Le duo canado-américain s’est aventuré au Mexique pour écrire cinq morceaux à la croisée du politique et de l’intime.
Si Efrim Manuel Menuck est devenu une icône de la musique indépendante, c’est bien malgré lui. Membre fondateur des groupes Godspeed You! Black Emperor et A Silver Mt. Zion, il a eu à cœur depuis ses débuts, en 1994, de prôner l’effacement de l’individualité au profit du collectif. Chantre d’une musique à équidistance de la politique et du mystique, il aura finalement sauté le pas du travail en solo au début des années 2010.
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Son second album, Pissing Stars (2018), a défini un nouveau terrain sonique, plus romantique que celui de ses précédents projets. C’est pour recréer sur scène ce disque qu’il a fait appel à Kevin Doria. Membre de Growing, trio culte de la scène drone américaine, le guitariste a peu à peu fait son nid dans l’univers du Canadien.
Mexico City, terre d’inspiration
Partis ensemble à Mexico City, ils ont composé rapidement à quatre mains. Dès le morceau introductif, Do the Police Embrace?, on est plongé à leurs côtés dans la nuit mexicaine, tailladée par les sirènes, celle d’une police qui frappe un peu partout dans le monde et qui agit comme la main de gouvernements en voie de totalitarisation. Le grand talent d’Efrim Menuck a toujours été d’amener le politique dans une musique de l’intime, et ce disque n’y fait pas exception.
Ici, les compositions ambient prennent un cheminement épique, voire presque chevaleresque. Si Pissing Stars trahissait un amour pour Nebraska (1982) de Bruce Springsteen (autre modèle d’album politique et humaniste), cette nouvelle collaboration rappellera la touche de Brian Eno, notamment pour son travail avec Kevin Shields (My Bloody Valentine) sur le titre Only Once Away My Son sorti en 2017.
La voix d’Efrim Menuck, au vibrato si caractéristique (qui résonne souvent comme une contrepartie dramatique à celle de Panda Bear), agit comme un phare dans ces morceaux aux structures évolutives. Cinq plages, abordées par les deux musiciens comme autant de prises de paroles survivalistes, restent baignées d’une énergie positive, à l’image de la profession de foi Fight the Good Fight ou du conclusif We Will. De petites gouttes acides d’espoir jetées à la face de la société capitaliste.
Are SING SINCK, SING (Constellation Records/Differ-Ant)
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