Lundi 7 juin, Arcade Fire donnait un concert surprise à Sherbrooke, à plusieurs centaines de kilomètres de Montréal. Nous y étions.
Sherbrooke est une ville moyenne située dans les cantons de l’Est du Québec. Même quand on aime beaucoup le Canada, on n’y vient que très rarement. C’est pourtant ici qu’Arcade Fire a choisi de venir tester, sur deux dates (7 et 8 juin), son troisième album The Suburbs.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
L’annonce des concerts a eu lieu il y a quelques jours à peine. Mais le Théâtre Granada de Sherbrooke affiche évidemment complet. Devant la salle, la queue est immense – elle va presque jusqu’au bout de la rue. On pénètre à l’intérieur assez vite. L’excitation est totale. Les gens vont et viennent, se collent des petites bourrades.
Arcade Fire nous a pourtant habitués à ce genre de concerts surprise: en 2007, le groupe avait déjà investi l’Eglise Saint-James de Londres en mode commando pour l’avant-première de son deuxième album, Neon Bible. L’expérience avait été phénoménale. On attend beaucoup de celle-ci.
Win Butler à l’iroquoise
A quelques minutes du début du concert, on avance à l’intérieur du théâtre. Personne n’ose vraiment parler. Les instruments sont posés sur scène. Le public trépigne un peu. Les lumières s’éteignent très vite. Le groupe déboule par le côté gauche, Win Butler en tête.
Il a une coupe un peu iroquoise sur les bords. Régine Chassagne le suit, ses cheveux à elle ont poussé. Ceux de Richard Parry le rouquin aussi. Will Butler le petit frère de Win, semble à son poids de forme. Le guitariste Tim Kingsberry n’a pas bougé. Le batteur Jeremi Gara a un peu plus de barbe. La violoniste Sarah Neufeld est toujours aussi jolie.
Le grand Butler s’assoit derrière un clavier, et lance, avec Régine à la batterie, l’un des premiers morceaux à avoir été donné en streaming sur le Net, The Suburbs. Dès ce premier titre, qui évoque les Cars, Arcade semble très déterminé. Butler chante avec une certaine grâce, le reste du groupe est très concentré. Le public, qui ne sait pas trop à quoi s’attendre, est pour le moment encore un peu timoré.
Puis c’est au tour du plus classique Keep The Car Running de prendre la suite, avant que Les Montréalais ne jouent deux morceaux nouveaux, Ready to Start et Rococo, qui nous donnent de sacrées indications sur l’album à venir.
Un son plus rock
Arcade Fire semble avoir délaissé un peu les ambiances cathédralesques pour un son plus rock. Il n’est pas rare de voir les claviers complètement abandonnés au profit des guitares (parfois trois), des basses et des batteries (jusqu’à deux simultanées). Le public semble adhérer largement à cette formule plus directe.
Le groupe joue toujours aussi énergique, mais le son semble bien plu sec, plus rêche. On pense parfois au Springsteen de la fin des années 70, ou du début des années 80. Les versions de No Cars Go et d’Haïti sont tout simplement époustouflantes de justesse : Arcade Fire est en tension, ne laisse rien au hasard. Tout est joué au plus près de l’os.
Sur Haïti, Régine Chassagne se laisse aller à sa traditionnelle danse de Saint-Guy, tandis que Win Butler, qui apparaît plus que jamais en chef de bande, termine lui le morceau debout sur une caisse, un peu au-dessus des autres. La foule est en délire.
Butler lance immédiatement un nouveau morceau, Modern Man, très Talking Heads dans l’âme, avant d’enchaîner sur une version héroïque de Neighborhood #2 qu’il doit interrompre brièvement pour cause de petit fou rire (le stress certainement). A la fin du morceau, c’est tout Arcade Fire qui se check dans la bonne humeur et semble revivre ses heures les plus glorieuses.
Sérieux et concentré, le groupe semble prendre plus de plaisir que lors de la tournée qui suivit le premier album. Les choses ont l’air plus fluides. Régine Chassagne multiplie les grimaces derrière sa batterie ou son clavier. Will Butler le petit frère semble lui avoir retrouvé sa folle envie de faire l’andouille, et c’est bon signe : vêtu d’une chemise à carreau, il saute sans arrêt sur lui même et tape sur tout ce qui lui passe entre les mains.
Bis mercredi
Le public ne s’y trompe d’ailleurs pas. La première heure de concert s’achève dans une ambiance assez démente, et Win Butler quitte la scène avec un immense sourire – c’est assez rare pour être signalé.
Month Of May, découvert sur le Net il y a quelques jours, vient ouvrir un évident rappel. Il est joué sur un mode quasi punk. Tout comme Rebellion (Lies), dont les Montréalais livrent une version très rock qui fait vaciller le Granada. Le public refuse de se séparer d’Arcade Fire, et entonne le refrain du dernier morceau jusqu’à ce que le groupe revienne pour un Wake Up acoustique et syndical qui vient conclure le concert, tout en offrant une certaine épiphanie à Sherbooke où le retour d’Arcade Fire en aura laissé plus d’un sur les fesses.
Mercredi, les hommes (et les femmes) de Win Butler devraient jouer sur un parking des alentours de Montréal, dans un endroit qui sera connu au tout dernier moment. Nous y serons très certainement.
Photos: Audrey Cerdan
{"type":"Banniere-Basse"}