Le projet choral d’un démiurge pop de Manchester, The Whyte Horses, se précise sur un deuxième album jubilatoire.
Soudainement, dans la conversation, Dom Thomas balance le nom d’Hubert-Félix Thiéfaine, et le titre d’un morceau particulièrement groovy baptisé L’Agence des amants de madame Müller. C’est dire si le cavalier en chef de The Whyte Horses est allé fureter plus loin qu’il est humainement supportable dans les tréfonds de la pop et du rock français.
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Ne pas rester dans la contemplation
Dans une vie précédente, Thomas a fondé avec Andy Votel l’indispensable label de rééditions Finders Keepers, qui fit notamment remonter en surface des trésors hexagonaux tels que L’Enfant assassin des mouches de Jean-Claude Vannier ou Le Monde fabuleux des Yamasuki, l’un des projets du père de Thomas Bangalter, Daniel Vangarde. Ancien DJ house, vendeur de disques et digger fou de vinyles exotiques, Dom Thomas se retrouve un jour pluvieux assis au volant, dans une voiture à l’arrêt sur un parking de Manchester. “Dans cette situation assez sinistre, j’ai décidé de me mettre à écrire des chansons. Si je n’y parvenais pas, je changeais de métier et j’abandonnais la musique pour toujours.” Imbibé jusqu’à la moelle des sons et du génie de ceux qu’il admire depuis l’enfance, il veut traverser le miroir à son tour, ne pas rester dans la contemplation, apporter sa touche personnelle à la grande fresque qui lui sert de décor mental. Aidé par Jez Williams des Doves, il enregistre les morceaux qui termineront sur Pop or Not, premier album de Whyte Horses (avec un y comme chez les Byrds ou les Cyrcles, coquetterie psyché pour initiés).
Une certaine forme de pureté élégiaque
Avec une chanteuse française, Julie Margat (Lispector), et la contribution de Ian Parton de The Go! Team sur quelques titres, Thomas esquisse déjà sa vision spectrale d’une pop sixties réinventée, lorgnant vers nos yé-yé les plus stylés, la pop brésilienne et les chorales de gamins, une version alternative de l’album étant d’ailleurs enregistrée avec le St. Barts Choir en hommage au Langley Schools Music Project des années 1970. Deux ans plus tard, Empty Words élargit encore le spectre, avec d’autres voix frenchies (Audrey Pic et Mélanie Pain de Nouvelle Vague) ou encore La Roux, sur une reprise irrésistible d’un titre obscur des folkeux californiens Thorinshield (The Best of It).
Ian Parton, encore lui, a coécrit la chanson-titre, et comme chez The Go! Team on assiste à la réalisation d’un fantasme syncrétique éblouissant, nourri d’influences northern soul, de sunshine pop, de langueur velvetienne, de candeur à la Abba, d’un soupçon de new-wave, le tout mixé dans un shaker à forte teneur en vitamines.Pendant qu’il écrivait les chansons exubérantes de son album, Dom Thomas regardait la saison 3 de Twin Peaks, dont il a tenté de siphonner l’esprit baroque, les entrechocs sensoriels et une certaine forme de pureté élégiaque particulièrement marquante sur le sublime Fear Is Such a… Si Lynch donne une suite à son chef-d’œuvre, on ne serait guère étonné de voir The Whyte Horses chevaucher les planches du Bang Bang Bar. Pour une reprise de Thiéfaine ?
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