Trois ans après l’enchanteur Green Juice, Papooz revient avec un nouvel écrin sensuel qui revisite avec brio les seventies.
Convoquant avec humour la figure du producteur machiavélique, tel Swan incarné par Paul Williams dans Phantom of the Paradise (1974) de Brian De Palma, c’est tout un imaginaire musical et cinématographique qui nous est dévoilé par Papooz dès la pochette de Night Sketches. A l’écoute des douze tribulations crépusculaires qui le composent, on imagine aisément une session nocturne embrumée par la clope dans l’un de ces studios seventies aux allures de vaisseau spatial. Un fantasme de rock-stars dégingandées que le duo formé par Ulysse Cottin et Armand Pénicaut incarne dans le clip de You and I, envoyé en single éclaireur, et qui cristallise à la perfection les fantasmagories qui nourrissent Night Sketches.
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Extérieurs nuit
Très prégnante au fil du disque, cette imagerie n’a rien d’un hasard. Si le précédent Green Juice (2016) s’envisageait davantage comme une collection de chansons accumulées au fil des années, Night Sketches est, de l’aveu même de ses auteurs-compositeurs-interprètes, un album moins composite et plus cérébral. Née d’un travail mental préalable, mais sans véritablement jouer la carte de l’album-concept, cette seconde livraison baigne dans un magma enveloppant faisant le pont entre les seventies et les eighties. Un écrin imaginé en étroite collaboration avec l’encyclopédique Adrien Durand, tête pensante de Bon Voyage Organisation.
Un renfort de poids qui permet au tandem d’assouvir ses fantasmes musicaux avec une ampleur inconnue jusqu’ici. Exit, donc, les mélopées douces et solaires, presque lo-fi, de Green Juice. Sur Night Sketches, les ambiances se font plus brumeuses ; les synthés, plus présents, et les basses, plus sensuelles. Portées par cette production mirifique, les évidences mélodiques de Papooz rappellent fatalement celles de Todd Rundgren et Steely Dan, tout en les télescopant à la synthpop du début des années 1980. Evitant le piège de l’hommage trop appuyé, Night Sketches s’impose comme un album enlevé, déjouant la pesanteur de ses aînés avec morgue.
Précis pop
Sans mettre à mal la cohérence à toute épreuve du disque, Papooz se montre capable de mobiliser des influences hétéroclites parfois incongrues. Avec une facilité déconcertante, les voix androgynes d’Ulysse Cottin (le brun) et Armand Pénicaut (le blond) se meuvent sur des productions graciles qui s’autorisent des incursions ska (Undecided), des accès de tropicalisme, saxophone à l’appui (Let the Morning Come Again et son introduction de science-fiction), mais aussi des morceaux plus classiques (l’imparable ouverture You and I et Theatrical State of Mind).
Ce qui fascine chez Papooz, ce n’est pas tant ce superbe vernis qui recouvre brillamment Night Sketches, mais bien cette science infaillible de la pop music. Avec leurs riffs en cascade, leurs lignes de basse lascives, leurs refrains à tomber, les croquis nocturnes de Papooz prennent vie d’une manière saisissante. Des croquis qu’il s’agira d’éprouver en toutes circonstances lors de chaudes nuits d’été.
Night Sketches (Half Awake/PIAS)
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