Producteur de rap prodige et pillier de la scène electro française, DJ Mehdi
est mort accidentellement la semaine dernière, à Paris. Il avait 34 ans : hommage.
Il était né à Asnières, dans le 92, en 1977. A 14 ans, il couchait ses premiers instrumentaux hip-hop sur cassette, pour le compte d’un des groupes mythiques du rap français, Ideal J (auquel appartenait aussi Kery James). “J’enregistrais des rythmiques sur une première cassette que je repassais en ajoutant des boucles, et je réenregistrais le tout sur une deuxième cassette : c’est un système que j’avais trouvé pour me passer de sampler”, expliquait DJ Mehdi aux Inrockuptibles en mars 2002, à l’occasion d’un numéro dont il faisait la couverture pour la sortie de son premier album solo, (The Story of) Espion.
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Mehdi Favéris-Essadi, c’était son nom, était un petit génie, l’un des enfants prodiges de la musique française. Son parcours inspirait le respect. Il s’est achevé tragiquement le 13 septembre, chez lui, après l’effondrement accidentel d’un puits de lumière en Plexiglas. Agé de 34 ans à peine, Mehdi était un musicien hors pair, une pointure du milieu hip-hop, passé, avec une grâce inouïe, et son humilité coutumière, du côté de l’electro.
Après avoir produit des instrus pour le gratin du rap français (Idéal J donc, avec deux disques dingues, Original MC’S sur une mission en 1996 et Le combat continue en 1998, mais aussi 113 pour qui il produisit Les Princes de la ville en 1999, Mafia K’1 Fry – de Karlito à Manu Key en passant par Kery James –, Rocé, Akhenaton et Booba – à qui il offrit sans doute l’une de ses meilleures prods, Couleur ébène), Mehdi s’était en effet progressivement tourné vers les machines et l’électronique.
Son album (The Story of) Espion, publié sur le label Espionnage qu’il avait lui-même fondé, était le symbole de cette avancée irréversible. On y entendait encore des beats hip-hop, on y découvrait Diam’s, certes, mais Mehdi semblait surtout avaliser sur ce disque sa conquête electro à venir.
C’est d’ailleurs sur Ed Banger, le label de son ami Pedro Winter, qu’il sortit en 2006 son deuxième essai, Lucky Boy, avant de réaliser de nombreux singles et mixtapes ainsi que le récent projet Carte blanche en 2010 – un hommage à la house de Chicago qu’il partageait avec l’Anglais Riton. Avec Zdar et Boombass de Cassius (qu’il connaissait depuis l’époque MC Solaar), mais aussi Justice, Mehdi appartenait au prestigieux Club 75 et représentait l’electro parisienne dans le monde entier.
Jamais flambeur, Mehdi était un passionné, un érudit. L’un des rares avec qui vous pouviez évoquer NTM, Miles Davis, Jay-Z, Cream, Marvin Gaye ou John Lennon dans la même discussion sans passer pour un extraterrestre. “Je suis chanceux : j’ai la capacité d’être ému et touché par des musiques différentes”, expliquait-il aux Inrocks en 2002. Cette chance était surtout la nôtre. La disparition de Mehdi, aussi tragique que brutale, va certainement nous le faire comprendre encore plus dans les mois et les années qui viennent. Mehdi laisse derrière lui une oeuvre irréprochable, et un trou béant dans la musique d’ici.
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