Alors que sort en kiosque notre hors-série Electro et que vient de s’ouvrir à la Philharmonie de Paris l’exposition Electro, de Kraftwerk à Daft Punk, une sélection de deux fois 75 pistes d’un courant qui aura longtemps été alternatif.
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Afrika Bambaataa Planet Rock (1982) Double dose de Kraftwerk dans le Planet Rock du père de la Zulu Nation qui assoit Trans-Europe Express sur le rythme de Numbers. Dusseldorf s’invite en force dans le Bronx et participe aux fondations du hip-hop. Sample et funky
Kraftwerk Autobahn (1974) Le mythe fondateur de tout un pan de la musique électronique est né d’un concert de Karlheinz Stockhausen auquel assistent sous LSD Florian Schneider-Esleben et Ralf Hütter. De cette performance naîtra leur LSD Soundsystem qui permettra aux auteurs de Radioactivity d’irradier des décennies de musique électronique.
Can I Want More (1976) Dans la roue de ceux qui écriront Tour de France en 1983 (un des deux remportés donc par Laurent Fignon), naît le krautrock, terme dédaigneux forgé par la presse britannique pour ce mouvement aux influences multiples, où se mêlent le funk et la froideur, l’électronique et l’électricité, comme en témoigne à merveille ce I Want More de Can.
Neu ! Hallogallo (1972) Neu ! et intéressant comme on disait à l’époque d’Actuel qui, en plus d’accompagner la sono mondiale et le rap naissant, sera un des premiers promoteurs de la musique électronique en France. Ici, un morceau hypnotique qui développe en dix minutes tout l’esprit de ces nouveaux sons d’outre-Rhin qui font aussi bouger les hanches. Et pour prolonger encore le plaisir, retrouvez ici l‘interview du cofondateur de Neu!, Michael Rother, donnée en mars dernier aux Inrocks.
https://www.youtube.com/watch?v=5DDEl7JnWvo
Jean-Michel Jarre Oxygène, Pt. 4 (1976) Pendant ce temps en France, on teste la puissance de ses chaînes hi-fi grâce aux atmosphères de Jean-Michel Jarre, élève assidu de l’IRCAM auprès des trois Pierre angulaires (Schaeffer, Henry et Boulez) dont il retient les leçons pour obtenir un carton mondial avec cette boufée d’Oxygène d’avant les marches pour le climat.
Pierre Henry Psyché Rock (1967) Des trois Pierre angulaires de l’IRCAM, seul Pierre Henry décrochera un énorme tube à son grand dam. Eternel explorateur de sons et de fréquences, il sera en effet souvent réduit à ce seul titre, écrit avec Michel Colombier pour la Messe pour un temps présent de Maurice Béjart aux échos très Louie Louie, et qu’on retrouvera sous-jacent chez Fatboy Slim et tant d’autres.
François de Roubaix Dernier domicile connu (1970) Autre terrain de jeu en ce début des années 1970 pour les apprentis sorciers, le cinéma grâce à quelques génies comme l’autodidacte François de Roubaix trop tôt disparu mais dont les expérimentations touchaient le grand public comme sur cette BO d’un film interprété par deux grandes vedettes de l’époque, Marlène Jobert et Lino Ventura dont il avait, pour ce dernier, déjà croisé la route pour composer le sublime score des Aventuriers.
Perrey/Kingsley Mas que nada (1967) Un grand pas dans l’amitié franco-allemande que cette association entre Jean-Jacques Perrey et Gershon Kingsley (futur auteur du croustillant Pop Corn) pour des Vibrations kaléidoscopiques qui mêlent morceaux originaux et reprises hallucinées dont ce Mas que nada ou des Parapluies de Cherbourg jouissifs mais à déconseiller aux fans hardcore de Michel Legrand.
Delia Derbyshire – Pot au feu (1968) Outre-Manche, la BBC dispose elle aussi depuis 1958 (année de création du GRM de Pierre Schaeffer) de son propre laboratoire, The BBC Radiophonic Workshop dont la pionnère Delia Derbyshire est un des piliers. L’histoire ne dit pas si elle a mitonné son Pot au feu en hommage à ses homologues français. L’occasion d’évoquer aussi une autre pionnière britannique Daphne Oram et son Snow abrasif.
Vangelis Sex Power Part IV (1970)
Onze ans avant ses triomphaux Chariots de feu pour Hugh Hudson, Vangelis est encore dans l’aventure Aphrodite’s Child lorsqu’il écrit sa première BO (et sa première escapade solo) pour le Sex Power d’Henry Chapier, une série de morceaux souvent percussifs et flirtant avec la musique concrète.
https://www.youtube.com/watch?v=0MCnnfXPSHw
Wendy Carlos Orange mécanique (1971) Walter Carlos publie Switched-on Bach en 1968, qui revisite le compositeur au Moog, remarqué par Pierre Henry, Glenn Gould et donc… Stanley Kubrick. Il confie à Walter Carlos les clés de son Orange mécanique afin qu’elle transcende les genres et électrise Beethoven. Et, rassurez-vous, pas d’erreur sur les prénoms : Walter Carlos est bel.le et bien devenu.e Wendy en 1973. Une pionnière dans bien des domaines, donc.
Deodato Also Sprach Zarathustra (2001) (1973) Deux ans plus tard, le Brésilien Eumir Deodato revient au précédent film de Stanley Kubrick, 2001 : l’odyssée de l’espace pour frotter à son tour classique et électronique dans un esprit très Shaft en livrant sa version très personnelle d’Ainsi parlait Zarathustra. Quelques décennies plus tard, on le retrouvera aux côtés de Björk pour se charger des arrangements de cordes de splendeurs telles que Isobel, The Hunter ou Hyperballad.
Hot Butter Pop Corn (1972) Ecrit par Gershon Kingsley en 1968, Pop Corn connaîtra plusieurs versions avant 1972, année où Hot Butter en fait le premier succès 100 % electro à se hisser au sommet des charts. Attention néanmoins : si vous cliquez sur le lien de ce redoutable ver d’oreille, vous risquez de l’avoir en tête jusqu’en 2022 minimum.
Donna Summer I Feel Love (1976) Quand, soudain, le meilleur du synthétique débarque de Munich pour conquérir l’Amérique. Avec la diva divine Donna Summer comme cheval de Troie, Giorgio Moroder réalise son deuxième coup de génie, après Love to Love, meilleur encore quand il s’alanguit sur huit minutes. On le retrouvera ensuite compositeur de BO, Midnight Express, en 1978 et historien de lui-même chez Daft Punk avec le dingue Giorgio by Moroder dans lequel, en 2013, il revient sur son intuition de l’époque : “I knew that it could be the sound of the future, but I didn’t realize how much impact it would be.”
Augustus Pablo King Tubby Meets Rockers Uptown (1974) Comme la pénicilline de Fleming ou le Nutella de Ferrero, le dub naît d’une erreur de manip en Jamaïque. Très vite, King Tubby en devient le master avec Lee Scratch Perry pour disciple. Très lentement mais sûrement, il infusera le reggae et tout un pan de la musique electro et du punk (remember entre autres The Slits ou le One More Dub des Clash sur Sandinista! des Clash). Illustration ici sublimée par le légendaire melodica d’Augustus Pablo.
Telex Moscow Discow (1979) Après s’être amusés à déconstruire des tubes comme Twist à Saint-Tropez (#RIP Dick) ou le Ça plane pour moi de leur compatriote Plastic Bertrand, les Bruxellois connaissent un réel succès avec Moskow Diskow. Une prise de distance et un sens du second degré qui n’est pas sans rappeler leurs dignes successeurs, 2ManyDJs, bootlegant et mashuppant à l’envi tous les standards de l’époque vingt ans plus tard.
Liquid Liquid Optimo (1983) A New York, en ce début des années 1980, déferle aussi la vague underground no-wave qui mêlent ryhtmes entêtants, basses en avant et psalmodies. Pas de l’electro au sens propore, mais une fusion de genres qui permettra à cet Optimo de se voir samplé par Grandmaster et Melle Mel sur White Lines (Don’t Do It). Et qui n’y entend pas une préfiguration de LCD Soundsystem aura trop écouté le ver d’oreille précédemment cité.
Lizzy Mercier Descloux Fire (1979) La géniale Lizzy Mercier Descloux, à laquelle un émouvantr ouvrage de Simon Clair, Lizzy Mercier Descloux, une éclipse (lire notre article), vient d’être consacré, a surfé des musiques brésilienne et sud-africaine aux no et new-wave naissants. Elle dévoie ici le disco en cours d’essouflement et qu’on retrouvera bientôt au format house, ce qu’on entend dès ce Fire de 1979.
ESG UFO (1981) ESG, pour Emarald, Sapphire & Gold, groupe de Brooklyn à l’origine composé de quatre sœurs inventent avec UFO une forme de proto-breakbeat qui fera le bonheur de centaines de samplers par la suite. Groupe fondateur, ESG dispose d’une courte discographie composée d’autant d’indispensables.
Cluster & Brian Eno Die Bunge (1977) Retour en Allemagne et au calme où celui que l’on considère comme, entre autres multiples influences, le père de l’ambient rencontre un des groupes les plus importants et les plus méconnus du krautrock au mitan des années 1970 pour une ballade à l’atmosphère minimale que ne renierait pas la scène électronique de Cologne deux décennies plus tard.
David Bowie Warszawa (1977) On retrouve Brian Eno co-architecte de la fameuse trilogie berlinoise de David Bowie dont le premier volume, Low, est placé sous le haut patronage du krautrock. A quelques pas du Mur qui marque le début du Rideau de fer, la paire évoque Varsovie tout en nappes aériennes à l’ambiance ambient. Sur Heroes la même année, il rendra hommage à un des hérauts de l’electro sur V-2 Schneider alors que l’année précédente déjà le Radioactivity de Kraftwerk ouvrait les concerts de son Isolar Tour.
Suicide Ghost Rider (1977) Pendant que David Bowie et Brian Eno atmosphérisent Berlin et Varsovie, le duo new-yorkais Alan Vega/Martin Rev s’applique à terroriser Big Apple depuis 1971 à grands coups de riffs agressifs agrémentés de hoquets rockab’. Six ans plus tard, ils publient un premier album fondateur où déjà pointe la scène hardcore.
https://www.youtube.com/watch?v=nOTRqbEKgXM
New Order Blue Monday (1983) Gavé de samples, influences et références, les Mancuniens envahissent les dance-floors new-yorkais et mondiaux depuis 1983 jusqu’à nos jours car rares sont les fêtes qui se passent de ce morceau addictif à la langueur idéale. Et comme nul n’échappe à Kraftwerk, sachez que leur Uranium est samplé au tout début et à la toute fin du titre.
The Human League Being Boiled (1978) Cinq ans plut tôt, d’autres Britanniques forgeaient à Sheffield un autre son, moins dansant, plus dark, dirait-on de nos jours, mais déjà assis sur des bleeps et des blancs inquiétants qu’on retrouvera bien des années plus tard dans l’éphémère mouvance initiée par Burial. Entre-temps, The Human League mutera sans souci en synth-popper avec Don’t You Want Me puis, pour partie, en Heaven 17.
Jacno Rectangle (1979) Alors que se croisent les années 1970 et 80, sonne l’heure du grand débat. Est-ce que la synth-pop entre dans le champ de l’electro ? Quelle est la différence entre électronique et synthétique ? Vous avez 3 minutes et 40 secondes soit le temps que dure ce merveilleux Rectangle et qui vous permettra de vous faire une religion sur la synth-pop.
The Buggles Video Killed the Radio Stars (1980) S’appuyant sur une vidéo effectivement innovante, The Buggles entendent tuer les stars de radio et bien plus encore (“They took the credit for your second symphony/Rewritten by machine on new technology”). Le single permet aussi au duo d’envahir le monde grâce au vocoder avant que Trevor Horn participe à l’aventure Art Of Noise et fonde ZTT Records.
Cabaret Voltaire Sensoria (1984) Le Cabaret Voltaire de Zurich vit naître le mouvement Dada en plein cœur de la Grande Guerre. Celui de Sheffield participe à l’émergence des machines et des synthés dans la pop-music contemporaine au cœur de la crise thatchérienne avec cette pointe de mélancolie désabusée propre à la ville natale de Jarvis Cocker.
George Kranz – Din Daa Daa (1984) Et sinon, sérieux, on en fait quoi de ce truc-là ? On le met ou pas ? Allez, on le garde juste pour le plaisir de citer Stewart Copeland qui l’a décrit comme “le dialogue entre un batteur et un chimpanzé” et parce qu’il a quand même été produit par un des mecs de Tangerine Dream dont nous tairons le nom.
Sven Väth/OFF Eletric Salsa (baba, baba) (1986)
On retrouve des échos de Georgie Kranz chez Sven Väth qui commence sa carrière comme DJ au Dorian Gray de Francfort. Avec ses comparses Michaël Münzing et Luca Anzilotti (futurs producteurs de Snap!), il fonde OFF pour électrifier la salsa.
Laurie Anderson O Superman (1982) Avec Big Science, Laurie Anderson signe dès son premier album son chef-d’œuvre. Le révéré John Peel s’éprend de la litanie psalmodiée O Superman et contribue largement à hisser l’artiste avant-gardiste au sommet des charts britanniques. Et si Laurie Anderson retournera par la suite dans la confidentialité, elle n’en confirmera pas moins sa grande science expérimentale.
Herbie Hanckock Rock It (1983) Comme le Planet Rock d’Afrika Bambaataa publié l’année précédente, le Rock It d’Herbie Hancock (un des terrains de jeu des breakdancers et smurfers de l’époque) se trouve à la croisée des chemins où se rencontrent le jazz, le hip-hop electro.
Cybotron Techno City (1983) Comme toute ville un temps sinistrée qui se respecte (lire plus haut Sheffield ou Berlin), Detroit bouillonne d’inventivité. Après la soul de Motown et l’incandescence proto-punk des Stooges et de MC5, la Motor City (le MC de MC5) devient Techno City sous la houlette de Juan Atkins sous son alias Cybotron. Un nouveau genre émerge et Atkins lui donne un nom avec aplomb.
Jack Master Funk Jack the Bass (1985) A quelque 450 kilomètres de là, alors que Detroit s’emploie à créer la techno, Chicago s’affaire à faire naître la house, notamment sous l’impulsion de Trax Records. Moins sombre et plus hédoniste même si visant à s’étourdir pour oublier, elle remouline et distord la disco comme ici chez Jack Master Funk.
https://www.youtube.com/watch?v=UeiH9Mm0E5Y
Mr. Fingers Can You Feel It (1986) Chicago toujours, Trax Records encore avec cette remarquable lessiveuse de cerveaux que l’on doit à un des piliers de la scène du Michigan, Larry Heard, sous son alias le plus populaire, Mr. Fingers qui met le doigt sur une folle tournerie en face B du non moins efficace Washing Machines.
Marshall Jefferson Move Your Body (1987) A force d’abnégation, le valeureux label finit par obtenir un tube avec ce Move Your Body de Marshall Jefferson qui va rayonner sur la planète grâce à des claviers tirant vers l’acide dont on retrouvera le principe de l’autre côté de l’Atlantique, notamment chez S-Express voire les Beatmasters.
MARSS – Pump up the Volume (1987) En Europe, justement, plus précisément à Londres, la fusion de deux groupes du label 4AD (Colourbox et AR Kane) engendre le monstrueux MARRS et de l’hymne massif Pump Up the Volume (pompé chez Eric B. & Rakim) qui devient numéro en Grande-Bretagne en octobre 1987.
Charanjit Singh Raga Bhairavi (1982) On vous incruste là un extrait de l’album Synthesizing: Ten Ragas to a Disco Beat de Charanjit Singh qu’un digger néerlandais déterre en 2010 pour l’ériger en père de l’acid house, un postulat curieux dans la mesure où l’album était parfaitement inconnu. Néanmoins à l’écoute du morceau qui suit on tend à croire ce que le dit digger dit.
Phuture Acid Tracks (1987) Construit autour de DJ Pierre, Spanky et Herb J, le collectif mouvant Phuture de Chicago (Michigan) annonce doublement la couleur de leur démarche à la fois phuturiste et résolument acide pour un track d’une redoutable d’efficacité qui traverse encore les années.
Anthony Shakir Sequence 10 (1988)
Des rythmes acidulés comme des crocodiles Haribo qui vous mordraient à l’oreille à moins qu’il ne s’agisse de ces M&M’s magiques à gober illégallement : Sequence 10 ne peut venir que de la Techno City tant l’euphorie nous gagne à son écoute.
Rhythim Is Rhythim Nude Photo (1987) Back to the Motor City où, à l’instar de Juan Atkins, Derrick May officie sous plusieurs alias pour délivrer une techno limpide et pleine d’une euphorisante acidité. Sous la bannière Rhythim Is Rhythim, il développe cette Nude Photo appelée à être diffusée en de multiples exemplaires qui jamais n’atteindront l’original.
https://www.youtube.com/watch?v=-gu3albgauw
Inner City Big Fun (1988) Au grand jeu de piste des alias de la Motor City, voici venu le tour de Kevin Saunderson, troisième membre des Belleville Three avec Juan Atkins et Derrick May, qui, sous son avatar Inner City, s’associe au chant soul de Paris Grey. Une piste que ne manquera pas de suivre Massive Attack quelques années plus tard.
Model 500 Electric Entourage (1987) Le pouls de Detroit n’en finit plus de s’accélérer au fil des années 1980. Juan Atkins s’est encore une fois transformé, cette fois en Model 500, samplant, ô surprise, le Music Non Stop de Kraftwerk en l’agrémentant de susurrements entêtants qui laissent pantois et épuisé les dance-floors de 1987 aux alentours de trois heures du mat’.
https://www.youtube.com/watch?v=FI1ftIyCoeQ
A Guy Called Gerald Voodoo Ray (1988) En retraversant l’Atlantique, on tombe sur A Guy Called Gerald qui contrairement à Model 500, Inner City ou Rhythim Is Rhythim, s’appelle vraiment Gerarld. Gerald Simpson, ancien membre du 808 State (du nom de la machine Roland éponyme et en couve de cette playlist), fait rayonner le voodoo sur l’envoûtant et orientalisant vocal de Nicola Collier.
S-Express Theme from S-Express (1988) Ami.e puriste, il est temps pour toi de reculer de 20 cases pour retrouver David Bowie et Brian Eno ou d’avancer de 4 pour retourner à Chicago. Entre-temps, l’electro se popularise et affole les charts grâce à des vers d’oreille aussi redoutable que ce Theme from S-Express de 1988.
https://youtu.be/eCsAgIL6kwc
One O One Rock to the Beat (1989) Ami.e puriste, si tu as bravement choisi de ne pas avancer de 4 cases, te voici confronté.e à Rock to the Boat, représentatif de la scène belge de l’époque à laquelle on donnera même un nom car les années 1980 étaient promptes à coller des étiquettes. Ici, donc, le new beat, avouons-le un peu oublié depuis.
Beatmasters feat. Cookie Crew Rock Da House (1989) Ami.e puriste, plus que deux cases. Ami.e ado dans les années 89, tu te souviendras avec émotion de ce Rock Da House qui bercera tes Ciel mon mardi dont il deviendra le générique sans t’attendre à ce que, bien des années plus tard, Christophe Dechavanne se réincarnera en Cyril Hanouna.
Snap! The Power (1990) Bon, allez, promis, on repasse aux choses sérieuses, après ça. Et aussi après ça, édité quatre ans plus tard (Reel2Reel et son clip ultraclasse (sic) pour I Like to Move It) pour toutes les personnes friandes de plaisirs inavouables.
Lil Louis French Kiss (1989) Lil’ Louis a pris part de longues années au développement de la scène chicagoanne. Avec French Kiss, il accède aux dance-floors all around the world grâce à des rythmiques orgasmiques qu’il couple avec une jouissance féminine qui lui vaudrait peut-être aujourd’hui les foudres de la censure. 89, année érotique ?
808 State Pacific State (1989) Synth Roland, priez pour nous car vient l’ère du Second Summer of Love, vague de chaleur et de rythme qui atteint les côtes du Royaume-Uni en cette année 1989. 808 (comme le mythique synthétiseur, donc) State et son Pacific State feront beaucoup pour que la vague frappe de plein fouet la scène mancunienne.
The Orb A Huge Ever Growing (Orbital Dance Remix) (1989) Un deuxième été de l’amour ne pouvait faire l’impasse sur le Lovin’ You de Minnie Ripperton, chanson qui ouvre et sert de colonne vertébrale à ce track furieux qui fera s’ecstasyer les foules. Le genre de morceau qui rend difficile la redescente de rave à la réalité dans sa version Orbital.
The KLF What Time’s Love (1990) Un morceau qui s’ouvre en hurlant “Kick out the jams, motherfucker” ne saurait être foncièrement mauvais. Il poursuit son œuvre en nous frappant en pleine tête de beats épuisants que tapisse un flow hip-hop impeccable soutenu d’une voux soulful en diable. Dur de s’en remettre.
Primal Scream Loaded (Andrew Weatherall Remix) (1990)
Andrew Weatherall, DJ mythique des clubs mancuniens, s’était fait pour spécialité, en plus d’enflammer les dance-floors, de concasser le meilleur de la scène locale comme le symbolise parfaitement cette revisite spatiale du Loaded de Primal Scream.
Happy Mondays Hallelujah (Club Mix)
Sur l’un des plus grands hymnes du moment, le Hallelujah des Happy Mondays, ils ne sont pas trop de deux pour le transporter dans les clubs afin de transporter les corps. Andrew Weatherall s’allie à un autre remixeur phare, Paul Oakenfeld pour une imparable version. Techno prisoners…
Orbital Fahreneiht 303 (1991) Orbital, duo issu du paisible Kent, tire son nom de l’autoroute qui permettait de relier la capitale anglaise à la route des raves (London Orbital), ce qui ne l’empêchera pas de prendre des chemins de traverse pour proposer une electro, à la fois minimale, répétive et mélodique, à nous donner envie de danser all day and all of the fahrenheit.
Kryder feat. Cajmere Percolator (avec Green Velvet) (1992) La furia britannique de ces années-là ne doit pas empêcher de jeter une oreille de l’autre côté de l’Atlantique, Chicago vibre encore de remontées acides grâce entre autres à Curtis Jones, alias Cajmere aka Green Velvet qui lie avec brio house et techno.
Mad Mike Heart of a Groove (1992) Côté Detroit, ça bouge toujours. La Techno City prend des tonalités house avec Michael Anthony Banks, co-créateur d’Undeground Resistance dont la vitalité se dément grâce, notamment à ce mélange savant de rondeurs funk, de vocals soul et de pianotages obsédants.
Plastikman Plasticity (1993) Côté Detroit, ça bouge encore et toujours. Sous son alias Plastikman, Richie Hawtin dégaine Sheet One, album qui réussit la prouesse d’une dance minimale qui boucle et reboucle, entortille les cortex et les corps seuls, qui, les uns et les autres, finissent pantelants.
Ken Ishii Flurry (1994) Certes, Ken Ishii est né à Sapporo (Japon) et rien ne semblait le destiner à appartenir à la scène de Detroit. Pourtant, c’est bel et bien sur Plus 8, le label du ci-dessus Richie Hawtin, qu’il développe sa techno sophistiquée aux percussions savamment disséminées.
Speedy J – Pull Over (1991)
Trois ans plus tôt, c’est le Néerlandais Jochem George Paap qui avait rejoint l’internationale techno de Detroit. Lui aussi signé chez Plus 8, Speedy J apporte de Rotterdam un sens de la répétitivité et une acidité bienvenues, notamment avec ce Pull Over qui fait chaud aux jambes.
Autechre Basscadet (1993) Le binôme mancunien Rob Brown/Sean Booth compte parmi les figures de proue de l’inventif et précurseur label Warp Records et participe à l’émergence de l’IDM (Intelligent Dance Music) dont ce Basscadet, publié sur leur album Incunabula.
Maurizio Domina (1993)
On lui adjoint souvent le titre de Mephisto et il est vrai qu’il y a un côté diabolique dans sa précision et sa manière d’accrocher nos cerveaux à ses rythmes et beats addictifs. Preuve de son importance et de son influence, ce Domina existe également remixé par le grand Carl Craig.
Björk Violently Happy (1993) A tous les déçus de la séparation des Sugarcubes au sommet de la gloire, Björk apporte la plus enthousiasmante des réponses avec Debut, un premier album contrasté et pour partie conçu avec Nellee Hooper où se mêlent ballades éthernelles et hymnes euphorisants à l’image (et au son) de ce hit qui, effectivement, rend violemment heureux.
Massive Attack Protection (1994) En 1991 paraît le révolutionnaire Blue Lines de Massive Attack qui révèle la scène de Bristol, d’où émergeront, entre autres, Tricky Portishead ou Earthling. Trois ans plus tard, envoûtante Tracy Horn (Everything But The Girl) interprète ce Protection sous un tapis de dub ouaté.
Portishead Sour Times (1994) Pendant l’enregistrement de Blue Lines, le groupe accepte qu’un dénommé Geoff Barrow traîne dans le studio pour y développer ses propres idées. Un stage d’observation fructueux qui débouchera sur la création de Portishead puisqu’il découvre cette même année la chanteuse Beth Gibbons. Trois ans plus tard, sort un concentré de tubes spleenétiques, Dummy, recelant ce Sour Times que Portishead stratosphérise en live.
Tricky Hell Is Around the Corner (1995) Tricky a lui aussi participé à l’aventure Blue Lines et poursuivit sur Protection sans jamais vraiment se sentir membre de groupe. En 1995, pour son premier album solo, Maxinquaye, il ose user du même sample (Ike’s Rap II d’Isaac Hayes) qui servait d’armature au carton Glory Box de Portishead. Un pari tout aussi réussi que ce Hell Is Around the Corner.
Future Sound of London Cascade (1994)
Affilié à aucune scène ni coterie, le mystérieux collectif Future Sound of London traversera les années 1990 en semi-clandestinité avec des atmosphères ouatées et deux minitubes, Papua New Guinea nourri d’un sample de Lisa Gerrard (Dead Can Dance) et cette élégante Cascade.
Goldie Inner City Life (1995)
La presse musicale anglaise, jamais avare de nouvelles étiquettes, crée la jungle et le drum’n’bass à moins que ce ne soit Goldie lui-même, qui recouvrit Birmingham sous les bombes avec Bristol 3D (futur membre de Massive Attack), avant de se lancer dans une brillante carrière musicale.
Dave Clarke Wisdom to the Wise (Marcel Dettmann Remix) (1996)
De la terre fertile de Brighton est né Dave Clarke, figure pionnière de la techno hardcore. Il confie ici son morceau au délicieux Marcel Dettmann, longtemps DJ résident du Berghain berlinois. En résulte une merveille de précision et d’envie de retourner en 1996, ou en 2013, date du remix.
7th Plain Wishbone (1995)
L’Anglais Luke Slater multiplie les alias, chacun abordant un sous-genre. Avec 7th Plain, il explore sa face atmosphérique et minimale avec des titres comme Wishbone qu’on aurait vu sans peine intégrer la bande expérimentale de Warp Records.
Asian Dub Foundation PKNB (1995)
Quasiment tout est dit à la lecture du nom du groupe qui mixe sons indiens et textures synthétiques sur lesquelles deux MC posent un flow rageur et politique qui documente les années post-Thatcher avec acuité et puissance. Une énergie nécessaire qui fait souffler un vent nouveau sur la techno.
Archive Nothing Else (1996) Avant les stades, les longues suites floydiennes et les albums vendus par camion, les Londoniens avaient pris la roue de la galaxie bristolienne sur leurs deux premiers albums avec une certaine élégance dont témoigne ce Nothing Else.
DJ Shadow Organ Donor (1996) Composé à 100 % de samples le Endtroducing… introducing DJ Shadow participe de l’émergence du hip-hop expérimental qui se verra rapidement coller une étiquette abstract, ce qui n’empêchera DJ Shadow de toucher une large audience.
Underworld – Born Slippy (1996) 1996 est aussi l’année de sortie du contesté et contestable film culte de Danny Boyle, Trainspotting, dont il faut néanmoins reconnaître la qualité de la bande son encapsulant l’electro britannique du moment.
Arnaud Rebotini & Christian Zanési Blixa (2016) Comment ça, un morceau de 2016 dans la setlist Electro 1967-1996 ? Tout simplement, parce qu’associé avec Christian Zanési, fondateur en 1977 du Groupe de recherches musicales, Arnaud Rebotini livre un morceau hors du temps qui associe IRCAM et GRM à Blixa, membre fondateur de l’essentiel Einstürzende Neubauten né en 1980.
Eliane Radigue Occam Ocean (2017) Comment ça, un morceau de 2017 dans le tracklisting Electro 1967-1996 ? Tout simplement, parce qu’Eliane Radigue a été de toutes les aventures pionnières de la musique électronique et que le Sonic Protest lui a rendu un femmage mérité en ce mois d’avril.
Retrouvez le hors-série Electro des Inrocks en kiosque à partir du 12 avril, en ligne ici ou à la Philharmonie de Paris dans le cadre de l’exposition Electro – De Krafwerk à Daft Punk, jusqu’au 11 août. Rendez-vous très bientôt avec Daft Punk, Ellen Alien, LCD Soundsystem, Justice, The Blaze, Miss Kittin, entre tant d’autres pour La deuxième party des Inrocks Electro (1967-1996). Enfin ne manquez pas les trois mix de Laurent Garnier sur le site de la Philharmonie.
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