibre nostalgique du spectateur, en jouant des morceaux censés être très proches des compositions d’origine, considérées comme indépassables. Le spectateur passe le plus clair de son temps à fermer les yeux, il s’imagine être à l’écoute de groupe original et cherche à se persuader que « pour un peu, on s’y croirait ».
Les Australian Pink Floyd tournent depuis maintenant plus de quinze ans et ils ont acquis une certaine réputation, notamment après avoir joué à Glastonbury et au Royal Albert Hall. Dans le milieu très fermé des « tribute bands » consacrés aux Floyd, ils sont souvent présentés comme les plus crédibles, en comparaison à d’autres groupes du même type comme les Think Floyd, les Pink Noise et autres Pink Voyd’
Comme leurs grands frères, les Australian Pink Floyd ouvrent leur show avec Shine on you Crazy Diamond. Le son est tout à fait correct et on est agréablement surpris par les animations visuelles qui reprennent l’imagerie des vrais Pink Floyd, en y intégrant parfois’ des kangourous pour rappeler l’origine australienne de ce tribute band. Mais dès la fin de ce morceau d’ouverture, on perçoit les limites des Australian Pink Floyd : le nombre réduit de musiciens les condamnent à certaines transgressions (le saxophone de Shine on’ est ainsi remplacé par des arrangements au synthétiseur) et les parties vocales se révèlent plutôt décevantes.
Les différents membres du groupe s’y essaient pourtant chacun à leur tour, le bassiste s’attelle aux morceaux chantés par Roger Waters, tandis que les deux guitaristes se partagent le reste des titres. Mais les progrès sont évidents tout au long du concert et on finit par s’habituer à ces nouvelles voix.
Le show des Australian Pink Floyd dure deux heures et demi et propose un condensé de ce qui peut ressortir de meilleur comme de pire dans un concert d’un tribute band. Le groupe est ainsi peu convaincant quand il s’attaque à des morceaux aux arrangements complexes, tels Learning to fly, Set the controls for the heart of the sun et surtout Echoes.
On comprend mal pourquoi les Australian ont pris le risque de jouer ce titre mythique, dans une version qui se trouve privée des fameuses trente secondes d’open tuning, un des bijoux d’Echoes.
On est aussi surpris par la structure de la set-list, qui passe d’Arnold Layne (1967) à High Hopes (1994) ou de Set the controls’(1968) à Sorrow (1987).
En revanche, les Australian Pink Floyd réussissent à nous surprendre agréablement en sortant des sentiers (ra)battus par les vrais Floyd lors de leurs dernières tournées, en jouant des morceaux plutôt méconnus comme Arnold Layne, The Fletcher Memorial Home ou Sheep, magistralement restitué. Et l’interprétation de chansons peu estimées comme Sorrow ou What do you want from me ?, suscite l’enthousiasme car ces titres sont joués avec une réelle passion. Enfin la version quasi- parfaite du périlleux The great gig in the sky, est un moment de pur bonheur grâce à une talentueuse choriste.
Le show se termine avec deux morceaux souvent présents dans les rappels des Pink Floyd : Wish you were here et Comfortably Numb, dont le solo magique est très bien interprété. Les Australian Pink Floyd réussissent donc leur pari en évitant la plupart du temps de tomber dans la parodie. Ils constituent une alternative crédible pour le fan des Pink Floyd qui n’a jamais vu son groupe favori en concert. Et qui ne le verra sans doute jamais, vu les récentes déclarations de Dave Gilmour à ce sujet.
Ainsi, si les Pink Floyd n’existent plus, la légende du groupe a encore de beaux jours devant elle.