Sorti vivant et apaisé de l’effondrement d’House Of Love, Guy Chadwick revient avec un album de vieux sage. Avouons-le. Ce soir-là, au dernier Festival des Inrocks, on s’est piteusement défaussés. Coincé entre Stereophonics, Mogwai et Jay-Jay Johanson, Guy Chadwick faisait carrément pitié : un peu cloche qui tape l’incruste, un peu pote à qui on […]
Sorti vivant et apaisé de l’effondrement d’House Of Love, Guy Chadwick revient avec un album de vieux sage.
Avouons-le. Ce soir-là, au dernier Festival des Inrocks, on s’est piteusement défaussés. Coincé entre Stereophonics, Mogwai et Jay-Jay Johanson, Guy Chadwick faisait carrément pitié : un peu cloche qui tape l’incruste, un peu pote à qui on fait l’aumône d’une prestation, très loser, avec sa tronche ruinée, sa petite guitare et ses chansons pulvérulentes qui, tout juste chantées, se dispersaient dans l’air épais saturé d’indifférence , comme ces fleurs de pissenlits fanées sur lesquelles les enfants soufflent à la fin de l’été. Ça sentait la page mal tournée on garde tous en mémoire la débandade finale d’House Of Love, cette épitaphe floue d’une carrière tristement lumineuse , le ressac d’inspiration, l’affaire entendue, l’impasse. Ce soir-là, on avait tout faux. Simplement, on jaugeait l’homme à l’aune d’un concert où il n’avait pas sa place. Il aurait fallu un show-case, quelque chose d’intime et d’exclusif. Cinq ans d’absence, cinq longues années de silence et de repli sur soi, ça n’incline pas à la foule, aux contingences du temps, de l’ego et du bizness, toutes notions qui précipitèrent House Of Love dans la tombe, toutes notions singulièrement absentes de Lazy, soft & slow.
Un disque bête comme chou, con et beau comme la lune, à prendre au premier degré, un disque de musique paresseuse, douce et lente c’est marqué dessus. Guy Chadwick ne se cache plus : ni derrière un groupe ni derrière un son, un look ou des états d’âme déplacés. Fini de se prendre la tête, à savoir s’il est un génie ou quelque chose d’approchant. Aujourd’hui, il livre des chansons comme d’autres le lait, au saut du lit, fraîches, à peine écrites et déjà enregistrées, avec un peu de batterie, d’orgue, de piano, d’accordéon et de pedal-steel autour, pour faire joli. Des chansons arrêtées, en ce sens qu’elles ne font avancer que celui qui les a composées, l’auditeur n’y gagnant, au final, qu’un peu de bonheur en plus.
A l’image de Robert Forster, Grant McLennan ou Peter Astor, Guy Chadwick affiche désormais la dégaine du songwriter pur et dur, ce qui lui vaudra toujours l’estime de ses pairs, éventuellement celle de ses voisins, à défaut, peut-être, de la reconnaissance de ses fans d’antan. Tant pis pour eux. Sur Song for Gala, drôle de mambo chaloupé, Guy Chadwick chante presque aussi mal qu’un Leonard Cohen jeune, c’est-à-dire divinement bien. Le reste est à l’avenant. One of these days susurre, dans la pénombre, quelques notes d’évidence, This strength dévide, comme dans un songe, une mélodie fouisseuse, pénétrante. Modeste composé de pop, de folk et de country vendu tel quel, sans vernis, sans rien qu’une prenante sincérité, Lazy, soft & slow liquide sans complexe l’héritage d’House Of Love et s’offre, en sus, une virginité toute neuve. Avec ce disque, peu soucieux de marquer son époque, Guy Chadwick s’inscrit simplement dans l’éternité. Pas sûr qu’il (et qu’on) y perde au change.
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