Compagnon de tournée de Pulp et songwriter sensible, Richard Hawley sort enfin de l’ombre avec un premier album désuet et charmant. Richard Hawley est un garçon sensible, il pleure quand il entend Johnny Cash chanter I See a Darkness. Il pourrait pourtant briller en société, fanfaronner qu’il a joué avec Robbie Williams ou Nellee Hooper […]
Compagnon de tournée de Pulp et songwriter sensible, Richard Hawley sort enfin de l’ombre avec un premier album désuet et charmant.
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Richard Hawley est un garçon sensible, il pleure quand il entend Johnny Cash chanter I See a Darkness. Il pourrait pourtant briller en société, fanfaronner qu’il a joué avec Robbie Williams ou Nellee Hooper et tourné avec Perry Farrell, Pulp, Finley Quaye… Lui qui a mis pendant des années sa musique au service des grandes gueules aurait pu, dans un délire schizophrène, se prendre pour eux, reprendre à son compte les chansons des autres, faire son Fantôme de l’Opéra.
Mais Richard Hawley est un tendre, avec « un cœur plus grand que l’ego », dit-il. Lui qui s’était fait un petit nid douillet à l’ombre des autres a pourtant finalement été obligé de se faire violence : il s’est hissé seul sur le devant de la scène. La force de conviction d’amis connaisseurs comme Jarvis Cocker qui l’ont convaincu de la grâce de sa voix ont eu raison de sa modestie. « Si on commence à faire de la musique pour avoir du succès, c’est qu’à la base, on est déjà un loser. Mon ambition, c’était d’être un bon musicien, de bien jouer de la guitare. Je n’ai jamais fait de disque solo avant, parce que je n’ai vraiment pas de problème d’ego. »
Les idées de chansons qui mûrissaient en lui depuis des années ont été concrétisées en treize jours : toute l’humilité et la simplicité de Richard Hawley se retrouvent dans Late Night Final. Le dépouillement des ballades, la sobriété des arrangements font une place confortable à cette voix magnifique, à ce timbre trop profond, trop sérieux, pour être contemporain. Car la première fois qu’on entend Late Night Final, on croit être en possession du trésor caché d’un crooner inconnu des années 50. Ses idoles n’ont d’ailleurs pas grand-chose de contemporain. Venu à la musique par son père qui avait plus de 4 000 disques à la maison, Richard Hawley possède une culture musicale vaste, avec une préférence pour les vieux bluesmen Bill Monroe, Howlin’ Wolf, Skip James , les ancêtres du rock Eddie Cochran, Buddy Holly , les papys de la folk et les pépés de la country Sanford Clark, Lee Hazlewood, Hank Williams. Quand il dit s’intéresser aux « trucs modernes », il cite Orange Juice, Jesus & Mary Chain, Echo & The Bunnymen. « Si mon album est démodé, je m’en fous. Je préfère être moi que Limp Bizkit. Ma musique a un côté désuet. Ce n’est pas que je regrette les choses du passé, c’est malsain, mais je ressens toujours un peu de nostalgie, un truc sentimental. »
Même s’il a fait six fois le tour du monde avec ses amis plus connus que lui, Richard Hawley reste attaché à Sheffield, son étrange ville natale, cimetière sidérurgique dont il parle avec attendrissement. « Les photos de la pochette de mon disque sont toutes des photos d’endroits de Sheffield où j’avais l’habitude d’aller, où je vais encore. Maintenant, la vieille culture de la ville se perd et avec mon album, j’ai essayé de capturer tout ça avant que ça ne disparaisse complètement. Par exemple, il y a une photo d’un café où ma mère m’emmenait le samedi. Je sais que ce café va être démoli d’ici un an… C’est une honte, j’ai tous mes souvenirs d’enfance là. » Des soucis d’un autre temps : même impliqué dans la scène musicale d’aujourd’hui, Richard Hawley paraît en même temps complètement inadapté au xxie siècle. Par sa gentillesse, par son naturel, par ses chansons en adéquation avec son personnage, Richard Hawley est désuet. Un modèle de musicien qu’on ne fabrique plus, un vrai romantique, une belle erreur spatio-temporelle. Robbie Williams, avec ses reprises en carton de Sinatra, ferait mieux de laisser tomber le costume Capitol : un de ses anonymes musiciens le porterait avec plus de grâce et d’authenticité.
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